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SE-UNSA 31


 Par SE031
 Le  dimanche 19 novembre 2023

Collège - Les groupes de niveaux ne réhaussent pas le niveau !

 

Dans le cadre de la “Mission Exigences des Savoirs”, le ministre G.Attal a évoqué l’idée de faire des groupes de niveaux au collège et de le rendre ainsi “modulaire”.
Pourtant, même si c’est contre-intuitif, la recherche montre que cette mesure irait à l’encontre de l’objectif recherché d’améliorer l’efficacité de notre école en élevant le niveau général des élèves.


- En effet, la synthèse du CNESCO sur la différenciation pédagogique (2017) étudie les mécanismes de différenciation structurelle, tels que le redoublement, les classes de niveau, les filières, et explore les résultats de recherches sur leurs effets. Elle souligne que le redoublement, bien que parfois observé comme une amélioration à court terme, se révèle inefficace et préjudiciable à long terme, accentuant les inégalités socio-affectives. De même, le regroupement des élèves par aptitude en classes de niveau ne montre pas d’effet spécifique sur la qualité des apprentissages, mais creuse les inégalités entre les classes.

Les recherches suggèrent que les systèmes éducatifs les plus différenciés présentent des performances légèrement moins bonnes, des écarts plus marqués entre élèves forts et faibles, et accroissent les inégalités sociales.
La synthèse conclut en mettant en avant l’importance de la diffusion des connaissances scientifiques sur ces résultats, soulignant que le passage d’une logique de différenciation à une logique d’intégration nécessite des convictions et des valeurs politiques fortes.

Si des moments ponctuels en groupes spécifiques selon les besoins des élèves (et non leur niveau) peuvent avoir leur utilité, l’hétérogénéité des niveaux mais aussi des milieux socio-culturels, des âges, des sexes… répond non seulement aux valeurs portées par l’École républicaine mais aussi à “l’Exigence des Savoirs”. Une typologie des groupes de travail comme celle-ci peut aider à repérer quand, comment et pourquoi mettre les élèves en groupe.

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Voici les principaux arguments en faveur des classes hétérogènes, appuyés sur la recherche : 

- Diversité des compétences 
Des études telles que celle menée par Cohen et Lotan (2014) ont démontré que la diversité des compétences dans une classe favorise un apprentissage plus riche et une compréhension approfondie des concepts, tout en préparant les élèves à travailler efficacement dans des environnements divers.

- Inclusion sociale
Les recherches de Salend et Duhaney (1999) mettent en évidence que les classes hétérogènes contribuent à réduire les barrières sociales et à favoriser un environnement inclusif où chaque élève se sent accepté, renforçant ainsi l’estime de soi et la confiance.

- Adaptabilité aux différents styles d’apprentissage
Les travaux de Tomlinson et Allan (2000) ont montré que la différenciation pédagogique dans des classes hétérogènes permet une adaptation plus efficace aux différents styles d’apprentissage, maximisant ainsi l’engagement des élèves et leur réussite académique.

- Préparation à la diversité du monde réel
Les études de Banks et Banks (1995) soulignent que les classes hétérogènes préparent les élèves à vivre dans une société diversifiée, en favorisant la compréhension interculturelle et en développant des compétences cruciales pour la collaboration dans un monde globalisé.

- Développement de l’empathie
Les recherches de Hoffman (2000) suggèrent que les enfants évoluant dans des environnements hétérogènes développent une empathie plus prononcée envers leurs pairs, favorisant ainsi un climat de classe plus harmonieux et bienveillant.

- Motivation intrinsèque
Les travaux de Deci et Ryan (1985) ont montré que les environnements qui valorisent la diversité des compétences individuelles renforcent la motivation intrinsèque des élèves, les encourageant à s’investir davantage dans leurs apprentissages.

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Le travail de Marie Duru-Bellat et Alain Mingat montrait déjà en 1997 que regrouper les collégiens par niveau est une pratique contre-productive, leur article s’intitule d’ailleurs : “La constitution de classes de niveau dans les collèges : les effets pervers d’une pratique à visée égalisatrice”.

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L’Unsa-Éducation invite le ministre à se rapprocher de son Conseil Scientifique pour être informé de l’état de la recherche sur ces questions, à en diffuser les résultats auprès du grand public et à en tenir compte pour mener une politique éducative, réellement exigeante !