Article publié le jeudi 11 janvier 2024.
Avec
un retard important, le plus gros employeur de France et d’Europe vient
enfin de faire le bilan partagé de l’année 2022 en matière de santé et
sécurité de ses personnels. Les situations de souffrance individuelles
et collectives ne peuvent plus se cacher au regard de leur nombre. Le
bilan présenté est fort inquiétant, ses indicateurs sont révélateurs.
Un bilan qui ne masque plus la réalité
Au-delĂ
des documents uniques d’évaluation des risques professionnels (Duerp)
pour lesquels les mises à jour et taux de réalisation sont bien trop
insuffisants, le SE-Unsa a demandé que l’accent soit mis sur les plans
annuels de prévention. Trois autres points d’alerte sont à noter.
Tout
d’abord, les risques psychosociaux (RPS) apparaissent comme la
principale cause de saisine des registres santé et sécurité (RSST) dans
tous les métiers de l’Éducation nationale. Ces risques relèvent de
réalités différentes. Dans le premier degré, le motif d’alerte est
majoritairement la gestion des élèves à comportement perturbateur ; dans
le second degré, il s’agit davantage de conflits interpersonnels et de
violences internes.
Ensuite,
le bilan des accidents de service et des maladies professionnelles se
caractérise par une augmentation importante. Les chutes restent la cause
principale des accidents de service, ce qui en dit long sur l’absence
de prévention primaire sur des accidents aussi basiques, dont le nombre
pourrait certainement être diminué si les personnels étaient
sensibilisés et alertés du danger.
Le
nombre de maladies professionnelles déclarées et reconnues est
supérieur à celui d’avant le Covid, les troubles psychosociaux dépassant
désormais les troubles musculosquelettiques et devenant la première
cause de maladie.
Enfin,
les chiffres de la médecine de prévention informent que les nombres de
visites pour souffrance au travail et pour risques suicidaires ont
bondi. Les différents indicateurs montrent clairement que les causes
sont à rechercher dans les conditions de travail, l’organisation du
travail et dans la communication avec les familles.
Des ambitions ministérielles très en deçà des urgences
Pour
le SE-Unsa, les orientations ministérielles proposées en matière de
santé et sécurité pour l’année 2024 sont en deçà des exigences que le
ministère se doit d’avoir dans un contexte de bilan aussi dégradé.
Alors
même que personne ne peut ignorer ou contester aujourd’hui l’exposition
élevée des personnels au risque d’atteinte à l’intégrité physique et
psychologique, les préconisations ministérielles témoignent même d’un
non-respect des obligations d’un employeur en matière de protection de
ses agents
La
prévention pourtant premier levier d’amélioration des conditions de
travail d’une profession se limite dans les préconisations à un seul
triptyque : Duerp - RSST - médecine de prévention. Cette approche
individualisée et réductrice, face à la prévalence quotidienne des RPS,
est nettement insuffisante et inadaptée. Consigner a minima les RPS sans
les analyser, ni proposer de mesures conservatoires puis correctives,
relève de la maltraitance institutionnelle.
Enfin
le SE-Unsa déplore qu’il n’y ait pas de mention à la prise en charge
des personnels en situation de handicap (inclusion, suivi médical,
aménagement de poste…), ni de référence aux dispositifs de reclassement.
Les exigences du SE-Unsa
En
instance ministérielle santé, sécurité et conditions de travail, le
SE-Unsa avec sa fédération a fait adopter un avis contraignant le
ministère à mener une enquête sur les RPS. Agir sur la première cause de
souffrance au travail nécessite impérativement de distinguer les
différents facteurs qui en sont à l’origine.
Le
SE-Unsa demande aussi au ministère d’assumer, et pas seulement
afficher, une réelle volonté politique en matière de santé et de
sécurité en ne se contentant pas de conseiller à travers des
préconisations mais bien d’appliquer et faire appliquer. Tout simplement
parce que c’est la loi !