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La
principale information relative Ă cette « nouvelle rĂ©forme » rĂ©side
dans l’engagement du prĂ©sident Macron, lors de sa campagne Ă©lectorale Ă «
faire du lycée professionnel une voie d’excellence avec la méthode qui a
rĂ©ussi sur l’apprentissage ». « Les pĂ©riodes passĂ©es en stage en
entreprise augmenteront de 50 % et les jeunes seront rĂ©munĂ©rĂ©s », a
promis le président candidat.
Pour l’ensemble des syndicats de l’UNSA Éducation concernés par la voie professionnelle,
cette annonce apparaît comme problématique car elle propose une
modalité pédagogique, le stage en entreprise (PFMP) gratifié, pour
l’ériger de fait, sans concertation, de manière idéologique, en solution
à une problématique : le décrochage scolaire et le constat de plus de
100.000 jeunes sans diplĂ´me et sans emploi au sortir de leur formation
initiale alors qu’il y a en parallèle un besoin immédiat de recrutement
dans les secteurs en tension.
D’une part, le phénomène très
large des jeunes sans diplĂ´me et sans emploi ne saurait ĂŞtre la seule
responsabilité de la voie professionnelle scolaire puisque celle-ci
s’attache à donner une formation initiale complète
(savoirs généraux, savoir-être, enseignement théorique professionnel,
immersion en entreprise) et diplômante à des élèves n’ayant pas encore
18 ans, leur offrant de nombreux débouchés. Elle leur permet ainsi
d’aller directement à l’emploi ou d’engager une poursuite d’études
supérieures avec des taux d’insertion dans l’emploi allant jusqu’à deux
tiers d’une même cohorte deux ans après le diplôme. Après quelques
années de vie active, cette voie leur permet de se réorienter et de
développer de nouvelles compétences grâce aux acquis du lycée, ce qui
n’est certainement pas synonyme d’échec en matière d’accomplissement
personnel et professionnel.
Ces résultats sont certainement
l’effet de son caractère fortement professionnalisant. Suite à la
rĂ©forme de la TVP, plus de 60 % de l’emploi du temps sont consacrĂ©s Ă
l’enseignement professionnel et à l’alternance en entreprise. Si l’on
interroge les équipes pédagogiques sur l’efficacité de cette nouvelle
architecture de la TVP, elles sont quasiment unanimes à témoigner qu’on
peut faire mieux ; mais que ce n’est pas le « moins » ou le « plus » d’entreprise qui permettrait ce gain.
Elles pointent plutôt la nécessité d’un accompagnement renforcé tout au
long du parcours du jeune pour aider à l’orientation, accompagner les
ruptures de parcours et améliorer l’insertion ainsi qu’un partenariat
plus appuyé et systématisé entre établissements et entreprises dans un esprit de responsabilité partagée.
D’ailleurs, les résultats les plus faibles en termes d’insertion des
jeunes issue de la voie professionnelle scolaire montrent qu’ils sont
trop souvent le fait d’un manque de moyens pérennes pour assurer un accompagnement continu et favoriser des partenariats de qualité avec les entreprises.
Cet
élément est d’autant plus criant lorsqu’il s’agit des publics les plus
fragiles et en grande difficulté de mobilité (faible indice de position
sociale, territoires enclavés), pénalisés par leurs conditions de vie
pour construire et mener Ă bien un projet professionnel en autonomie. La question de « plus d’entreprise » ne rĂ©pond donc pas Ă leur besoin immĂ©diat
et il n’est pas sûr que les petites et moyennes entreprises – les plus
nombreuses dans notre pays – soient en capacité d’accueillir un nombre
plus important de ces jeunes qui ont besoin d’un appui plus solide,
besoin pour lequel ces TPE-PME-PMI ne sont ni structurées ni
programmées.
L’autre grand trait marquant de l’annonce
présidentielle est l’aspiration du système actuel de la voie
professionnelle scolaire par l’apprentissage. En témoigne cette promesse
de gratification dont nous ne savons rien de très précis pour
l’instant. Pour les syndicats de l’UNSA Éducation, l’apprentissage est une autre voie de formation, non concurrente mais complémentaire
en termes d’offre. Les établissements publics de la voie
professionnelle la connaissent bien car ils accueillent, à côté de la
voie scolaire, nombre d’apprentis dans leurs formations. Cette voie est
très exigeante et sélective du fait d’un double emploi du temps pour le
jeune, académique et salarié d’entreprise, ajouté au fait que ce sont
les entreprises qui recrutent les apprentis sur la base de leur
motivation professionnelle, de leur profil et de leur capital social.
Ces exigences sont difficiles Ă tenir, ce qui explique en partie le
phénomène des ruptures de contrat, phénomène de l’apprentissage à notre
avis trop souvent passé sous silence au profit de l’affichage du seul
décrochage, très contestable, qu’on impute injustement à la voie
professionnelle scolaire.
En plus de proposer aussi des
formations en apprentissage de qualité, les lycées de la voie
professionnelle scolaire représentent alors un filet de sécurité pour
nombre d’apprentis décrocheurs qui peuvent ainsi revenir dans un système
classique où ils pourront travailler sur les compétences leur faisant
défaut et repartir forts d’une motivation et d’une confiance retrouvées.
On le voit bien ;
la voie professionnelle sous statut scolaire n’est pas l’unique
responsable des difficultés d’insertion comme certains souhaiteraient
qu’on la voie. Il est temps que les élèves et leurs familles en
prennent conscience. L’augmentation de la PFMP brandie comme une
solution miracle à un problème mal diagnostiqué
pourrait s’avérer contre-productif sur un plan éducatif et désastreux
pour les jeunes alors que notre système républicain et égalitaire est
censé les aider et les faire grandir. Il est impérieux d’évacuer au plus
vite les raccourcis imaginaires et de s’intéresser de près à l’existant
pour l’améliorer. De nombreuses marges de progrès sont possibles, nous
l’avons déjà suggéré : articulation des temps de formation, tutorat
scolaire, aide à la mobilité, accueil et accompagnement en entreprise
etc… Nous en sommes persuadés, seule l’optimisation de ces facteurs
permettront à la voie professionnelle scolaire de mieux insérer encore
et de gagner in fine en reconnaissance. Quant Ă la relation
lycée-entreprise, si plus d’entreprise n’est pas donc LA solution,
développer une meilleure synergie entre ces deux acteurs essentiels
permettra une réelle co-formation.