Gabriel Attal a annoncé le 5 octobre dernier la création d’une mission « Exigence des savoirs ». Cette mission a huit semaines pour rendre un rapport sur les réformes pédagogiques à envisager afin d’élever le niveau des élèves. À la base de la mission, se trouve une consultation des personnels (sans les CPE ni les PsyEN) sous la forme d’un questionnaire en ligne. Pour le SE-Unsa, le ministre est hors sujet.
Hors sujet sur le fond
Le titre même de la mission montre une vue restrictive et rétrograde de ce que l’École doit enseigner et apporter aux élèves. Les savoirs, formule répétée comme un mantra par notre ministre, seraient à eux seuls la solution pour aboutir à l’ambition affichée : accroître le niveau des élèves de la maternelle au lycée. Comment un ministre, en 2023, peut-il encore croire que des savoirs seuls, sans savoir-faire ni savoir-être, permettraient à nos élèves de réussir dans un monde de plus en plus complexe. Quel employeur, y compris l’État, recrutera dans les années à venir des jeunes n’ayant que des savoirs dont ils ne seraient que faire parce que l’École les auraient gavés de connaissances toujours plus nombreuses.
Par ailleurs, il suffit de remplir le questionnaire en ligne pour dénicher l’autre supercherie de fond. En effet, toutes les questions sont biaisées et orientées dans le sens de ce que le ministère a préparé et annoncé lors du lancement de la mission : le manuel unique à l’école élémentaire, la remise en cause des cycles, les redoublements, les sanctions pour asseoir l’autorité du prof ou la réécriture des programmes.
Hors sujet sur la forme
Comment peut-on sérieusement envisager de répondre en seulement huit semaines à la volonté de rehausser le niveau des élèves ? N’importe quel professionnel de l’éducation sait qu’il faut du temps pour élaborer un diagnostic et qu’il doit être partagé pour susciter l’adhésion, tout comme l’élaboration des solutions doit être pensée et construite en concertation. La méthode employée est un leurre. Faire vite, faire croire et appliquer les vieilles lunes ministérielles.
Hors sujet sur la temporalité
Que dire des moments forts choisis par le ministre ? D’abord, l’annonce de la mission a lieu lors de la journée mondiale des enseignants : le ministre ne parle donc pas des personnels mais de l’École pour les célébrer. Ensuite, l’envoi du questionnaire en ligne se fait en plein cœur des vacances d’automne : le ministre ne respecte donc pas le droit à la déconnexion des personnels. Enfin, le questionnaire peut être complété jusqu’au 20 novembre pour une présentation des conclusions fin novembre. Quand le ministère a-t-il donc prévu le dépouillement de la consultation ?
L’avis du SE-Unsa
Si l’ambition est partagée par le SE-Unsa, la méthode, l’orientation de la mission et la temporalité sont inacceptables.
Le SE-Unsa dénonce une mission idéologique qui ne sert qu’à légitimer des orientations déjà énoncées par le ministre avant même le lancement de la mission. Par ses questions orientées et biaisées, le questionnaire envoyé aux personnels ne sert donc qu’à cautionner des décisions qui semblent déjà prises.
Pour le SE-Unsa, il est légitime d’interroger le fonctionnement du système scolaire, ses faiblesses, ses limites et ses réussites. Cependant, la question de la réussite des élèves ne peut pas se limiter aux seuls savoirs et doit trouver une réponse dans un projet plus global qui s’inscrit dans le temps long d’une réflexion construite.