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Écrans et enfants, la prĂ©sence d’un adulte est importante
Article publié le jeudi 29 mars 2018.
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Yann Leroux est psychologue clinicien, psychanalyste et… geek ! Il a fait une thèse sous la direction de Serge Tisseron sur la psychodynamique des groupes sur le rĂ©seau Internet. Il exerce actuellement dans un CMPP de l’AcadĂ©mie de Bordeaux. Il a acceptĂ© de rĂ©pondre Ă  nos questions Ă  propos des enfants et des Ă©crans.

 

On entend beaucoup parler du danger des écrans en ce moment, qu’en pensez-vous ? Les écrans sont-ils vraiment dangereux ?

Les écrans sont aussi dangereux que les livres, le cinéma, la bande-dessinée, la télévision ou la radio. Tous ces média ont été tour à tour accusés de nuire au développement des enfants. À chaque fois, le discours oppose une jeunesse innocente pervertie par un média. La recherche permet de dessiner un portrait des relations écrans-enfants plus complexe et plus réaliste. L’idée selon laquelle les écrans auraient une action univoque sur le développement des enfants a été abandonnée depuis le siècle dernier. Les chercheurs essaient maintenant de rendre compte de cette relation en prenant en compte les caractéristiques des écrans, leurs contenus, les contextes d’utilisation, les caractéristiques des enfants et de leurs familles.

Quels sont selon vous les précautions à prendre pour les très jeunes enfants, faut-il vraiment proscrire les écrans avant 3 ans ?

Le moratoire “pas d’écrans avant trois ans” a été donné par l’Académie des Pédiatres Américain. En 2015, l’APA a changé ses recommandations pour prendre en compte les dernières évolutions technologiques et les pratiques familiales. La recherche a en effet identifié que les enfants sont devant les écrans avant trois ans et que cela n’est pas nécessairement problématique. La recommandation de l’APA est maintenant “pas d’écran avant deux ans” avec un accent mis sur le rôle des parents qui sont invités à s’impliquer dans toutes les activités écraniques de leurs enfants. À partir d’une revue de la littérature, l’APA met aussi en avant que les média interactifs sont potentiellement plus intéressants pour le développement des enfants. La qualité du contenu est aussi important. Savoir comment l’enfant passe son temps avec le média est plus important que de savoir combien de temps il passe avec le média. Enfin, le co-engagement est aussi décisif car la participation de la famille facilite les interactions sociales et les apprentissages.

Que conseillez-vous pour les enfants de la maternelle ? du primaire ? Et pour les adolescents ?

Les enfants de la maternelle, du primaire et les adolescents sont confrontĂ©s Ă  des challenges diffĂ©rents. Les enfants de maternelle quittent les jeux sensori-moteurs pour les jeux symboliques qui leur permettent d’assimiler leurs expĂ©riences passĂ©es et se prĂ©parer aux expĂ©riences futures. Ils aiment aussi les jeux de construction et d’assemblage. Ă€ cet âge il est intĂ©ressant de privilĂ©gier les jeux ou l’on est ensemble, ou l’on compte, lit et Ă©crit. Les jeux qui prĂ©sentent les personnages de la culture enfantine sont Ă©galement intĂ©ressants. Les tablettes peuvent aussi ĂŞtre utilisĂ©e pour faire la lecture d’histoires mais il est important que les contenus ne soient pas trop enrichis. Il a en effet Ă©tĂ© montrĂ© que l’enfant suit moins bien l’histoire s’il est distrait par des animations.

Il est important que les applications qui sont sur les tablettes de l’école soient diffĂ©rentes de celles que l’enfant trouve habituellement Ă  la maison. En d’autres termes, les tablettes doivent ĂŞtre des porte-culture. Plus l’enfant est jeune, plus la prĂ©sence d’un adulte est importante. En effet, les questions posĂ©es Ă  l’enfant sur ce qui se dĂ©roule Ă  l’écran l’aide Ă  Ă  comprendre le jeu dans tous ses dĂ©tails et faire des liens entre les images et d’autres situations.

La pĂ©riode du primaire correspond Ă  la haute saison du jeu. Pendant ces annĂ©es, les enfants passent du jeu sociodramatique dans lesquels ils jouent diffĂ©rents rĂ´les. Ils sont pompiers ou Ironman dans des jeux forts en couleurs. Les plus vieux vont davantage vers les jeux de sociĂ©tĂ©, les jeux coopĂ©ratifs ou de compĂ©tition. Pour ces enfants, il est important d’accompagner le passage Ă  l’Internet qu’il s’agisse des jeux en ligne ou des rĂ©seaux sociaux. Ă€ cet âge, l’offre Ă  jouer est très diverse. Les applications permettent de s’initier au codage, de se promener dans une encyclopĂ©die tandis que les jeux donnent l’occasion de vivre des aventure extraordinaires ou au contraire de se plonger dans le quotidien le plus banal. Pour aider les enfants Ă  faire leurs choix, les adultes peuvent s’appuyer sur les recommandations PEGI en les adaptant Ă  chaque enfant.

Les adolescents sont capables d’une pensĂ©e abstraite et d’utiliser le raisonnement hypothĂ©tico dĂ©ductif. Ils jouent avec la culture en Ă©coutant de la musique, en lisant des comics ou des manga, en regardant des sĂ©ries ou en allant au cinĂ©ma. Sur Internet, ils utilisent les rĂ©seaux sociaux pour discuter ou flirter avec d’autres adolescents . Il est souhaitable d’aider l’adolescent Ă  construire une littĂ©ratie numĂ©rique qui lui permette de trouver et de produire des contenus en ligne mais aussi d’avoir un regard critique sur ce qui est publiĂ©.

Quels messages les professionnels de l’éducation peuvent-ils transmettre aux familles pour les accompagner au sujet des écrans ?

Je pense que les professionnels de l’éducation peuvent soutenir la confiance que les parents ont en eux-mĂŞmes. Il n’y a pas besoin d’être un expert en numĂ©rique pour Ă©lever un digiborigène* : ĂŞtre un parent suffit. Il est important de transmettre des connaissances sur les pratiques qui ont Ă©tĂ© Ă©tablies scientifiquement afin d’informer au mieux les parents.

Des équipements numériques sont de plus en plus utilisés dans le cadre scolaire, est-ce à votre avis une bonne ou une mauvaise chose ?

L’école a accompagné le passage à la culture du livre. Il est nécessaire qu’elle fasse la même chose pour la culture numérique qui est en train de s’installer. Trouver des équipements numériques dans les classes est donc une bonne chose. Je préférerais que les logiciels libres soient favorisés ou qu’a minima les citoyens connaissent les accords passés entre les géants du numérique comme Microsoft et l’Education Nationale.

 

*Digiborigène : ce terme désigne tous ceux pour qui les espaces numériques sont un espace de vie

 
 
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