Retour à l'article normal

SE-UNSA 976


 Par SE-UNSA 976

Interview par le Café Pédagogique de Laurent Escure : Le réformisme combatif a marqué des points

 

Du 29 au 31 mars, la fédération Unsa Education tient congrès à Grenoble. Quatre ans après le congrès d'Angers qui avait eu lieu avant l'alternance politique, l'Unsa fait le point dans une situation bien différente. La seconde fédération de l'Education nationale est proche du pouvoir mais les perspectives semblent bouchées. Quel bilan l'Unsa fait-il de ses engagements depuis 2012 ? Quelles nouvelles étapes espère-t-il pour la refondation ? Comment l'Unsa éducation anticipe-t-il 2017 ?

 

 Elu secrétaire général de la fédération Unsa Education à Angers, Laurent Escure rayonne à l'ouverture du congrès de son organisation. Il devrait garder son poste. Surtout sa fédération met en avant un bilan flatteur. "On a eu 4 années de suite une progression de la syndicalisation et on a connu des progrès aux élections. On est encouragé par ces résultats", nous dit-il. Globalement aux élections de 2014 l'Unsa avait progressé de 1%, avec une stabilité chez les enseignants et une hausse sensible chez les inspecteurs.

 

La fédération marque son dynamisme avec la publication durant le congrès d'un livre qui veut lancer une réflexion sur "le basculement du monde".  Sous le titre "Oxygène. Manifeste pour une société solidaire et éducative", l'ouvrage veut aider à intégrer la révolution numérique, le changement climatique dans les analyses syndicales. Des plumes célèbres apportent leur écot : M Serre, E Morin etc. Des ateliers Oxygène sont prévus durant le congrès.

 

Mais dans l'immédiat, voyons ce que L Escure peut dire de la situation actuelle de l'Ecole.

 

Le front des anti réforme du collège s'est fracturé. Comment analysez vous cette évolution ?

 

Quand on cherche à marier la carpe et le lapin ça se voit... Tous les mouvements anti réforme ont été minoritaires. Cette réforme a créé des doutes. Mais majoritairement ce n'est pas une révolution pour les collègues.

 

L'Unsa s'est engagé en faveur de la réforme du collège. Nous avons fait le choix du réformisme combattif. On n'a pas a rougir que ce soit dans le domaine éducatif avec le collège ou sur le plan revendicatif avec les accords Peillon et les acquis que l'on a obtenus. On développe de la fierté ne serait ce que pour éviter le climat de sinistrose dans lequel on est. On voudrait montrer que le syndicalisme peut être utile à partir du moment où on ne ment pas aux gens en promettant des choses inatteignables. On montre des objectifs atteignables et on les atteint. Et ça redonne confiance à l'engagement dans un syndicat.

 

Des objectifs ont été atteints ?

 

On a lancé la refondation sur le terrain scolaire. On s'est battu pour que ça fonctionne même si ça ne s'est pas fait sans mal. On a pensé qu'il fallait s'y engager et ne pas être que spectateurs. Pour les personnels, on s'était quitté il y a 4 ans avec l'idée qu'avec des marges de manoeuvre  pas très larges il fallait fixer des priorités. On a retenu les plus faible salaires (catégories C et B ) et l'équité pour des personnels exerçant les mêmes fonctions mais n'ayant pas le même salaire. Ca s'est traduit par l'ISAE. Pour les catégories B et C on a obtenu des reclassements avec le protocole Peillon et des reconstructions de grilles. On met le protocole PPCR au crédit de cette stratégie. On s'en tient à cette logique : quand il y a du grain à moudre on négocie pour la répartition la plus juste. Quand on est face çà un pouvoir qui veut faire des régressions on est là pour défendre les collègues.

 

Vous avez le sentiment d'avoir lancé la refondation ?

 

Oui. On avait travaillé avant la présidentielle pour cela. Et quand le gouvernement l'a proposé on était partenaire de la négociation pour la construire. J'avais appelé il y a 4 ans au congrès d'Angers la constitution d'un bloc majoritaire pour la transformation de l'école. On voit qu'il existe et qu'il est majoritaire. On avait fait ce travail pour que la refondation existe et pour améliorer els projets gouvernementaux. On ne s'en attribue pas le mérite. Mais on s'est battu pour l'améliorer et la défendre.

 

La priorité au primaire, la reconstruction de la formation des enseignants, les postes budgétaires ciblés, les taux d'encadrement, la loi de refondation, le cycle commun école collège et la réforme du collège apportent un nouveau souffle. On verra si cela produira des fruits notamment pour la démocratisation.

 

Là où la refondation n'a pas commencé c'est le hors scolaire et la liaison lycée enseignement supérieur. C'est le prochain chantier, la continuité lycée post bac.

 

Les effets de la refondation sont-ils perçus comme positifs sur le terrain ?

 

Ca se met en place progressivement. On se bat pour que l'administration pédagogique aide les équipes à la mise en oeuvre.  Et puis il y a des fantasmes. On le voit avec les EPI. Certains sont en train de les construire. Il seront convaincus quand ils les mettront en oeuvre. Il ya eu de bonnes idées pas toujours bien accompagnées et pour lesquelles il faut du temps. La réforme de la maternelle a été saluée par tous. Même sur le collège le Snuipp n'a pas la même position que le Snes...

 

La prochaine étape serait donc la réforme du lycée. Quel bilan faites vous de la réforme Chatel ?

 

On est en analyse. On sait que ça a été sans doute un mieux. Mais on s'est arrêté au milieu du gué et on n'a pas travaillé sur la liaison lycée post bac. On va lancer la réflexion de regarder si on ne peut pas fabriquer à ce niveau des parcours modulaires où les jeunes pourraient construire un parcours par étape. La réforme Chatel a manqué d'aller plus loin aussi dans le rééquilibrage des filières du lycée. Encore aujourd'hui la série S est une filière non pas scientifique mais d'excellence. C'est cela qu'on veut changer. Il faudra bien rééquilibrer et revaloriser la voie professionnelle.

 

Il y a une catégorie où vous êtes dominant c'est les cadres , inspecteurs et personnels de direction. Comment voyez vous leur avenir ? Il faut aller vers la fusion de ces corps ?

 

C'est en débat entre eux. On n'a pas de position unanime.  Ce qui est admis c'est qu'il faut faciliter le passage d'une fonction ou d'un corps de l'un à l'autre. On va continuer à en débattre.

 

Un autre secteur dominant c'est el médical

 

Là on a un problème de recrutement pour els médecins. La rémunération est trop faible. J'ai interpellé la ministre là dessus. Les assistantes sociales sont aussi en difficulté. On leur demande d'aller dans le primaire et c'est une bonne idée. Mais il n'y a pas les postes qui  permettraient ce redéploiement. Dans ce secteur on a des choses à dire qui ne sont pas agréables à la ministre. Les signes de considération ne suffisent pas.

 

Comment voyez vous l'après 2017 ? Une redistribution du secteur éducatif ?

 

On va lancer une réflexion là dessus. Certains se lancent dans la campagne avant la campagne. Nous la compagne nous intéressera quand les candidats seront connus. Notre travail commencera avec la campagne. On va tout faire pour que le premier parti de France, le FN, ne prenne pas le pouvoir. Pour le terrain éducatif on dit : "attention à ne pas défaire ce qui a été fait". On va plaider pour un consensus sur l'Ecole et qu'on ne touche pas au socle commun du aux jeunes générations. On veut faire comprendre aux politiques l'intéret de ce pacte. Sinon on aura du souci à se faire pour l'Ecole.

 

Aujourd'hui l'Ecole semble en panne avec la montée des inégalités. Il faut garder le système come il est ?

 

Justement non. C'est pour cela qu'on a soutenu la refondation. Ses premières pierres ne porteront leurs fruits que dans quelques années. Si on ne fait rien les classes populaires et moyennes se détourneront de cette école.

 

Propos recueillis par François Jarraud