Des nouveautés à marche forcée
Les
conséquences de la dissolution de l’Assemblée nationale de l’année
dernière continuent de bouleverser le paysage politique français, mais
aussi l’Éducation nationale : c’est le ministère qui aura connu le plus
de changements de gouvernance ces dernières années. Une grande
instabilité qui aura inspiré de nombreuses mesures, mais aussi le recul
de beaucoup d’entre elles, comme en témoigne le parcours chaotique du Choc des savoirs.
Alors que la profession se remet à peine de l’annonce de la reconduction des groupes de besoins au collège en 6e et en 5e l’année
prochaine, et que la mise en place du programme Évars, obtenue de
longue lutte, suscite de nombreuses interrogations au sein des écoles et
des établissements, le ministère charge encore davantage la barque des
collègues au risque de la faire sombrer.
Du neuf avec du vieux
Il
faudra donc envisager de nouveaux contenus en français et en
mathématiques à la rentrée 2025 en cours moyen et en sixième, ainsi
qu’en langues vivantes étrangères au collège et au lycée, selon une mise
en œuvre progressive pour les langues.
Si
les attendus ne changent pas fondamentalement, on sent bien que les
résultats Pisa sont passés par là : les exigences des nouveaux textes,
souvent présentées de manière injonctive dans les versions initiales,
témoignent de la volonté du ministère de guider - pour ne pas dire
contrôler - les contenus d’enseignement.
En
mathématiques, la partie géométrie se réduit. En français, les
objectifs de lecture se mesurent désormais en nombre de mots par minute,
et la grammaire s’appuie sur un texte de référence qui n’a jamais été
soumis à l’avis des enseignants et de leurs représentants. De quoi semer
la confusion chez les élèves, et pas seulement. En langues, enfin, le
pire est évité avec le recul des objets d’étude imposés, qui auraient
drastiquement réduit la liberté pédagogique des enseignants.
L’avis du SE-Unsa
Le
SE-Unsa ne souhaitait pas ces nouveaux programmes et s’est opposĂ© Ă
leur mise en œuvre dès la rentrée 2025, qui n’est absolument pas
indispensable. Il y a malheureusement fort à parier que le ministère
s’entête à les imposer en septembre prochain.
Si le SE-Unsa se réjouit d’avoir obtenu que ces textes soient moins injonctifs qu’ils ne l’étaient au départ (les exemples de réussite sont déplacés dans les documents d’accompagnement), il déplore que certains éléments continuent d’y figurer (les points de vigilance, au mieux inutiles, au pire insultants pour les professionnels que sont les enseignants).
Surtout,
le SE-Unsa dénonce une politique qui consiste à imposer des programmes
sans concertation avec celles et ceux chargés de les appliquer : parodie
de consultation lancée sans aucune publicité et sans le concours des
inspecteurs (moins de 500 retours de collègues en français et en
mathématiques), aucun temps de concertation accordé aux équipes
disciplinaires pour s’approprier les programmes et les adapter au mieux,
textes publiés en avril pour une mise en œuvre en septembre… Obligeant
les enseignants de français et de mathématiques en 6e à remettre à nouveau en question leur progression commune, dans le cadre des groupes de besoins.
En
augmentant encore un peu plus la charge de travail des enseignants et
en imposant encore une fois des nouveautés sans leur demander leur avis,
le ministère exaspère la profession. C’est lui qui devrait changer de
programme !