Retour à l'article normal

SE-UNSA HORS DE FRANCE


 Par SE-UNSA HDF
 Le  vendredi 14 avril 2023

« Je consulte, tu consultes, il consulte, on verrouille »

 

« Je consulte, tu consultes, il consulte, on verrouille »

Quand le ministère des affaires étrangères lance une consultation sur l’enseignement à l’étranger faut-il être inquiet ou se féliciter de prendre part à l’exercice ?

Ni l’un ni l’autre à vrai dire : En participant ce jour à l’ouverture de ces consultations par le ministre délégué Olivier Becht, nous n’étions ni les nouveaux ravis de la crèche syndicale ni les derniers des grincheux acariâtres de l’éducation mais simplement des représentants des personnels lucides sur les contraintes et les limites de ce type d’exercice :

Difficile d’imaginer que le ministère ou les responsables de l’AEFE n’ont pas déjà quelques idées derrière la tête en ouvrant le bal et une feuille de route précise à vendre.  En effet, quelques minutes suffirent pour vanter ce qui semble constituer les nouvelles tables de la loi de l’AEFE et de son réseau : Le Cap 2030 cher au président Macron. Nous qui voulions interroger les objectifs et les moyens de cette stratégie nous resterons sur notre faim. Pas touche au bébé !

On connait d’ailleurs le sort habituellement réservé aux consultations trop ouvertes, de type cahiers de doléances : Elles ont un effet cathartique collectif, génèrent une libération de la parole très forte et autorisent chacun à rêver à un monde meilleur avant…la déception générale (ou en 1789… la révolution générale). Ici donc on verrouille comme une mesure de salubrité collective. Personne ne va rêver à un monde éducatif meilleur, et s’il y aura de la déception çà et là on pourra au moins se glorifier d’avoir consulté…en évitant la révolution au passage.

On a donc consulté à qui mieux mieux en cette matinée printanière, propice aux bourgeonnements des fleurs, des arbres et des idées pour l’éducation : Chacun étant strictement dans son rôle. Inutile de croire au miracle : La DGM faisait mine de découvrir les vertus du participatif et du travail en atelier, la sénatrice Cazebonne nous parlait de son bilan glorieux (les parents d’élèves peuvent lui dire merci) et de son souhait de valoriser les carrières des enseignants en réfléchissant à des parcours plus attractifs. Comme quoi tout arrive, même des propos progressistes chez les partisans de ce gouvernement. 

Les parents d’élèves suggéraient (sans surprise) qu’il fallait leur donner un rôle plus important. Rien d’étonnant quand on est habitué à écouter la FAPEE ou ses zélotes : les parents d’élèves ont visiblement une capacité supérieure aux autres à juger du travail des enseignants, une capacité supérieure aux meilleurs des gestionnaires à proposer une stratégie économique viable à nos établissements et une aptitude aigue à gérer les ressources humaines de ce réseau qui est le nôtre. Dommage qu’on n’ait pas songé à confier le sort de la France toute entière à un parent d’élève de la FAPEE. Emmanuel Macron n’ayant pas ce privilège insigne d’avoir donné naissance à des enfants scolarisés dans le réseau AEFE on doit être inquiet pour la gestion de l’hexagone en ce jour de manifestation contre la réforme des retraites…

Dans les propos de la matinée, très convenus et sans aspérités, les institutionnels ont pu vanter également l’excellence de notre modèle et la nécessité de le défendre face à la concurrence anglo-saxonne. Cocorico, soyons unis face à l’ogre américain et son réseau éducatif mondial.

Au delà des incantations sur les objectifs bientôt atteints de la feuille de route Cap 2030 nous avons été inquiets de constater que la stratégie de développement actuel piétine quand on regarde les chiffres de croissance des effectifs et que la volonté d’attirer « 40 000 élèves de plus sur 71 établissements nouveaux" n’augure pas d’établissement viables à long terme. Des petits établissements à moins de 600 élèves qui s’installeront dans des paysages éducatifs déjà saturés auront peu de chance d’être durables. Faut il s’en inquiéter ? Oui car le développement du privé se fait sur argent public et c’est autant de perdu pour les établissements conventionnés ou les EGD dont certains manquent cruellement de moyens d’investir pour demain.

S’il fallait retenir une réflexion en cette matinée ce serait celle de ce représentant de l’entreprise qui pointait le paradoxe de la stratégie actuelle de l’AEFE : Devoir faire fonctionner un réseau et, « en même temps », favoriser le développement de la concurrence à ce réseau. Un capitaine chargé de faire avancer le navire et obligé de provoquer "dans le même temps" des voies d'eau à coups de hache dans la coque. Voilà le défi actuel de l'AEFE et de son directeur et le paradoxe qu'il faut dénoncer.

Nous participerons aux ateliers qui vont débuter la semaine prochaine. En attendant le miracle d’une consultation qui se libérerait de son carcan idéologique. Ou pour dire au passage ce qu'on pense du carcan actuel.