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Sortir de l’emprise du concours
Article publié le mercredi 4 octobre 2017.
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Ă€ propos d’Annabelle Allouch, La SociĂ©tĂ© du concours. L’empire des classements scolaires, Paris, Seuil, « La RĂ©publique des idĂ©es Â», 2017.

 

                              

Les concours sont partout, pour devenir enseignant et fonctionnaire, pour ĂŞtre sacrĂ© meilleur pâtissier Ă  la tĂ©lĂ©vision ou pour accĂ©der aux grandes Ă©coles. Cela n’entraĂ®ne pas de dĂ©bats, pas de contestations, tant il semble normal que les capacitĂ©s individuelles soient mesurĂ©es par ce biais. C’est donc le grand mĂ©rite de ce livre que d’interroger ce qui a priori ne posait pas de problème. Une fois cette lecture terminĂ©e, on se dit que oui finalement, il est plus qu’urgent de questionner cette course aux concours, sacralisĂ©e dans toute la sociĂ©tĂ© française, sur cette compĂ©tition de plus en plus criante dans l’ensemble du système scolaire. Le concours comme un moyen mĂ©ritocratique et Ă©galitaire, est-ce encore vrai aujourd’hui ?

Concours = mĂ©rite ?

L’auteure, maĂ®tresse de confĂ©rences en sociologie, dĂ©veloppe sa pensĂ©e en de courts et incisifs chapitres qui entraĂ®nent l’adhĂ©sion grandissante du lecteur. « Le concours s’est imposĂ© comme l’un des principaux modes de reconnaissance du mĂ©rite des individus Â» et dĂ©termine la suite du parcours professionnel, au dĂ©triment de la formation sur le long court ou des diplĂ´mes. Avoir rĂ©ussi un concours est supposĂ© ĂŞtre le rĂ©sultat d’une mesure juste des capacitĂ©s de celles et ceux qui ont Ă©tĂ© aptes Ă  passer avec succès l’épreuve. Mais Annabelle Allouch dĂ©montre avec intelligence et sagacitĂ© qu’il n’en est rien.

Le livre prend ainsi le contrepied de nombreuses idĂ©es reçues et oblige Ă  rĂ©flĂ©chir sur la place du concours dans notre système scolaire, et plus largement dans notre sociĂ©tĂ©. Le concours participe Ă  l’acte de sĂ©lectionner, avec des gestes, des attitudes et des techniques communes. Conçu Ă  partir du XIXe siècle comme un outil dĂ©mocratique et juste pour accĂ©der Ă  des fonctions, le concours a dĂ» s’adapter Ă  la dĂ©mocratisation scolaire, et il est devenu de plus en plus un instrument de sĂ©lection inĂ©galitaire qui peine Ă  dire son nom. L’auteur montre que « familles et acteurs du secteur valorisent la sĂ©lection comme gage de rĂ©ussite, au dĂ©triment, des filières ouvertes, en particulier Ă  l’universitĂ©, par ailleurs ignorĂ©e des Ă©lites politiques Â». De plus, la rĂ©ussite Ă  un concours dĂ©termine souvent la suite du parcours, et la rĂ©ussite professionnelle.

Une remise en cause de la société du concours

La culture scolaire très hiĂ©rarchisante, avec les notes, et l’idĂ©e de mĂ©ritocratie, souvent dĂ©voyĂ©e de son origine mĂŞme, accĂ©lèrent cette folie des concours. L’auteure rappelle que l’origine sociale surdĂ©termine aujourd’hui la rĂ©ussite aux concours, comme les travaux de Pierre Bourdieu ou Jean-Claude Passeront l’avaient dĂ©jĂ  montrĂ©. Des parcours de jeunes passant des concours sont racontĂ©s et  illustrent les attendus et les impensĂ©s de cette course aux concours. Mais les concours s’adaptent aussi, valorisant par exemple de plus en plus les Ă©preuves orales au dĂ©triment des exercices acadĂ©miques Ă©crits, qui peinent Ă  partager des candidats plus nombreux et ayant le mĂŞme profil. On cherche ainsi Ă  valoriser l’individu, Ă  trouver les meilleurs candidats « authentiques Â» et pourvus d’une personnalitĂ© qui les distingue du lot. Mais se faisant, on crĂ©Ă© de nouveaux standards de rĂ©ussite. Annabelle Allouch le souligne : "on dĂ©valorise de facto les compĂ©tences acquises sur la base d’une formation de longue haleine au profit du savoir-faire de «  bĂŞtes Ă  concours Â»".

Cet excellent essai se termine par quelques propositions pour se libĂ©rer de l’emprise du concours sur l’école et notre sociĂ©tĂ©. Sont aussi abordĂ©s des questions d’une brĂ»lante actualitĂ©, comme la sĂ©lection Ă  l’universitĂ©, les inĂ©galitĂ©s dans la rĂ©ussite scolaire et universitaire et on ne peut que souscrire  Ă  cette affirmation que l’on trouve dans  ce livre : « se dĂ©gager de l’émulation par le concours relève d’une philosophie de vie Â».

Nous militons au SE-Unsa pour un parcours Bac-3/Bac+3 mieux adaptĂ© et plus Ă©galitaire. Nous souhaitons Ă©galement redonner tout son sens Ă  l’école comme « philosophie de vie Â» oĂą la compĂ©tition et la sĂ©lection ne soient pas les seuls buts. Le livre  d’Annabelle Allouch apporte du grain Ă  moudre Ă  notre rĂ©flexion. C’est pourquoi nous en conseillons vivement la lecture. Le dĂ©bat ne fait que commencer…

 
 
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