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SE-UNSA 74


 Par SE-UNSA 74
 Le  lundi 15 juin 2015

Burn-out : sait-on vraiment de quoi on parle ?

 

L’UNSA souhaite que le CHSCT évoque et suive régulièrement l’évolution de cette  maladie dans le milieu professionnel.

Des chiffres inquiétants circulent sur le nombre toujours plus élevé de salariés guettés par l’épuisement professionnel. Au risque de voir des « burn-out » partout, alors qu’il reste difficile pour les médecins de les diagnostiquer.

Après le stress ou le harcèlement, le burn-out est-il en train de devenir le nouveau « mal du siècle » au travail ?

Depuis plusieurs mois, pétitions et appels, par des médecins du travail ou des parlementaires, se succèdent. Ils alertent sur ce syndrome d’épuisement professionnel qui toucherait toujours plus de salariés en France et appellent à sa reconnaissance comme maladie professionnelle.

Les chiffres évoqués sont alarmants

Début 2014, le cabinet de prévention des risques psychosociaux Technologia estimait à plus de 3 millions le nombre d’actifs « en risque élevés de burn-out ».

Dans un sondage, 17% des salariés s’estimaient « potentiellement » en situation d’épuisement. Mais derrière l’inflation d’estimations, plus ou moins fiables, qu’en est-il vraiment ?

Un « risque » de burn-out ?

La notion de « risque de burn-out » n’a rien de scientifique, car chacun d’entre nous peut être touché.

Les origines de l’épuisement sont multiples.

Une surcharge, un travail trop intense, un mauvais équilibre entre vies professionnelle et privée, l’influence des nouvelles technologies qui privent d’une phase de récupération complète après le travail, ou encore un surinvestissement.

Quant aux cas avérés qui parviennent jusqu’aux médecins ou psychologues, aucune source officielle ne les recense en France.

Problème de définition

Au-delà de la cécité statistique, un autre problème se pose : l’absence de définition établie par le monde médical.

« On parle d’une maladie et pourtant c’est le corps social – les spécialistes des risques psychosociaux, la direction générale du travail, les partenaires sociaux, etc. – et non la communauté scientifique qui s’exprime sur le sujet », déplore Patrick Légeron, psychiatre spécialiste du stress en entreprise..

« Il existe une description d’un syndrome, mais il n’est inscrit nulle part dans les classifications médicales. Un médecin ne peut donc pas faire au sens strict du terme un diagnostic de pathologie, comme il le ferait pour une dépression ou une addiction.»

Depuis une trentaine d’années, des experts tentent pourtant de définir le phénomène.

Trois éléments

Le premier est un épuisement physique et mental : les gens sont vidés, au bout du rouleau. Le deuxième, c’est l’atteinte massive émotionnelle, quand les individus sont comme carbonisés, sans émotion. Vient enfin le sentiment d’inaptitude. Il faut que les trois soient réunis pour que l’on puisse parler de burn-out. Autrement, on est dans une autre forme de souffrance, comme la dépression.

Mais il faudrait encore déterminer les seuils à partir desquels les salariés touchés par ces trois dimensions en deviennent malades. « Tout comme une dépression bien différente d’une tristesse, d’un blues ou d’un sentiment de découragement, il nous faut un curseur pour savoir quand l’on passe du mal-être à la maladie. A partir de quelle intensité, de quelle chronicité et avec quel caractère d’irréversibilité peut-on parler de burn-out ? »

Une souffrance bien réelle

Sans échelle précise, « il est facile de voir des burn-out partout, regrette le psychiatre. On entend des salariés dire qu’ils font un burn-out alors qu’ils reviennent en pleine forme après une semaine de vacances ».

De même, être stressé dans son travail n’est pas le signe que l’on basculera forcément vers une détresse plus sévère. « L’organisme a des ressources pour y faire face lorsqu’il est ponctuel. Ce n’est que quand il devient chronique qu’un phénomène d’épuisement peut apparaître. »

Comment expliquer alors le succès du mot « burn-out » dans le discours des experts, des employeurs et des salariés ? « Comme le stress et le harcèlement avant lui, ces phénomènes existent, mais servent aussi à mettre des mots sur d’autres situations de risques et de souffrance », juge l’experte. Autrement dit, évoquer le pire permet de prendre conscience que la souffrance au travail est bien réelle et que l’entreprise ou l’administration a sa part de responsabilité.