Depuis
quelques jours, le devenir du SNU fait l’actualité. Deux scénarios sont
sur la table : l’amplification du volontariat des jeunes par des
mesures incitatives, ou sa généralisation avec caractère obligatoire.
Pour
le SE-Unsa, outre le fait de priver les élèves de deux semaines de
cours, l’obligation de participer au SNU demanderait une modification de
la Constitution. Une loi serait donc nécessaire pour assurer le
caractère laïque du dispositif. L’exécutif prendra-t-il de tels risques
pour un si piètre dispositif ?
Un dispositif rejeté
Lancé
en 2019 et présenté dans le programme du candidat Macron dès 2017, le
service national universel devait être un élément décisif de la
transmission des valeurs de la République et de la citoyenneté auprès de
la jeunesse.
Aujourd’hui, le SNU
est composé d’une phase de cohésion de deux semaines ponctuées par des
saluts au drapeau et chants de la Marseillaise suivis d’activités en
plein air.
La phase 2 correspond Ă
un engagement citoyen auprès d’associations, entreprises solidaires ou
encore de services publics de 84 heures ou de 12 jours hors temps
scolaire. Cette phase peut être prolongée avec un engagement volontaire
plus long allant de 3 mois Ă 1 an.
Or,
aujourd’hui, le dispositif attire peu. Seuls 32 000 adolescents y ont
participé en 2022 sur une classe d’âge de 800 000 individus. Un grand
nombre de ces jeunes est issu de familles oĂą au moins un parent
travaille dans les milieux de la sécurité au sens large.
Moins d’enseignements pour la lubie du président ?
Interrogée
à l’Assemblée nationale par un député, la secrétaire d’état chargée de
la jeunesse et du SNU indique une préférence pour la généralisation du
dispositif. Tous les élèves de seconde ou de première année de CAP
seraient alors concernés par une participation au SNU sur temps scolaire
avec une expérimentation dès 2024 dans six départements, avant
généralisation en 2025.
Son coût est estimé a plusieurs milliards d’euros.
L’absence
de près de deux semaines de tous les élèves est, au-delà d’un facteur
de désorganisation des établissements majeur, une privation
d’enseignements pour les élèves. C’est inacceptable.
L’obligation : un parcours d’obstacles
Aujourd’hui,
l’obligation qui s’impose aux mineurs est l’obligation d’instruction.
Elle les conduit Ă ĂŞtre instruits dans des Ă©tablissements publics,
privés ou en famille. La loi du 15 mars 2004 encadre le port de signes
et tenues manifestant une appartenance religieuse dans l’enseignement
public.
La généralisation du SNU
demandera des exigences similaires, pour rendre concrète l’obligation de
participer au SNU, mais aussi pour encadrer l’expression des croyances
d’adolescents qui seront accueillis, non pas en tant qu’élèves, mais en
tant que citoyens pour lesquels la RĂ©publique garantit le libre exercice
des cultes.
L’exécutif devra
imposer la neutralité à des pans entiers de la jeunesse qui n’y ont
jamais été soumis. Cela concerne notamment les élèves scolarisés dans
des établissements privés sous-contrat et hors-contrat. Le gouvernement
va-t-il risquer un conflit avec ces parties ? Les fréquents
atermoiements du président de la République sur les questions de laïcité
et de relations aux cultes permettent d’en douter.
L’avis du SE-Unsa
Ă€
l’origine le SNU était une réponse à l’archipellisation de la jeunesse,
où plutôt des jeunesses françaises qui se croisent sans se connaître.
L’érosion de la mixité sociale nuit à la cohésion nationale, la réussite
de tous les élèves et à la laïcité.
Au
lieu de répondre à ce problème par l’éducation, le président de la
République s’entête à mettre un œuvre un dispositif reprenant l’image
d’un service national révolu, mais véhiculant toujours la nostalgie d’un
moment de brassage social efficient.
En
effet, les apports du service national d’autrefois étaient très limités
en termes d’acquisition des valeurs de la République et de la
citoyenneté. Qu’importe ! Le message politique tend à montrer à la
frange de la population française la plus méfiante à l’égard de la
jeunesse, qu’on l’encadre, qu’on l’aère et qu’on uniformise.
RĂ©unir
les enfants et adolescents de notre pays est une nécessité pour assurer
la continuité de notre avenir démocratique. Cela demande de créer les
conditions de la mixité sociale pendant les treize années de scolarité
obligatoire. Ce faisant, l’exécutif rendrait un meilleur service à la
Nation, plutĂ´t que de vouloir imposer un SNU de quinze jours Ă des
jeunes de 16 ans qui ne le voudraient pas, et qui en outre, se verraient
privés de précieux temps d’enseignement.