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SE-UNSA AIX-MARSEILLE


 Par SE-UNSA AIX-MARSEILLE
 Le  mercredi 9 janvier 2019

Réforme du bac et du lycée : une mise en oeuvre contestable

 

 

Réforme du bac et du lycée : une mise en œuvre contestable.

 

La réforme du lycée et du baccalauréat entre en application à partir de la rentrée 2019 et ses modalités de mise en œuvre sont d’ores et déjà connues. Pourtant, de nombreux problèmes subsistent, résultant d’une réforme certes nécessaire mais menée dans la précipitation.

 

La lettre de mission du ministère pour la commission Mathiot, chargée de mener la réflexion sur la réforme du baccalauréat, précisait qu’il était question d’une part de revaloriser le baccalauréat et d’autre part d’en garantir une meilleure articulation avec le supérieur. Rappelons en effet que les séries telles qu’elles existaient jusqu’à présent ne reflétaient pas toujours le projet de poursuite d’études de l’élève mais bien plutôt une hiérarchie implicite, la série S étant hyper valorisée au détriment des autres. Ainsi que le constate le rapport Mathiot, 40 % des élèves qui passaient un bac S n’envisageaient pas d’études scientifiques et choisissaient la série S comme classe de niveau. De la même façon, une partie des élèves de ES s’étaient d’abord vus refusés en S. Quant à ceux de L, une partie avait essuyé un refus en ES ou en S et s’orientait finalement vers la série L pour éviter d’être « envoyée » en série technologique. Le décloisonnement des séries proposé par la réforme aurait pu être vecteur d’amélioration s’il n’avait pas été pensé a minima. En effet, les séries technologiques en ont été écartées et risquent donc, de facto, d’être les grandes perdantes de la revalorisation des filières. De plus, la réforme telle qu’elle est mise en œuvre risque d’aboutir non seulement à une reformation implicite des séries classiques : aucune obligation n’est faite aux établissements de constituer, pour les enseignements du tronc commun, des classes mixtes indépendantes des enseignements de spécialité choisis par les élèves.

 

À ces considérations générales s’ajoutent des difficultés organisationnelles qui auraient nécessité un accompagnement plus solide des équipes. L’interdépendance des choix des familles et de l’offre des établissements existe certes déjà, non seulement dans le cas des langues vivantes mais également dans celui des séries classiques. Le grand nombre d’enseignements désormais concernés multiplie toutefois les contraintes et, si les solutions de mutualisation entre établissements sont défendables sur le principe, elles se heurtent à des réalités de transport, de locaux et d’emploi du temps qui interdisent d’en faire des solutions à grande échelle. Ces contraintes risquent de réduire les possibilités de choix des élèves et, par là, la diversité des parcours pourtant inhérente à l’esprit de la réforme. Le seuil (nombre d’élèves par groupe) de création des enseignements de spécialité risque également d’être un frein à cette diversité des parcours, notamment dans le cas des enseignements les moins courants. Enfin, les options proposées devront être financées sur la marge d’autonomie de l’établissement qui devront faire un choix entre la mise en place de dispositifs d’aide (accompagnement personnalisé, co-intervention…) et l’offre optionnelle. Là encore, cette disposition risque d’amener à la réduction de l’offre dans les établissements. À cette réduction potentielle s’ajoute la mise en concurrence des options puisque, selon les dernières annonces du ministre, seul l’enseignement optionnel LCA devrait faire l’objet d’une bonification en plus de la prise en compte du contrôle continu. Pourquoi ne pas accorder cette bonification à toutes les options ?

 

L’introduction d’enseignements interdisciplinaires est à saluer dans la mesure où elle prépare l’élève à la vision plus globale qui lui sera proposée dans l’enseignement supérieur. Toutefois, là encore, les dispositions restent floues et aucun de ces enseignements ne prévoit de répartition entre les enseignants des disciplines concernées. Chaque établissement peut donc s’orienter vers des solutions diverses (co-interventions, voire annualisation du temps de travail pour certains enseignants) sans savoir si ces enseignements feront l’objet d’une dotation horaire spécifique. De plus, l’enseignement scientifique commun de Première et, dans une moindre mesure, l’enseignement numérique et technologique commun de Seconde contiennent tous deux des chapitres liés à des disciplines non présentes en lycée (éducation musicale, avec des références explicites à Bach, pour le premier et arts plastiques pour le second) : par qui seront dispensés ces enseignements ? Enfin, l’introduction d’un enseignement nouveau tel que Droits et enjeux du monde contemporain pose le problème de la formation des enseignants. Si une habilitation existe depuis 2011, la création d’une certification plus lourde a été évoquée mais sans faire l’objet de textes réglementaires à ce jour.

 

L'avis du Se-Unsa Aix-Marseille

Les incertitudes qui entourent l’application de la réforme ne sont pas propices à l’adhésion des équipes. Or, sans cette adhésion, toute nouvelle disposition, quelle qu’elle soit, court le risque d’être vidée de sa substance. La réforme du bac et du lycée telle qu’elle nous est aujourd’hui présentée ne se donne pas les moyens de ses objectifs et risque de mener à la reproduction de ce qu’elle prétend changer. Si une réforme était nécessaire, celle-ci manque d’ambition, de préparation et d’accompagnement aux équipes.