2h hebdomadaires supplémentaires d’activité physique et sportive pour les collégiens : un dispositif qui rate sa cible
Article publié le mardi 13 février 2024.
L’Institut
national de la jeunesse et de l’éducation populaire (Injep) a publié,
en janvier 2024, une évaluation de la première année de déploiement du
dispositif* initié à grand renfort de publicité par le MENJSJOP. Les
résultats confirment nos réserves.
Évaluation des 2HSC : une enquête à deux niveaux
Mise en œuvre en septembre 2022 dans 167 collèges répartis sur l’ensemble du territoire, le dispositif 2h hebdomadaires supplémentaires d’activité physique et sportive pour les collégiens (2HSC)
a été étendu à 700 établissements à la rentrée 2023. Rappelons que ce
dispositif est principalement destiné aux élèves les moins enclins à la
pratique sportive et a pour objectifs de lutter contre l’inactivité des
jeunes, de prévenir le décrochage scolaire et de promouvoir le bien-être
physique. Le principe consiste à libérer deux heures dans l’emploi du
temps des élèves afin de leur permettre de pratiquer une activité
physique soit dans les infrastructures du collège, soit en club.
L’animation est assurée par des enseignants d’EPS volontaires ou des
animateurs sportifs.
Chargée
d’étude et d’évaluation à l’Injep, Sonia Louhab s’est livrée à une
enquête visant à dresser un bilan de la première année des 2HSC. Elle a
procédé selon une méthodologie mixte : une enquête statistique
quantitative sous la forme d’un questionnaire adressé à tous les
collégiens volontaires ayant participé au dispositif, et une enquête de
terrain qualitative dans trois collèges, sous la forme d’entretiens
individuels et collectifs.
Conclusions de l’enquête : un dispositif qui attire essentiellement les élèves sportifs
Les
résultats indiquent que la majorité des élèves inscrits ont adhéré au
dispositif afin de pratiquer davantage de sport et de découvrir de
nouvelles activités. 9 volontaires sur 10 sont déjà impliqués dans des
activités sportives en dehors de l’EPS. Pour ces élèves sportifs, le
taux d’abandon a été très faible et la plupart d’entre eux souhaitaient
continuer l’année suivante. 57 % des participants sont des garçons,
majoritairement scolarisés en 6e et en 5e. Un
tiers des élèves non-sportifs ont abandonné le dispositif en cours
d’année, ne se retrouvant pas dans l’offre traditionnelle proposée et
vivant mal la présence d’élèves sportifs. Sans surprise, l’enquête
révèle que les élèves issus des milieux sociaux moins favorisés ont
tendance à pratiquer moins d’activités physiques.
Les
enseignants d’EPS interrogés regrettent l’absence de temps dédié à la
co-construction des objectifs éducatifs des activités et déplorent le
manque d’enseignants d’EPS volontaires pour coordonner, faire vivre et
suivre l’implémentation du dispositif. Ils auraient enfin souhaité des
temps de bilan plus fréquents avec les opérateurs du dispositif mais
aussi avec les collégiens volontaires.
L’avis du SE-Unsa
Le
SE-Unsa s’était montré sceptique dès l’annonce d’un dispositif basé sur
le volontariat, déconnecté du projet d’établissement et qui délègue les
compétences des enseignants d’EPS aux animateurs sportifs. Les
conclusions du rapport ne font que nous donner raison. Le temps
nécessaire à la concertation, à la construction du lien entre les
domaines éducatif et sportif et aux bilans n’est pas accordé. Surtout,
les 2HSC attirent peu les élèves non-sportifs et les filles, cibles
privilégiées du dispositif, qui devrait également encourager davantage
de mixitĂ© sociale. Bien que porteuses de prĂ©conisations visant Ă
accompagner le déploiement du dispositif (ciblage des niveaux 6e et 5e,
prioritĂ© aux « jeux sportifs » plutĂ´t qu’aux disciplines sportives
strictes, mise en place de critères adaptés pour garantir une prise en
charge adaptée à chaque élève…), les conclusions de l’enquête, publiées
seulement en janvier 2024, ne peuvent avoir été prises en compte pour la
rentrée 2023.
La conclusion du SE-Unsa, quant Ă
elle, ne change pas : plutôt qu’un dispositif qui ne tient pas toutes
ses promesses, le ministère devrait investir ses moyens dans la
promotion de l’EPS et le développement du sport scolaire, garants d’une
offre qualitative et surtout éducative, s’adressant à tous les élèves et
dispensée par les professionnels que sont les enseignants d’EPS.