Plan ministériel de mixité sociale :
l’enseignement public impliqué, l’enseignement privé épargné
l’enseignement public impliqué, l’enseignement privé épargné
Le ministre de l’Éducation
nationale a présenté aux recteurs et inspecteurs d’académie le très
attendu plan d’amélioration de la mixité sociale en milieu scolaire. Ce
projet est la suite logique de la publication des IPS à l’automne 2022.
Les indices de positionnement social ont révélé l’ampleur de la
ségrégation sociale en milieu scolaire dans notre pays. Le ministre a
annoncé des ambitions pour l’enseignement public, mais curieusement les
établissements d’enseignement privé sous contrat ne sont pas tenus de
prendre leur part de l’effort, alors qu’ils sont les principaux
opérateurs du séparatisme scolaire en France.
Les
mesures visant à améliorer de 20 % la mixité sociale au sein de
l’enseignement public reposent sur une méthode et des outils. La méthode
est celle de la concertation des différents acteurs de l’éducation,
dans une instance qui devra donner une feuille de route pour les quatre
années à venir. Une boîte à outils sera mise à disposition pour
atteindre les objectifs fixés.
Le
CNAL est naturellement favorable à l’orientation prise par le ministre,
qui contraste nettement avec le bilan inexistant de son prédécesseur
sur ce sujet.
Cependant,
comment comprendre que les établissements d’enseignement privés ne
soient pas mis à contribution, au regard de l’argent public qui les
financent, et de leur responsabilité dans l’état de la ségrégation
scolaire en France ?
Depuis
des mois, le réseau catholique d’établissements d’enseignement privés
sous contrat brandit la menace de « guerre scolaire ». Ce vocabulaire
rappelle le temps où les évêques, au début du XXe siècle,
dĂ©nonçaient la morale enseignĂ©e dans les « Ă©coles sans Dieu ». Plus près
de nous, il fait référence à l’opposition, au début des années 1980,
entre les tenants du SPULEN (service public unifié et laïque de
l’Éducation nationale) et les défenseurs de l’école privée, prétendument
qualifiĂ©e de « libre ». Cette opposition a conduit le prĂ©sident
Mitterrand à retirer la loi Savary, ce qui entraîné la démission du
ministre de l’Éducation nationale, ainsi que celle du Premier ministre
Pierre Mauroy.
RĂ©cemment,
cette menace de « guerre scolaire » a Ă©tĂ© reprise par des Ă©lus de
droite, traditionnellement proches du réseau catholique d’enseignement
privé, comme le président du Sénat ou la secrétaire générale du parti
« les RĂ©publicains ».
Visiblement,
l’Élysée et Matignon ont été touchés par ce tir de barrage ; cela
explique pourquoi leurs arbitrages n’ont pas été rendus. Sans doute
a-t-on besoin, au sommet de l’État, de ménager ce parti dans l’espoir de
rallier ses voix à l’Assemblée et au Sénat, pour préserver la suite
d’un quinquennat si mal engagé. À présent, il est question que les
annonces concernant les établissements d’enseignement privés soient
dévoilées dans quelques semaines…
Le
CNAL l’affirme, ce qu’on appelle « guerre scolaire » est aujourd’hui en
réalité une guerre sociale visant les enfants et les familles de la
frange la plus défavorisée de la population. Cette forme de relégation
devrait mobiliser contre elle l’ensemble des pouvoirs publics,
puisqu’elle aboutit à la séparation de la jeunesse de notre pays.
Il
est naturellement à prévoir que les établissements d’enseignement privé
sous contrat ne cèderont pas facilement leur privilège de trier les
enfants. Mais, au-delà de l’égalisation des chances entre les élèves,
c’est notre avenir démocratique qui en dépend.
Paris, le 11 mai 2023
RĂ©my-Charles Sirvent
Secrétaire Général du CNAL
Contact presse : cnal@se-unsa.org