Dans la logique de la Refondation, le ministère de l’Education nationale met en place la restructuration de la formation des enseignants et personnels d’éducation. Il propose de s’attaquer aux référentiels de compétences que le précédent gouvernement avait installés sans négociation et sans grande motivation. 

La construction de référentiels de compétences pour les enseignants, les documentalistes et les CPE doit être considérée comme un temps fort, rare dans le déroulement et l'évolution d’une profession. Le dernier référentiel acté par l’arrêté de mai 2010 n’etait pas satisfaisant. Il avait été établi essentiellement pour décrypter la formation des enseignants.

Motivée par une pratique du dialogue social plus active, la réunion du 18 décembre au ministère arrive après la présentation de référentiels enseignants et documentalistes la semaine précédente. De fortes critiques avaient été émises, notamment par le SE-UNSA, à travers une lettre solennelle de notre secrétaire général auprès du responsable du dossier. Nous y dénoncions « un mélange sans distinction des missions, des activités, des connaissances, des compétences, des intentions, et qui réussit l’exploit, malgré son extrême longueur, de ne pas mettre en évidence, voire d’ignorer, les gestes professionnels au cœur de nos métiers ».

L’institution a raté le coche en 2010, il nous paraît impensable que la copie de 2012 passe à côté du sujet. Il faut au contraire être très attentif à la construction du projet de référentiel car, bien qu'affecté prioritairement à la construction des masters et à la formation des stagiaires, le référentiel sera un document installé dans le paysage et un point d’appui à la probable future mise à plat de nos statuts (enseignants et CPE). Cette refonte des statuts est aujourd'hui pratiquement actée et il faut s’y préparer.

A l’issue de la séance du 18 décembre et au vu des fortes critiques, le ministère a annoncé bien vouloir revoir les textes assez profondément. Il propose aussi, suite à l'intervention des organisations syndicales présentes, une tentative d’écriture d’un référentiel commun aux trois métiers (enseignants, documentalistes et CPE). Ce pourrait être un document commun avec des entrées métiers bien spécifiées mais aussi des interactions fortes entre les compétences. La forme n’est pas définie (avec ou sans annexes spécifiques).

Le ministère nous invite à faire des contributions. Nous lui avons transmis la nôtre.

Notre avis sur un référentiel commun

Nous disons, pourquoi pas ! Il devra cependant et contrairement au précédent de 2010, mettre en avant les compétences propres à chaque corps, tout en identifiant les compétences communes (il y en a pas mal). Nous ne souhaitons pas un catalogue des missions et leurs définitions mais une entrée dans les missions par les compétences à acquérir. C’est le propre d’une année de stage en responsabilité.

Le projet de référentiel aujourd’hui retoqué avait de nombreuses insuffisances que nous avons soulignées sans réserve durant notre intervention. Parmi les aspects à retravailler totalement, annuler et appelant une refonte du référentiel :
• Le ressenti à la lecture du document de caporalisation du métier (ce n’était pas l’esprit des textes de 82 et 89).
• Pour nous le référentiel est un outil d’acquisition, de repère et d’évaluation, voire d’auto-évaluation.

Il ne doit pas être injonctif et bloquant. Plusieurs items sont inscrits d’une manière autoritaire que les textes en vigueur ne préconisent pas. Nous trouvons ainsi l’item suivant : « compétence : faire preuve de conscience professionnelle ». On est ici à la limite du mépris voire de l’offense pour des stagiaires qui ont passé des concours très durs et dont l’intention est de bien entreprendre leur fonction.

Autres problèmes
• Les notions de plaisir, de bienveillance, de bien-être pour les élèves n’apparaissent pas clairement dans le texte. On dirait que tout tourne autour de l’efficacité froide et technocratique d’un système huilé à la micro particule. Les discussions de la Refondation ont pourtant mis en valeur la nécessité du bien-être, d’une école accueillante et apaisée. Tout cela passe par des procédures plus riches que le simple respect du règlement intérieur ou l’appui sur la morale républicaine. Ce sont des missions dévolues aux CPE qui n’apparaissent pas ici (voir circulaire de 82 et épanouissement de l’élève).  
• Connaître les concepts fondamentaux de la psychologie de l’enfant, de l’adolescent et du jeune adulte : une compétence reconnue aux documentalistes... et pas aux CPE, pourtant en immersion perpétuelle au milieu des élèves et dont la seule existence est liée aux élèves.
• Pas de référence à une quelconque formation des CPE à l’accueil des élèves et parfois des adultes en situation de handicap (ce qui est différent des élèves à besoins particuliers). Les CPE souhaitent pouvoir avoir accès à la certification du 2CA-SH. Il serait temps de le prendre en compte. Et c’est par exemple plus important que la maîtrise très élaborée d’une langue étrangère qui n’a pas besoin de tant de place ici.
• Rien sur l’apprentissage et la maîtrise des pratiques de la négociation, d’un entretien, de conduite et d’animation de groupes qui devraient constituer une sous-partie complète d’un des chapitres.
• Rien non plus sur la capacité à prendre des décisions rapidement et s’adapter aux situations qu’elles soient d’urgence ou non. Faire preuve d’autonomie en adaptant de la meilleure façon son action par rapport aux problématiques traitées. Il s’agit pourtant de compétences du CPE référencées dans la fiche métier du RIME (répertoire interministériel des métiers).
• On ne trouve aucune mention de l’existence du CPE dans le référentiel enseignant et aucune mention par déduction d’un travail collaboratif entre enseignants et CPE. On dirait en lisant le référentiel prof que ces deux mondes s’ignorent, qu’ils ne coexistent même pas. Le rôle du prof principal pourtant si important est à peine évoqué dans le référentiel enseignants.

Nous espérons une présentation en janvier bien différente et abordant le sujet sous un angle plus adapté à l’objectif qui reste la formation initiale des futurs enseignants et CPE.

Une affaire à suivre de près...