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SE-UNSA AIX-MARSEILLE


 Par SE-UNSA AIX-MARSEILLE
 Le  samedi 3 décembre 2016

Pourquoi créer une webradio en collège ?

 

1422522_10102052137851153_1003013631_nRaphaël HEREDIA est prof doc dans le département 70 et porteur d’un projet de Webradio dans son collège, il nous partage son expérience…

Vous avez mis en place un projet pédagogique de Webradio dans votre établissement. Pouvez-vous nous dire quelle est l’origine de ce projet et dans quel contexte il est né ?

Au départ il s’agit plutôt d’un enchaînement de circonstances hasardeuses. En tant que membre du CLEMI je me suis porté volontaire pour assister à une formation à la webradio scolaire, à Paris. Ce stage d’une semaine m’a ouvert les yeux sur un dispositif pédagogique et médiatique, propre à développer de nombreuses compétences, d’abord dans le champ de mon métier (compétences info-documentaires, compétences EMI) mais aussi dans d’autres champs disciplinaires.

Il m’a semblé que la mise en place de ce média, permettait une réelle motivation des élèves, par la prise de responsabilité et l’esprit collectif, tout en travaillant des compétences d’écrit et d’oral. En outre, elle permet un travail sur l’expression des ados, et d’aborder n’importe quel contenu disciplinaire dans une configuration vivante.

En évoquant la mise en place d’un plateau webradio au sein de l’établissement, mon équipe de direction a été convaincue de son apport pour le développement de pratiques innovantes pour faire vivre le collège.

En lançant cette initiative, vous voulez favoriser l’engagement des élèves et des adultes dans un projet collectif autour des médias. Quels sont les principaux objectifs poursuivis ?

Ils sont très nombreux !

L’objectif est d’abord de comprendre le traitement de l’information « de l’intérieur » : percevoir qu’informer ne s’improvise pas, mais que tout est pensé, préparé. C’est aussi saisir que cette pratique participe à la vie citoyenne. On est dans une dimension collective, on vise l’autonomie et la responsabilisation.

Un autre objectif est partager ce qui se déroule dans l’établissement grâce à l’expression des jeunes ; présenter de manière quotidienne des informations, en incluant celles concernant l’établissement lui-même, puis les publier et le faire savoir via le site du collège et nos comptes Facebook et Twitter.

Et puis, il y a le développement de l’oral. Même si tout est écrit en radio, nous visons à permettre à l’élève de travailler son propos, ainsi que la gestion de son stress. En effet, nous enregistrons une émission dans les conditions proches d’un direct grâce à une préparation de tous les sons nécessaires (génériques, bobines) et de toutes les interventions orales, tout en suivant un conducteur.

La Webradio est une démarche qui s’inscrit pleinement dans les compétences du socle commun. Pouvez-vous décliner les compétences visées ?

La webradio permet de développer les compétences liées à l’écrit ainsi qu’à l’oral, telles que présentées dans le domaine 1 du socle. On y parle également de comprendre le « langage des médias ». L’écrit en radio est particulier : on doit inscrire tout sur papier, en vue de l’oralité. De nombreux paramètres doivent être respectés : phrases simples, écriture selon les principes des 5W (What Who Where When Why). Ensuite, il y a l’entrainement de la voix, comme si rien n’était écrit (travailler le rythme, l’intonation, le timbre, le débit).

Dans le domaine 2 (les méthodes et outils pour apprendre, on évoque des compétences en lien avec les « démarches de recherche et de traitement de l’information ». Connaître le fonctionnement des médias, acquérir une distance critique et une autonomie suffisantes dans leur usage, sont également cités. La webradio est aussi un bon point d’encrage des pratiques numériques telles que développées dans le socle : « mobiliser différents outils numériques pour créer des documents intégrant divers médias et les publier ou les transmettre, afin qu’ils soient consultables et utilisables par d’autres. Il sait réutiliser des productions collaboratives pour enrichir ses propres réalisations, dans le respect des règles du droit d’auteur. » On utilise en effet de nombreux outils de traitement du son (Audacity, banques de sons, et Soundation, un studio de création musicale en ligne.) On utilise « les technologies numériques pour faire des recherches, accéder à l’information, la hiérarchiser et produire soi-même des contenus. »

La webradio scolaire touche aussi le Domaine 3 (Formation de la personne et du citoyen) : car l’élève « coopère et fait preuve de responsabilité« . On vérifie s’il sait « prendre des initiatives, entreprendre et mettre en œuvre des projets« . On est attentif également au respect du droit et des règles : les élèves doivent publier leurs émissions en respectant le droit d’auteur, le droit de captation de voix d’une personne. Ils découvrent des sons « libres de droit ».

Enfin, on peut s’appuyer sur domaine 5 (Représentations du monde), où l’on demande à l’élève de savoir « Découvrir que les médias transmettent certaines représentations du monde» et de « développer jugement, goût, sensibilité ».

Quels sont les mots-clés que vous utiliseriez pour décrire l’organisation pédagogique de votre projet ?

« Énergie » : parce que les élèves sont répartis en fonction de rôles dans l’organisation de la création d’une émission et que cela demande beaucoup d’attention et de dynamisme.

« Polyvalence » : il faut travailler de nombreux éléments autour de l’écrit, la mise en place de sa voix, le côté technique, la gestion du stress, etc.

« Direct » : l’objectif n’est pas de faire des montages sonores a posteriori, mais bien d’enregistrer l’émission « d’une traite », en ayant, au préalable, tout planifié.

« Temps » : car la préparation si l’on veut être minutieux peut prendre une dizaine d’heures pour une émission : analyser une émission, conférence de presse, découvrir le montage, savoir préparer un contenu, capter les sons, enregistrer, réécouter, s’autoévaluer…

« Répartition » : car chaque élève a un rôle spécifique (régisseur, mixeur, animateur, chroniqueur, reporter, etc.). L’objectif est alors de comprendre que le rendu final dépendra de la responsabilisation de chacun dans la tâche qu’il s’est fixée.

Monter un projet, c’est aussi développer des partenariats. Quels sont ceux que vous avez choisi de valoriser ?

Tout d’abord, nous essayons d’identifier des intervenants en fonction des sujets d’émissions : un expert pour un sujet sur le développement durable, un employé à la région pour une émission sur la réforme territoriale. Des interviews se font ensuite sur le plateau ou par téléphone (que l’on branche à notre table de mixage pour inclure la discussion dans le rendu final.)

Ensuite il y évidemment des partenariats locaux : il nous arrive de déplacer le plateau radio pour des émissions spéciales. Lors d’une émission sur l’histoire de l’esclavage, nous avons enregistré à la Maison de la Négritude. Lors d’une émission sur la lecture, nous pouvons nous déplacer à la médiathèque.

Les partenariats sont facilités grâce au numérique : il est aisé d’effectuer une interview à distance ou de profiter de la venue d’un intervenant dans l’établissement pour mettre en lumière un projet.

Il y a aussi le contact avec des journalistes, comme au moment de la Semaine de la presse, où un correspondant de la presse locale accepte de venir aider à la réalisation radiophonique.

Quelles suites à ce projet imaginez-vous pour les années à venir ?

Le plateau Webradio est l’affaire de tout l’établissement. À l’avenir j’aimerais former davantage tous mes collègues pour qu’ils puissent s’emparer de ce support pédagogique, avec ou sans ma présence.

La visite d’une radio est aussi un prolongement évident.

J’aimerais intégrer ce projet EMI à d’autres dispositifs (tels qu’un EPI), en montrant qu’il ne s’agit pas d’une charge de travail supplémentaire : la mise en place d’une webradio peut participer au traitement d’une partie du programme de manière active et différente.