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SE-UNSA AIX-MARSEILLE


 Par SE-UNSA AIX-MARSEILLE
 Le  mardi 3 février 2015

Les élus du SE-Unsa du lycée Joliot-Curie réclament un véritable projet éducatif pour l’agglomération aubagnaise et la création d’un nouveau lycée.

 

La Région Provence-Alpes-Côte-d’Azur prépare actuellement le transfert d’une partie de l’Institut de Formation en Soins Infirmiers (IFSI) d’Aubagne dans les locaux de l’ancien collège Joliot-Curie, en échange d’une rénovation partielle du lycée, un lycée vétuste par bien des aspects et l’un des derniers de type Pailleron en France. À première vue, cette opération pourrait apparaître comme une “bonne affaire” pour les différentes parties concernées. Le lycée obtiendrait enfin une rénovation sans cesse repoussée, l’IFSI serait pérennisée à Aubagne et la Région réaliserait une opération à faible coût dans un contexte de forte contrainte budgétaire. En vérité, une analyse plus fine et approfondie de la situation que celle proposée par le cabinet d’étude désigné montre que la région est en train de faire une erreur qui engage les intérêts d’Aubagne et de son agglomération pour plusieurs années.

           

            Il est frappant de noter que le projet de la Région n’établit guère de mesure des besoins éducatifs de notre bassin démographique actuel et ne pose pas la question des attentes éducatives futures. Pour y parvenir, une réelle étude démographique prospective est nécessaire, en établissant les besoins futurs tout en les intégrant dans une réflexion géographique à l’échelle de la communauté d’agglomération aubagnaise et de ses aménagements. Les derniers recensements font du Pays d’Aubagne et de l’Étoile un ensemble urbanisé de plus de 100 000 habitants, soit bien plus que de nombreuses préfectures françaises. De plus, la dynamique démographique de ce territoire, poussé par la proximité de la métropole marseillaise, est très forte. Sur la dernière décennie, plusieurs communes ont vu leur population augmenter fortement : entre 1999 et 2011, Aubagne a, selon l’INSEE, connu un taux de variation supérieur à 7 % ; Auriol, sur la même durée, atteint 25% tandis qu’une périphérie éloignée comme le Plan -d’Aups-Sainte-Baume affole les compteurs avec un taux supérieur à 124 %. Cette forte dynamique démographique touche également les plus jeunes, ceux qui seront amenés, dans les prochaines années, à gonfler les effectifs de l’unique lycée général et technique d’Aubagne, le lycée Joliot-Curie. En effet, la seule ville d’Aubagne a dénombré entre 2005 et 2011 près de 600 Aubagnais et Aubagnaises de moins de 14 ans en plus, soit une croissance de plus de 3% pour cette tranche d’âge. Cette poussée a déjà été prise en compte en partie par les collectivités territoriales comme en témoigne la création récente du collège des Seize-Fontaines à Saint-Zacharie. Au lycée Joliot-Curie, la pression démographique se traduit par une évolution constante des effectifs depuis 2008 (1532 élèves en 2008, 1553 en 2009, 1561 en 2010, 1591 en 2011, 1626 en 2012, 1675 en 2013, 1696 en 2014). A la rentrée 2015, ce sont 1727 élèves qui sont attendus nécessitant l’ouverture d’une dix-huitième classe de seconde – au minimum, signe supplémentaire de cette poussée démographique si cela était nécessaire. Le lycée a donc des besoins à la hauteur de sa responsabilité sur un bassin démographique aussi conséquent et dynamique.

 

            La situation du lycée Joliot-Curie est rendue complexe par des caractéristiques spécifiques. Il s’agit tout d’abord d’un lycée Pailleron, désigné ainsi en raison de son type d’architecture, désormais prohibée suite à l’incendie du collège Edouard-Pailleron, à Paris, qui avait coûté la vie de vingt personnes en 1973. Depuis cette date, la plupart des établissements a été soit profondément rénové, soit reconstruit. Or, sur le site du lycée Joliot-Curie des travaux de grande ampleur ne peuvent être envisagés : la proximité du cours de l’Huveaune classe l’espace en zone inondable, toute extension est ainsi rendue impossible et toute démolition ne peut donc être remplacée. Pour faire bonne mesure, le lieu est soumis à de nombreuses contraintes et limitations comme l’emprise des terrains sportifs ou de la poterie Ravel. Pourtant, c’est dans les locaux du lycée Joliot-Curie que la Région pense pouvoir installer à bon prix l’IFSI d’Aubagne. C’est sa décision et sa responsabilité. Toutefois, l’installation de l’IFSI vient alors contraindre encore davantage le site du lycée, avec des aménagements spécifiques liés à la présence de formations destinées aux adultes et limite les possibilités de développement du lycée (seul un étage de l’ancien collège sera réservé aux enseignements dispensés par le lycée). Croyant résoudre une partie des problèmes du lycée Joliot-Curie, la Région renforce les difficultés à venir. Une curieuse anticipation de l’aménagement ! À force de déshabiller Pierre pour habiller Paul, la Région est en train d’user jusqu’à la corde sa modeste garde-robe qui ne parvient plus à satisfaire les besoins d’une population de plus en plus nombreuse.

 

            De sa tour d’ivoire, la Région semble même s’enfermer dans ses contradictions. Rejoignant le désir des enseignants, elle évoque ainsi avec tambours et trompettes son ambition pour Aubagne et son lycée Joliot-Curie : en faire un “pôle” – sans plus de précision. Là encore, les faits viennent à l’encontre de ce beau projet. Tout d’abord, à l’échelle du lycée, l’installation de l’IFSI nécessite au moins le développement d’une filière technique en rapport (bac ST2S) jusqu’ici absente sur Aubagne : ceci semble compromis par des locaux rendus exigüs par l’installation… de l’IFSI. Plus signifiant encore, toute réflexion autour du bassin de formation semble totalement ignorée par la région dans sa logique d’aménagement. En effet, depuis la rentrée 2014, afin de mieux correspondre à la réalité des territoires, les bassins de formation qui déterminent les offres scolaires sur un espace donné ont été redéfinis. Aubagne, qui dépendait jusqu’ici de Marseille-Est, a obtenu une forme d’indépendance en prenant la tête d’un vaste réseau allant d’Allauch à la Ciotat. Or, l’ambition de la région pour ce nouvel ensemble territorial, dont Aubagne doit être la tête de pont, apparaît des plus pauvres. A Aubagne, l’enseignement terminal se résume aux seuls lycées Joliot-Curie (général et technique) et Eiffel (professionnel). Très peu de bacs techniques sont proposés aux enfants de l’agglomération aubagnaise, alors qu’ils sont pourtant porteurs pour le marché de l’emploi et adaptés à de nombreux profils d’élèves, tournés vers des formations supérieures courtes et professionnalisantes de qualité. Très souvent, l’éloignement de formations adaptées décourage élèves et parents et de nombreux choix d’orientation sont des choix par défaut, premier pas vers un échec scolaire. Il est alors très surprenant d’entendre parler d’un “pôle aubagnais”, alors qu’à l’évidence, ce vaste territoire de plus de 100 000 habitants est un trou noir pour l’administration régionale.

 

            Être à la hauteur des besoins scolaires de cette agglomération, c’est offrir un réel projet éducatif, cohérent et concerté. Nous ne pouvons nous satisfaire de ce jeu de bonneteau qui masque les besoins réels de notre lycée et de son bassin de formation. La rénovation du lycée Joliot-Curie associée à l’installation de l’IFSI en son sein ne peut être considérée comme une opération gagnante pour notre territoire. La poussée démographique actuelle risque de rendre obsolète dès le terme des travaux les nouveaux aménagements et ceux-ci, contraignant un espace déjà contraint, limitent toute ambition et possibilité de développement à venir pour l’unique lycée général d’Aubagne. Il nous semble ainsi indispensable de repenser toute rénovation à venir du lycée Joliot-Curie en parallèle avec la création d’un lycée supplémentaire, comme il est évoqué depuis trop longtemps maintenant à la Bouilladisse. Une telle construction s’inscrirait par ailleurs dans la logique d’une rehabilitation de la voie de Valdonne entre Aubagne et La Bouilladisse (projet Val’tram). Seule la création de ce lycée permettra de désengorger le site de Joliot-Curie, de lui offrir des perspectives de développement ambitieuses tout en satisfaisant l’ensemble des besoins éducatifs d’un bassin équivalent à de nombreuses préfectures françaises.

 

le 13 janvier 2015, une consultation de tous les personnels du lycée Joliot-Curie au sujet du projet d’installation de l’IFSI dans l’enceinte du lycée a donné les résultats suivants : inscrits : 197 - votants : 122 -  Contre : 87,7%  Pour : 12,3 %.

 

 

Marc DEWILDE, Philippe PEYRONNIN, Jean RENOUX, Laurent SAINT-JOURS, élus SE-Unsa au Conseil d’Administration du lycée Joliot-Curie d’Aubagne