Manque de profs, manque d’AESH, manque de remplaçants … De quoi ne manque-t-on pas dans l’Education Nationale ?? Ben de boulot voyons !! Mais nous voilà rassurés : nous discernons le pHAre au bout du tunnel …
« L’école inclusive vise à assurer une scolarisation de qualité pour tous les élèves de la maternelle au lycée par la prise en compte de leurs singularités et de leurs besoins éducatifs particuliers ». C’est chouette les belles phrases… Celle-ci, on peut la trouver sur le site du Rectorat de Limoges !
Qu’à cela ne tienne ! Nous avons lancé une grande enquête (via un petit formulaire) sur les enfants notifiés dans les classes mais non accompagnés. Et nous sommes assaillis de retours ! La jolie phrase prend déjà du plomb dans l’aile …
A moyens constants d’AESH, nos collègues accueillent dans leurs classes des enfants en situation de handicap, des enfants TSA, des enfants au comportement perturbateur… Dans ces conditions, que dire à une collègue qui nous contacte et qui a, dans sa classe de maternelle, trois enfants reconnus dans le champ du spectre autistique et qui n’a aucune AESH ? Que lui dire aussi quand elle nous raconte que ces mêmes enfants ne peuvent pas être pris en charge dans des structures spécialisées, faute de places ? L’enseignant référent de son secteur me confiait il y a quelques jours à peine que 85 % des inclusions ne pouvaient pas être couvertes par une prise en charge médico-sociale : « ben c’est simple : les parents qui ont un peu de ronds, ben ils s’offrent des educ spé en libéral !! ». Service public, quand tu meurs à petits feux… Egalité des chances euh… égalité de quoi ?
Autre cas de figure : un enfant de PS, reconnu TSA avant même son entrée en maternelle et notifié à temps plein avec une aide individuelle. L’Institution n’est pas en mesure de lui fournir son accompagnant dès la rentrée : les parents se soulèvent, menacent d’aller en justice si leur enfant n’est pas accompagné. Je ne vous laisse pas deviner le résultat : on déplace une AESH qui accompagnait plusieurs enfants en aide mutualisée pour couvrir le besoin « urgent » (je le mets entre guillemets, parce qu’il est vrai qu’il l’est, mais qu’il ne rend pas pour autant les autres demandes nécessaires).
La réalité, c’est celle-ci : faute de places en établissement spécialisé, des enfants se retrouvent scolarisés en milieu ordinaire. Bien souvent, ces enfants nécessitent un accompagnement à hauteur de leurs besoins, c’est-à-dire très élevé. Les AESH, déjà en sous-nombre, ne sont plus disponibles pour les enfants en inclusion plus « légère ».
La réalité encore ? C’est la promesse d’embauche de 4 000 AESH à la rentrée prochaine. Notre Académie est la seconde petite de France métropolitaine et représente moins de 1 % de notre territoire en termes d’effectifs. Ce qui équivaudra à l’embauche de 38.4 (peut-être arrondira-t-on à 39 ??) AESH sur l’académie à la rentrée 2022. Et je ne parle même pas des difficultés de recrutement des démissions de ces personnels… Et ce chiffre ne couvre même pas les seuls besoins de la Haute-Vienne…
On en parle de l’ARS ? A quand une révision du nombre de places en établissements spécialisés ? A quand une coordination entre Ministère de l’Education Nationale et celui de la Santé ? Mais peut-être (même sûrement !) y a-t-il des choses dont nous ne sommes pas au courant du fin fond de notre Limousin ? Cette coordination existe-t-elle déjà ? Si oui, comment s’articule-t-elle ? A quand une VRAIE politique de l’école inclusive ?
Les remplaçants maintenant … ou comment gérer la pénurie !
120 brigades disponibles sur notre département, 60 mobilisées dès le début de l’année sur des congés longs… 252 écoles dans notre (superbe) département, en moyenne 50 classes non remplacées par jour la semaine précédant les vacances de printemps ! A cette aberration, s’ajoutent les fameuses formations en constellation, qui mobilisent par exemple 8 remplaçants sur la même école le même jour, alors qu’un seul enseignant en maladie n’avait pas pu être remplacé la semaine précédente… En responsabilité, et en rappelant l’attachement fondamental de notre syndicat à la formation continue des personnels (mais pas à n’importe quel prix !) nous avons demandé la suspension de ces formations le temps que la situation du remplacement s’améliore. Refus net, catégorique et surtout insupportable (je cite) :
Ce n’est pas exceptionnel Madame la DASEN, c’est même très courant et cela impacte gravement et directement le quotidien des écoles !
Je n’aime pas être défaitiste mais tout paraît bien sombre dans notre profession… Mais rassurons-nous ! Nous apercevons le pHAre au bout du tunnel !
Pour les néophytes, il ne s’agit là nullement d’une lumière qui pourrait laisser augurer un avenir meilleur, mais bien du programme de lutte contre le harcèlement à l’école. Chez nous, les deux jours de formation des directeurs cette année y ont été exclusivement consacrés, même au plus fort de la crise sanitaire. Ce qui a provoqué un certain agacement de la profession. Non qu’il ne faille pas traiter la problématique de harcèlement, mais cela prend des proportions qui dépassent les seuls murs de la classe. Ce dispositif est effectivement présenté aux parents lors des conseils d’école, et fait également l’objet d’affichages avec la communication du numéro de téléphone d’une centrale d’appels qui redispatche ensuite les appels sur les départements concernés.
Nous commençons ainsi à être confrontés à des parents qui portent plainte contre des enfants pour un vol de doudou et un détournement de goûter qu’ils apparentent eux-mêmes à du harcèlement, ou encore des chamailleries de cour de récré qui arrivent directement sur le bureau de l’IA-Adjoint.
Loin de moi l’idée de dire qu’il ne faut pas agir sur ce fléau qu’est le harcèlement à l’école… Mais le libre arbitre de chacun donne lieu à des situations ubuesques qui arrivent une nouvelle fois sur les bureaux des directeurs d’écoles, qui semblent décidément destinés à voir s’éloigner d’eux le bateau de la simplification administrative des tâches de direction…
Anabel ROY
Ce texte a été lu à la tribune du Conseil National du SE-Unsa le 18 mai 2022, de façon à ce que nos Secrétaires Nationaux aient connaissance et puissent pleinement s’emparer des problématiques de la Haute-Vienne.