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DĂ©claration CDEN du 12 avril 2018
Unsa Éducation
Tout d’abord, nous tenons à remercier les services pour la qualité des documents, comme à chaque instance.
Les discussions autour des rythmes sont les hirondelles de l’éducation nationale, elles reviennent invariablement chaque année au printemps.
Saint John Perse disait que le vrai courage est comme un cerf-volant, il s’élève dans le vent contraire. On peut se demander si notre ministre a lu seulement la 1ère moitié de la citation, d’où une certaine politique au doigt mouillé.
En effet, la réforme des rythmes n’a été appliquée sur tout le territoire qu’à partir de la rentrée 2014, avec cependant des aménagements selon le décret Hamon. Et, c’est ici que nous allons reparler de courage, le ministre a-t-il pris ses responsabilités et a-t-il décidé d’annuler la réforme seulement 4 ans après sa mise en application ? Non, bien évidemment. Il tranche en ne tranchant pas, faisant porter ce choix, par la voie de la dérogation, sur les équipes enseignantes, les municipalités, les parents d’élèves, les services départementaux de l’éducation nationale et le transport scolaire, sur tous sauf lui donc. Dans cette absence de cadrage national, désormais 77% des écoles sont concernées par la dérogation et l’exception devient la règle.
Et pourtant, le président Macron affirme haut et fort que tout démarre de l’école. Aujourd’hui en compagnie de Jean-Pierre Pernaut, fringuant jeune journaliste de 68 ans, il s’est rendu dans une petite école rurale de l’Orne dans une classe de CE2 où tout a été comme dans la réalité, avec les livres sur les bureaux et les annotations de la maîtresse au tableau, sauf qu’il n’y avait pas d’élèves. Est-ce là la vision que notre gouvernement a de l’école ? Nous avons bien perçu toute l’importance d’une telle mesure de communication.
Cela ne fait que 4 ans que les écoles sont revenues à 4,5 jours. A-t-on tiré un bilan ? A-t-on lancé des études pour en voir le bénéfice ? Non, mais pourquoi le faire, ça n’a aucune utilité pour prendre des décisions pour le bien de l’enfant.
Pour les municipalités, le choix est souvent budgétaire, et cela peut se comprendre. Le maire est responsable de ses finances et une grande incertitude règne sur le maintien des aides de l’état. Les questions d’argent ont primé sur les besoins cognitifs des enfants et l’équilibre des temps de vie de la famille.
Pour les enseignants, nous pouvons comprendre leur position. Un des arguments souvent avancé a été la fatigue de l’enfant mais il va être difficile de prouver qu’un enfant qui est déjà fatigué durant les 2 heures du vendredi après-midi va l’être moins quand il en aura 3 tout comme il est difficile de prouver qu’une matinée de plus n’apporte pas un surcroît de fatigue. En outre, les enfants dont les parents travaillent se lèveront tout de même le mercredi matin pour aller au centre aéré. D’autant que pour compliquer les choses, le positionnement des APC soulève de nouvelles questions, doit-on les placer en fin de journée, cela complique le transport, durant les NAP, cela crée une inégalité ?
Lors des sondages lancés par les mairies ou les écoles, pour certains parents d’élèves, la question centrale est souvent celle de l’emploi du temps des parents plus que celui des enfants, et la coïncidence entre les 2 reste la vraie question.
Et l’enfant dans tout ça ? Il s’adaptera, les enfants sont si résilients…
Que le temps d’apprentissage du matin soit bien plus productif que l’après-midi peu importe finalement, c’est assez secondaire. Tout comme peut l’être une journée moins longue. Et ne parlons pas non plus de l’ouverture culturelle que les activités proposées pouvaient donner aux élèves. D’ailleurs, est-ce vraiment le rôle de l’école de donner de l’ouverture culturelle aux enfants ?
Et que dire de l’impact social du retour à 4 jours ? Les animateurs qui vont perdre leur emploi, les chauffeurs de bus ne travailleront plus que 3 heures, 4 jours par semaine au lieu de 5. Les mères de famille aussi seront impactées. Selon une étude faite par Emma Duchini et Clémentine Van Effenterre « La réforme des rythmes scolaires a eu un impact significatif sur l’allocation du temps de travail des mères d’enfants en âge d’aller à l’école élémentaire, alors que ces femmes étaient, bien davantage que les hommes, amenées à adapter leur activité professionnelle à la présence des enfants. À ce titre, le retour à la semaine de quatre jours constitue une occasion manquée pour remédier à une inégalité supplémentaire sur le marché du travail français. »
Alors bien sûr, la réforme des rythmes n’était pas parfaite, les débats se sont souvent plus menés sur la forme que sur le fond. Nous appelons de nos vœux une réforme sur le fond qui n’a pas eu lieu puisqu’il aurait fallu dissocier la maternelle de l’élémentaire parce que les besoins des enfants ne sont pas les mêmes selon les âges. Il aurait fallu abaisser les seuils d’élèves par classe en dessous de 25. Il aurait fallu revoir les programmes, peut-être les rendre moins lourds et se recentrer sur les apprentissages de base pour permettre un vrai allègement de la semaine scolaire et reparler des 23 heures hebdomadaires. La réforme des rythmes aurait dû à l’origine alléger le temps de travail hebdomadaire de l’enfant et c’est donc sur l’année et non pas sur 5 jours qu’il aurait fallu répartir les enseignements. Mais nous nous heurtons là à des intérêts économiques qui dépassent largement le cadre de l’école. Il aurait fallu surtout penser au développement de l’enfant et uniquement au bien du développement de l’enfant.
Pour ce qui nous concerne aujourd’hui, les intérêts sont divers, les incohérences sont nombreuses et les positions multiples et toutes a priori défendables, nous n’irons pas contre la volonté de nos collègues ni contre celle des conseils d’école, c’est pourquoi nous nous abstiendrons dans cet imbroglio général. Tant de précipitation n’a pu que nuire aux débats et nous passons à côté d’une vraie grande réforme ambitieuse pour laquelle, à l’Unsa Éducation, nous continuerons à nous battre dans l’intérêt unique de l’enfant. Mais nous gardons nos convictions fermes et nos espoirs intacts.
Je vous remercie pour votre Ă©coute.