Les nouveaux programmes de lycée élaborés par des groupes d’experts pour le Conseil supérieur des programmes font l’objet d’une consultation organisée par le ministère au début du mois de novembre 2018. Pour le SE-Unsa, ces projets de programme ne sont pas satisfaisants, tant sur le plan disciplinaire que sur le plan pédagogique.
Ces projets concernent les enseignements communs en seconde et en première, pour la voie générale et la voie technologique, ainsi que les programmes de la spécialité « histoire-géographie, géopolitique et science politique ». Mais quelle vision donnent-ils de ces disciplines ?
Dans l’ensemble, les programmes se recentrent, sur la chronologie et l’histoire politique en histoire, et sur l’espace français en géographie. Un retour en arrière de plusieurs décennies pour l’enseignement de ces disciplines. Les autres facettes de l’histoire (sociale, culturelle, économique…), les apports de la recherche universitaire sont minorés ou ignorés. En géographie, comment parler d’approche multiscalaire quand seules les échelles mondiales et françaises sont réellement travaillées ?
Le retour aux plans à tiroirs
L’architecture des programmes elle-même est discutable : chaque thématique prévoit systématiquement un chapitre étudiant un phénomène à l’échelle du territoire national, ce qui peut sembler répétitif à la longue. La moitié du genre humain est quasiment exclue de ces programmes : les femmes ne sont étudiées qu’à travers des personnages (Émilie du Chatelet, Georges Sand, Marie Curie...), des figures célèbres et encore pas dans tous les chapitres.
La temporalité historique se base sur la temporalité politique, ce qui entraîne des redites et des redondances. En seconde, on étudie « les grandes étapes de la formation du monde moderne » avec des périodes de grande amplitude. Dans les chapitres et les points « de passage », on retrouve trop souvent des éléments déjà vus au collège par les élèves. En première, le programme s’intéresse au XIXe siècle qui est étudié d’abord du point de vue politique, puis du point de vue social pour le début du siècle, puis du point de vue politique, et du point de vue social, pour la fin du XIXe siècle. Un vrai plan à tiroirs !
Une histoire franco-française des Puissants et une géographie sans écologie
Ces programmes prévoient des contenus trop lourds qui maintiennent une pression forte sur les enseignants et aux élèves tout au long de l’année. L’histoire enseignée est unilatérale : la révolution américaine, la création des états italiens et allemands sont étudiés... à travers l’aide de la France et l’étude du colonialisme ne se fait qu’à travers la vision du colonisateur. Plus largement, c’est l’histoire des Puissants, tout se passe à l’échelle des dirigeants et des États (par exemple, la Première guerre mondiale est traitée par le biais des batailles, les combattants ne sont pas évoqués).
Plus grave encore, les questions environnementales et écologiques subissent un recul important (un quart du programme de seconde seulement), alors qu’elles prennent aujourd’hui une place essentielle dans l’organisation et la transformation des espaces et du monde. Pourquoi ce choix?
Des éléments positifs
Côté contenus, la révolution française sera au programme de première et non plus en fin d’année en seconde, ce qui donnera plus de temps pour aborder cette période essentielle. Le programme de spécialité prévu pour la spécialité histoire-géographie-géopolitique-science politique est intéressant dans ses approches (la frontière, les régimes politiques, l’histoire de l’information), mais reste essentiellement un programme d’histoire, où la place de la géographie, de la géopolitique et de la science politique restent minorés en première par rapport à ce qu’on attendait de ce nouvel enseignement.
Les programmes prévus pour la voie technologique nous semblent mieux conçus que ceux de la voie générale : en histoire, ils intègrent des notions pour chaque chapitre, proposent des sujets d’étude au choix, et adoptent une approche moins dogmatique et plus ouverte (place plus importante pour l’histoire sociale des femmes au XIXe siècle par exemple). Cette approche mériterait d’être généralisée à la voie générale.