Le
ministre a annoncé le 21 janvier ses décisions sur la session 2021 du
bac général et technologique. Sous la pression de la crise sanitaire et
des demandes des représentants de la communauté éducative, il a
finalement renoncé aux épreuves de spécialité prévues à la mi-mars.
Plutôt que de les reporter en fin d’année, il fait le choix du contrôle
continu. Il maintient (pour l’instant) les épreuves terminales en
apportant quelques adaptations.
Retour sur ces annonces et sur leurs conséquences.
C’est
aux alentours de 21 heures jeudi soir que les premiers mails sont
arrivés sur les boîtes académiques des enseignants en lycée. Pour une
fois, le ministre a pensé à s’adresser à eux avant de s’adresser aux
médias. Dommage cependant qu’il ait oublié une fois encore les
professeurs-documentalistes et les CPE, comme si ces derniers n’étaient
pas concernés par l’organisation des examens !
Pas d’épreuves de spécialité en mars
L’annonce
principale, celle qui était attendue de toute la communauté éducative,
c’est le renoncement aux épreuves de spécialité en mars. C’est désormais
acté, enfin ! Car la pression était très forte, en particulier depuis
la rentrée de janvier avec des appels appuyés à un retour des terminales
à 100 % malgré la crise sanitaire et la circulaire du 15 janvier
promouvant des stages de préparation aux épreuves pendant les vacances
d’hiver ! Dans tous les enseignements, le constat était le même :
impossible de boucler le programme (mĂŞme limitatif) dans des conditions
pédagogiquement acceptables pour la mi-mars.
Quant
à nos collègues CPE, ils se demandaient bien comment ils allaient
pouvoir, en pratique, organiser les épreuves tout en accueillant les
élèves des autres niveaux comme cela était préconisé par la Direction
générale de l’enseignement scolaire (Dgesco).
Le choix du contrĂ´le continu
Mais le soulagement est de courte durée… Car le ministre n’a pas fait le choix du report en juin mais celui du contrôle continu.
Ce choix, c’est celui de la sécurisation. En effet, c’est le seul qui
tient quelles que soient les circonstances sanitaires. C’est aussi la
garantie que les évaluations porteront bien sur ce qui a été travaillé,
ce qu’un sujet national, même avec des exercices au choix, ne permet
pas.
Mais ce choix, c’est aussi celui d’une lourde responsabilité confiée
aux enseignants : assurer une évaluation pertinente et équitable dans le
cadre d’un nouvel enseignement et donc sans aucun repère partagé.
Dans son courrier,
le ministre annonce « un cadre robuste et prĂ©cis » avec un guide de
l’évaluation conçu par l’Inspection générale. Ce guide arrivera bien
tard, voire trop tard : fin janvier, on a pratiquement bouclé les notes
du deuxième trimestre.
Quant Ă
l’incitation Ă tenir des Ă©preuves « maison » calquĂ©es sur celles qu’il
vient de supprimer, elle paraît pour le moins surprenante.
S’il
s’agit, comme le ministre l’affirme, de gagner du temps pour les
apprentissages (ce que nous souhaitons tous), ce n’est pas le moment de
promouvoir des modalités d’évaluation chronophages.
Les demandes du SE-Unsa
Dès
la réunion du Comité de suivi de la réforme du mois de mai 2020 et en
anticipation d’un rebond de la pandémie pour cette année scolaire, au
SE-Unsa, nous avions milité pour que le travail sur le contrôle continu
soit une priorité à tous les niveaux de l’institution (établissements,
inspections, formation continue…).
Nous
avons proposé un travail collectif dans les lycées, par équipes
disciplinaires, en conseil pédagogique, accompagné par les corps
d’inspection débouchant sur un protocole d’évaluation certificative
partagé. Pour mener ce travail à bien, nous avons demandé du temps
libéré. Nous n’avons pas été entendus. Pas d’impulsion forte de notre
hiĂ©rarchie, sans doute muselĂ©e par la dĂ©termination du ministre Ă
maintenir les épreuves de mars. Maintenant, il va falloir travailler
dans l’urgence et sous forte contrainte à une harmonisation qui aurait
pu et dû être largement anticipée et accompagnée.
Les épreuves terminales maintenues
Ă€
ce stade, le ministre annonce le maintien des épreuves terminales et de
leur calendrier. Il annonce toutefois des adaptations bienvenues :
- En philosophie, trois sujets de dissertation qui porteront sur des notions distinctes
- Pour l’oral de français, 14 textes
(dont au moins 3 extraits des œuvres intégrales au programme par objet
d’étude) en voie générale et 7 textes en voie technologique (dont au
moins 3 textes issus de l’objet d’étude littérature des idées et au moins un par autre objet d’étude).
Le Grand oral, nouvelle épreuve que le
ministre considère comme emblĂ©matique de sa rĂ©forme, est maintenu Ă
l’identique. Nous en avons critiqué sa définition qui en fait une
« performance », plutĂ´t que l’aboutissement d’un projet inscrit dans la
durée. Nous nous sommes également inquiétés du retard pris dans la
formation des enseignants. Des ressources viennent d’être publiées. On
apprécie la focale portée sur la pédagogie active et la construction des
compétences tout au long du cycle, mais ces aspects relèvent encore
de vœux pieux. Pour l’heure, les professeurs ont besoin de formations
adaptées et d’un horizon clair et dégagé, ce que facilitera peut-être
l’annulation des épreuves nationales de mars.
Malgré ces aménagements et ces ressources, les inquiétudes subsistent
sur le Grand oral, sa préparation et les inégalités qu’il peut
engendrer chez les élèves.