Kamel Yousfi - Professeur de mathématiques à Aix-en-Provence

La réforme du collège prévue pour la rentrée prochaine a créé de multiples réactions et inquiétudes, en particulier concernant la question des moyens dont disposeront les établissements pour la mettre en oeuvre. Pour beaucoup, il s’agit d’un moyen détourné pour faire une nouvelle fois des économies sur le dos des collèges et en particulier sur certains postes comme l’enseignement des langues anciennes ou de l’allemand.

Aussi, les nouvelles pratiques proposées par la réforme (intégration d’un enseignement pluridisciplinaire, autonomie des établissements par la création de “marges profs”) ont pu provoquer confusion et interrogation sur sa mise en oeuvre. En prenant l’exemple de la  DHG d’un collège de catégorie 5, soit un établissement disposant d’une faible dotation horaire, nous pensons pouvoir démontrer que les principes de la réforme sont applicables dans tous les établissements, au minimum à moyens constants, au mieux en bénéficiant d’une augmentation des moyens.

 

La classification des collèges et l’indicateur h/e

Doc.1 – La répartion des collèges dans les Bouches-du-Rhône selon leur h/e Catégorie h/e moyen h/e mini h/e maxi 5 1,06 1,01 1,23 4 1,12 1,06 1,19 3 1,19 1,13 1,32 2 1,27 1,20 1,46 1 1,71 1,45 1,91

Les établissements scolaires sont classées en fonction de catégories d’enseignement (des établissements ayant un indice social plus favorable à ceux de l’éducation prioritaire) qui correspondent en théorie à un ratio dotation horaire / nombre d’élèves. D’un département à un autre, cette classification peut varier. Les principes de cette répartition horaire sont actés lors des CTSD. Ce point y est d’ailleurs un sujet de discussion actuel, puisqu’une harmonisation académique est prévue pour cette année.

Pour les Bouches-du-Rhône, la classification des collèges s’opère en cinq grandes catégories. La catégorie 1 correspond aux établissements REP+, la catégorie 2 au REP tandis que la catégorie 5 correspond aux établissements ayant un indice social plus favorable. Cette classification permet de trancher les différentes dotations horaires des établissements en fonction des moyens que l’on estime nécessaire pour tel établissement selon sa situation particulière. Un indicateur est alors utile pour évaluer la dotation horaire d’un établissement en fonction de sa catégorie : le ratio dotation horaire / nombre d’élèves (h/e). Le h/e peut être calculé dans tout établissement, correspondant à la division du nombre d’heures attribuées par la DHG par le nombre d’élèves prévus. Cet indicateur est important par son rôle dans l’attribution des DHG, et par ricochet, dans le cadre des prochaines rentrées, dans la mesure où l’autorité ministérielle a annoncé sa volonté “sanctuariser” les dotations horaires pour la mise en oeuvre de la réforme, ce qui implique pour tous les établissements, au minimum, un maintien du h/e.

Dans le cadre des Bouches-du-Rhône (doc. 1), la ventilation des cinq catégories au regard du h/e moyen de chacune des catégories confirme la hiérarchie attendue : les REP+ (cat. 1), depuis la récente réforme, dispose d’un volume horaire conséquent, largement supérieur aux établissements ayant un indice social plus favorable (cat. 5). Toutefois, nous  remarquerons qu’au sein de chacune des catégories, la moyenne masque difficilement des disparités importantes. Ainsi, les établissements ayant un indice social plus favorable couvrent ...

Doc. 2 – Les principes de calcul des DHG 2016/2017 Dotation Vol. horaire Grille horaire de base 26h par classe Heures statutaires (UNSS, vaisselle) Cf. statuts Dotation horaire supplémentaire 2,75h par classe Enveloppe « stratégique » / complémentaire Appréciation locale

...une amplitude allant d’un ratio de 1,01 à 1,23… ce qui place certains établissements de cette catégorie bien au-delà du ratio des établissements de catégorie 4 (ratio allant de 1,06 à 1,19). Nous retrouvons la même anomalie pour les REP+, puisque certains d’entre eux se confondent en moyens avec ceux de la catégorie 2 (les REP).

La confusion majeure vient de la catégorie 3, qui chevauche allègrement la catégorie 2, avec un ratio observé maximal de 1,32, largement supérieur aux établissements de catégorie 2 les moins bien dotés. D’autre part, nous remarquerons que l’amplitude des dotations est plus ou moins fortes.

Certains établissements REP+ double presque la dotation d’origine prévue, atteignant un ratio de 1,91, très supérieur à d’autres établissements de la catégorie qui culminent seulement à 1,45. Dans le cadre des établissements REP+, l’importance de ces dotations s’explique par la réforme de l’éducation prioritaire et en particulier de la pondération horaire de 1,1 prévue par les textes. Ainsi, un établissement REP+ qui dispose d’un h/e de 1,71 actuel, grâce à la réforme, se retrouverait sans la pondération à 1,55.

La réforme a donc, et nous nous en félicitons, largement contribué au renforcement des moyens de cette catégorie d’établissements. Pour le reste, ces observations chiffrées s’expliquent par l’histoire particulière de chacun des établissements. En effet, les dotations horaires ne sont pas seulement le fruit de systèmes calculatoires et de dispositions légales. Il y a des dérogations particulières et des dispositifs locaux qui sont le résultat d’un rapport de force historique entre chaque établissement et l’autorité académique au moment de l’obtention des moyens. Avec le temps, certains gains particuliers se sont ainsi fossilisés, ce qui explique de telles disparités. Ces disparités sont d’ailleurs un sujet central lors des CTSD pour le SE-Unsa dans la mesure où nous obtenons peu de réponses à nos questions concernant les justifications de tel ou tel écart, l’attribution des DHG manquant souvent de transparence.

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