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SE-UNSA MONTPELLIER


 Par SE-UNSA MONTPELLIER
 Le  jeudi 6 juin 2019

Réforme de la fonction publique et les contractuels ?

 

 

Le projet de la réforme de la fonction publique vient d’être adopté en première lecture à l’assemblée nationale, le mardi 28 mai 2019. Il va passer maintenant devant le Sénat pour être définitivement adopté par l’assemblée normalement en juillet.  

Le SE-UNSA, le syndicat des contractuels de l’académie de Montpellier vous propose un article sur la réforme de la fonction publique pour les enseignants, CPE et psyEN non-titulaires.  Il nous est apparu en effet important de traiter cette réforme depuis l’angle des contractuels qui vont être les premiers impactés par les modifications annoncées.

 

RECOURS AUX CONTRACTUELS : UN NOUVEAU MODE DE RECRUTEMENT

Le recours aux contractuels dans la fonction publique était jusqu’à présent très encadré. On ne pouvait y recruter un agent non titulaire seulement lorsque l’administration n’arrivait pas à pourvoir un poste par un fonctionnaire ou bien quand ce dernier pour une raison particulière laissait sa place vacante (congé maladie, congé formation ...), et enfin dernier cas (non appliqué dans l’Éducation Nationale) pour un accroissement temporaire de la charge de travail.

La réforme de la fonction publique réaffirme que les emplois permanents doivent être occupés en priorité par des fonctionnaires mais assouplit « significativement » le recours aux contractuels

Avec la réforme de la fonction publique,  le contrat va devenir comme le concours un mode de recrutement des agents publics. A termes,, il devrait même remplacer celui-ci car moins coûteux pour l’état. Gérald Darmanin, le ministre de l’action et des comptes publics, a même parlé de « généralisation du contrat, qui n’est pas la fin du statut, mais qui peut être une alternative au statut ».

 

RÉMUNÉRATION AU MÉRITE

L’article 11 du projet de loi prévoit « la cohérence des critères » pour la détermination du salaire des agents (titulaires ou contractuels). Parmi les critères sont retenus la qualification et les fonctions exercées. Le texte souligne l’importance de « l’engagement professionnel et du mérite.

Cette résolution introduit la possibilité que le salaire des agents (contractuels) puisse être fixé en tenant compte de leurs résultats professionnels. De manière générale, le nouveau cadre de gestion de la fonction publique devrait accorder plus de pouvoir au supérieur hiérarchique.  Le chef d’établissement devrait pouvoir choisir les personnels qu’il recrute et davantage peser sur la carrière des agents qu’il a sous ses ordres.

Laisser au chef d’établissement la possibilité d’influer sur le salaire de l’agent s’est créé davantage de précarité pour les non titulaires qui seront plus que jamais corvéables à merci car ils ne pourront plus rien refuser à leur supérieur hiérarchique.

 

PRIME DE PRÉCARITÉ

Ce prime de précarité ne faisait pas parti du projet de loi et a été rajoutée par les députés lors du passage du texte devant l’assemblée. Cette disposition permet aux contractuels de toucher à partir de 2021 une prime pour les contrats d’une durée inférieure ou égale à un an, qui ne seront pas renouvelés. Les contractuels dont le salaire est équivalent ou supérieur à deux fois le smic ne devraient pas être concernés par cette mesure.

Cette prime de précarité est une bonne nouvelle pour les petits contrats, même s’il est à craindre que la somme ne soit pas très importante (surtout si elle dépend de la durée des contrats). Elle ne règle pas le problème des quotités à temps incomplet ou des avenants qui se renouvellent tous les mois et qui comptent parmi les véritables causes de la précarité chez les non titulaires.

Si les syndicats sont dans l’absolu plutôt favorables à cette mesure, elle mérite qu’on s’intéresse à sa mise en œuvre et aux conséquences pour les contractuels :  quid des grandes vacances payées pour les contrats de 10 mois et de l’avancement du niveau de rémunération ?

 

LE CONTRAT DE PROJET

La réforme de la fonction publique introduit le contrat de projet dont le principe est basé sur celui du contrat de chantier dans le privé. Ce contrat à durée déterminée sera créé pour des missions spécifiques et ponctuelles.   Il sera au minimum d’une année et d’une durée maximale de six ans. Il n'ouvrira pas de droit pour obtenir un CDI ou être titularisé.  Il concernera les agents de catégorie A, B et C.

Il ne devrait pas concerner les enseignants, CPE ou PsyEN de l’Education Nationale qui répondent à un besoin pérenne.  Il faudra toute de même faire attention que certains rectorats indélicats ne dévoient pas son utilisation pour éviter de signer des CDI aux agents de certains disciplines ou corps qu’ils ne voudraient pas recruter à durée indéterminée.

 

RUPTURES CONVENTIONNELLES

Le texte de loi prévoit la possibilité d’une rupture conventionnelle comme dans le privé. Celle-ci fera l’objet d’une expérimentation pendant cinq ans pour les titulaires et pourrait rentrer immédiatement en vigueur pour les contractuels en CDI.

La rupture conventionnelle permettrait de bénéficier du chômage et d’une prime de départ, dont le montant reste encore à déterminer. 

Toutefois attention ! La rupture conventionnelle ne fonctionnerait pas si le contractuel est réembauché « dans la même branche par un employeur public dans les six ans consécutifs ». Il devrait alors rembourser les indemnités perçues.

 

L'analyse du SE-UNSA 

Quand une personne devient enseignant, CPE ou psyEN contractuel(le), elle accepte de manière implicite le salaire dérisoire et les mauvaises conditions de travail, car (dans la plupart des cas) elle sait que cette situation est transitoire. Elle durera le temps d’avoir l’ancienneté pour passer le concours et obtenir le précieux sésame (ou à défaut un CDI). On sait qu’on est exploité, on râle, mais l’espoir d’avoir le concours et un meilleur avenir professionnel nous fait patienter. Qu’en sera-t-il demain, si les contractuels sont privés de l’espoir de devenir fonctionnaire ?

Une chose est certaine, il faudra plus que les quelques mesurettes annoncées par le gouvernement pour rendre acceptable la situation des contractuels sur toute une carrière.

Les mesures du gouvernement « en faveur » des contractuels n’améliorent pas leur sort car elles continuent à les maintenir dans la précarité. Elles ne parviennent pas à faire oublier que cette réforme les prive de la seule chose qui pourrait remédier à leur situation précaire : le statut de titulaire.

Les contractuels de l’Éducation Nationale et de manière plus générale ceux de toute la fonction publique doivent bien avoir conscience qu’ils seront au final perdants. Nos dirigeants en pleine connaissance de cause vont les priver non seulement de l’espoir d’être fonctionnaire, mais surtout de l’avenir professionnel et de la stabilité financière qu’ils auraient dû avoir, en faisant le choix de la précarité pour eux.