Le ministre l'a annoncé sur RTL le 10 mai, il y aura une heure trente de mathématiques dans l'enseignement scientifique en classe de première à la rentrée 2022. Cette annonce médiatique, à une semaine de la remontée des choix de spécialités des élèves de seconde, remet en cause tous les travaux préparatoires à la rentrée sans aucun respect ni des usagers ni des personnels. Une réponse politicienne élaborée dans l'urgence à une polémique médiatique en faisant fi des contraintes de mise en oeuvre, un condensé de la méthode Blanquer sur ce dossier.
Un retour précipité
Toutes les organisations syndicales et les associations disciplinaires militaient pour une prise de recul et une réflexion plus globale sur la place des mathématiques dans la voie générale (tronc commun, enseignements de spécialité et options) débouchant sur des décisions à mettre en oeuvre à la rentrée 2023. Pourtant, le ministre, sous la pression de l'annonce du président Macron alors candidat en campagne, a décidé de retenir des propositions du comité d'experts, l'introduction d'une heure trente de mathématiques dans le tronc commun dès 2022 pour les élèves n'ayant pas choisi l'enseignement de spécialité maths. Mesure précipitée dont, en plus, l'annonce officielle a été différée de plus d'un mois pour cause de période électorale et d'attente prolongée d'un nouveau gouvernement! Le « maître des horloges » n'en a clairement rien à faire de l'organisation de la rentrée 2022 dans les lycées...
Quelle place dans le tronc commun ?
Le retour des mathématiques dans le tronc commun a l'avantage d'être une mesure égalitaire, notamment parce que les filles et les élèves issus des milieux populaires prenaient moins la spécialité maths, à condition évidemment que cette modification soit bien étendue à tous les lycéens dès la rentrée 2023. Sinon, des classes de spé maths et des classes maths de tronc commun se constitueront très vite.
Il est néanmoins difficile de percevoir l'impact de l'alourdissement du volume horaire pour les élèves : cela va-t-il les dissuader de choisir des options facultatives en plus de leurs enseignements obligatoires ? Cela risque-t-il de détourner certains élèves de la spécialité maths dont ils pourraient pourtant avoir besoin dans leur parcours ?
Des conditions de travail dégradées
Les contraintes d'organisation de l'enseignement scientifique qui sert trop souvent de variable d'ajustement des services seront encore augmentées avec l'ajout d'une troisième discipline.
Quant aux collègues de mathématiques qui ont connu des mesures de carte scolaire l'an dernier, ils vont sans doute peu apprécier de voir leurs collègues contraints de faire des heures supplémentaires en nombre pour assurer cet enseignement puisqu'il est trop tard pour injecter des moyens pérennes en heures postes à hauteur des besoins.
Et l'annonce du nombre d'admissibles au Capes de maths (816 pour 1035 postes) ne rassurera personne sur la capacité d'assurer dans des conditions acceptables l'enseignement des maths au lycée l'an prochain.
Enfin, l'introduction tardive de cet enseignement se fera sans aucune formation pour les collègues qui devront s'approprier les nouveaux contenus pendant les vacances d'été et sans moyens supplémentaires.
L'avis du SE-Unsa
Le SE-Unsa rappelle ses attentes sur ce dossier :
• La prorogation du comité de suivi de la réforme pour travailler collectivement à des réponses solides et
praticables pour la rentrée 2023, en faisant entendre la voix des personnels,
• Une réflexion sur l'ensemble des programmes de mathématiques au lycée, celui de la classe de seconde, celui de l'enseignement de spécialité, mais aussi celui de la voie technologique dont l'indifférenciation selon les séries crée des difficultés importantes,
• L'ouverture de l'option maths complémentaires à tous les élèves de terminale,
• Le financement des options maths complémentaires et maths expertes fléché dans la DGH.