Les chiffres de la violence : un phénomène limité mais qui empoisonne les communautés scolaires
Selon l’enquête SIVIS, pendant l’année 2017-2018, les chefs
d’établissement du second degré public ont déclaré en moyenne 13,4
incidents pour 1 000 élèves. Ils concernent en très grande majorité des
violences verbales, à l’encontre des personnels et des élèves. 20 % des
établissements n’ont signalé aucun acte grave. Deux incidents graves sur
trois se produisent au collège. Le nombre d’élèves poly-exclus est
estimé à 1500 (pour plus de 12 millions d’élèves).
Un plan « après-violences », sans éléments de prévention
Ce plan contient des éléments pour rendre la sanction plus rapide.
Le délai de convocation du conseil de discipline est raccourci de huit à
cinq jours ouvrables après les faits. De même, l’élève qui pouvait
disposer de trois jours pour présenter sa défense orale ou écrite, n’en
dispose plus que de deux.
De plus, la durée de conservation de certaines sanctions dans le
dossier administratif de l’élève est allongée. Les blâmes et mesures de
responsabilisation (TIG par exemple) sont conservés une année scolaire
supplémentaire ; les exclusions temporaires sont conservées deux années
scolaires après l’année de la sanction. Les exclusions définitives sont
comme auparavant conservée tout au long de la scolarité dans le second
degré.
Aussi, trois guides sont désormais disponibles pour accompagner les
personnels en cas d’incivilité ou d’agression dans le cadre de leurs
fonctions (1er et 2d degrés) ainsi que pour
accompagner les personnels faisant l’objet d’une plainte. Ces guides ne
contiennent aucune nouveauté mais constituent néanmoins des rappels
utiles pour connaître les démarches à adopter.
À cela s’ajoutent la sécurisation des abords des établissements qui
rencontrent des problèmes et la mise en place d’un référent « violences
en milieu scolaire » dans chaque département.
Or, en matière
d’incivilités et de violences en milieu scolaire, la réponse répressive
ne suffit pas. Les politiques « coup-de-menton » ont largement prouvé
leur inefficacité : la France a connu 14 plans violence depuis 1991. La
culture de la prévention reste à construire pour ne pas en rester à un
plan « après-violences » essentiellement curatif.
La question des élèves « hautement perturbateurs »
Ce plan prévoit l’affectation des élèves « hautement perturbateurs »
ou poly-exclus dans les classes relais pendant six mois (avec ou sans
l’accord de la famille) ou bien en internat-tremplin. Ces mesures visent
à éloigner ces élèves de leur établissement, mais que feront-ils dans
ces structures qui vont les accueillir ? Les difficultés seront-elles
simplement déplacées ? Quelle peut être l’efficacité de ce genre de
mesure, sans adhésion des familles et des élèves eux-mêmes ?
Après deux exclusions définitives, un chef d’établissement peut
solliciter le DASEN pour établir un Plan d’accompagnement et de
responsabilisation des parents (PAR). Parmi les actions proposées on
relève « une rencontre avec l’assistante sociale, l’adhésion à l’UNSS et
l’inscription à « devoirs faits ». Or, ces actions font déjà partie des
mesures de de prévention proposées par les établissements.
Hélas ce plan
ministériel ne prévoit pas de prise en charge globale (médicale
psychologique et pédagogique) pour cette catégorie d’élèves, pour
lesquels il est souvent nécessaire de prévenir, entre autres, les
problèmes liés à la « survirilisation », où la violence fait partie de
la construction d’une identité virile, les garçons étant beaucoup plus
nombreux que les filles parmi les élèves poly-exclus.
Climat scolaire : de vrais besoins du terrain
La question du climat scolaire est située à l’intersection de toutes
les problématiques éducatives et les principales préoccupations des
enseignants gravitent autour du climat scolaire : charge de travail
raisonnable, locaux adaptés où on se sent bien et que l’on s’approprie,
crainte de l’isolement, inscription des politiques scolaires dans la
durée, confiance dans les choix pédagogiques, reconnaissance salariale.
Cette question est aussi celle des conditions de travail : il est
regrettable que les représentants des personnels en CHSCT n’aient pas
été sollicités pour agir en direction de politiques de prévention et de
santé. Le manque d’efficacité de la médecine de prévention (par manque
de moyens) est une vraie inquiétude, d’autant que la fusion annoncée des
CHSCT et des CT sera de nature à diminuer l’efficacité de cette
instance et donc la prévention des risques professionnels.
Créer les
conditions d’un climat scolaire apaisé, au service des apprentissages
des élèves et du bien-être de tous est un objectif prioritaire ; c’est
aussi un puissant levier de réussite scolaire.
Pour le
SE-Unsa, la question du climat scolaire demande un changement de
paradigme ; cela passe par l’investissement dans la prévention, la
formation des équipes, la prise en charges des élèves hautement
perturbateurs pour faire face aux comportements difficiles d’une manière
juste, démocratique et appropriée. Enfin, il est essentiel d’inclure
l’enseignement primaire à cette démarche ; il est totalement absent du
plan ministériel.