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Évaluer les écoles et établissements, c’est permettre aux équipes de terrain de réfléchir à leur action, d’établir un diagnostic et de se fixer des objectifs en lien avec le projet d’école et d’établissement. Cela prend du temps, demande du travail collectif, qui doit être consenti, prévu et organisé dans le temps de service. Accélérer la cadence et mettre la pression à tous les échelons du système éducatif pour entrer dans cette nouvelle démarche ne fait qu’éveiller de nombreuses craintes et résistances légitimes.
Alors que tous les retours font part d’un système en tension et de personnels en perte de sens, pour l’UNSA Éducation il ne faut pas de travail supplémentaire et surtout pas de travail inutile.
Une évaluation très perturbée par la pandémie
« Le conseil d’évaluation de l’école (CEE), placĂ© auprès du ministre chargĂ© de l’éducation nationale, est chargĂ© d’évaluer en toute indĂ©pendance l’organisation et les rĂ©sultats de l’enseignement scolaire. » Ce conseil, crĂ©Ă© en 2019 par la loi pour une Ă©cole de la confiance, s’est donnĂ© un objectif Ă 5 ans pour Ă©valuer l’ensemble des Ă©coles et Ă©tablissements. Objectif perturbĂ© par la pĂ©riode de crise Covid, qui a freinĂ© la mise en Ĺ“uvre.
Après les EPLE, entrés les premiers dans la danse, voici le tour des écoles. Mais le fonctionnement des écoles, à la différence des EPLE, est assuré par des directeurs et directrices, qui pour une grande majorité d’entre elles et eux, sont toujours chargés de classe et sans aide administrative, pour organiser un travail supplémentaire. Dans un système éducatif qui se relève difficilement des perturbations de la pandémie de Covid, cette démarche d’évaluation apparait de fait comme une mission nouvelle, ajoutées à toutes les autres.
Évaluer et après ?
Beaucoup de craintes sont soulevées par ce nouveau dispositif que découvrent les professionnels du premier degré. Crainte du regard extérieur des collectivités. Crainte du regard des familles, car le cadre prévoit une évaluation du service public d’éducation par ses usagers. Crainte de répercussions sur les carrières, de freins à l’avancement, d’un blocage de mutations. L’organisation de l’école, en structures de petite taille et en grande proximité, justifie davantage ces craintes et nécessite des protocoles d’évaluation adaptés et appropriés. De plus, la charge de travail supplémentaire est conséquente.
Certes, les objectifs fixés par le CEE étaient bien différents, mais l’expérience des premières années doit être prise en compte. Il faut donner du temps aux équipes et aux corps d’encadrement pour pouvoir s’approprier ce nouveau paradigme et en percevoir la plus-value dans le travail quotidien. Et là , l’institution devra être au rendez-vous. Car entrer en démarche d’évaluation, c’est aussi faire émerger des besoins nouveaux dans une perspective d’amélioration. Ces besoins doivent être entendus, notamment en termes de ressources ou de formation continue et de développement professionnel. Or, c’est le gros point faible du système éducatif français qui peine à former équitablement son million d’agents.
De l’ambition d’une démarche au formalisme de son organisation
Si l’UNSA Éducation a soutenu l’intĂ©rĂŞt de l’évaluation des Ă©coles et Ă©tablissements, c’est surtout parce que ce dispositif, fondĂ© sur l’adhĂ©sion et le volontariat des Ă©quipes pĂ©dagogiques, introduisait une nouvelle modalitĂ© plus participative pour les personnels et donc plus Ă mĂŞme de poser des objectifs lucides et adaptĂ©s. Malheureusement, cet Ă©lan initial semble bien oubliĂ© aujourd’hui. Les listes d’écoles et Ă©tablissements Ă Ă©valuer sont Ă©tablies par l’administration qui semble plus soucieuse de « faire du chiffre » que de l’intĂ©rĂŞt du processus pour les enseignant.es et les Ă©lèves. Les modalitĂ©s de passation font fi des contraintes fonctionnelles. Elles obligent souvent les Ă©valuatrices et les Ă©valuateurs Ă des dĂ©placements excessifs, aggravĂ©s parfois par le choix de les deplacer Ă l’échelle de la rĂ©gion acadĂ©mique, faisant fi des difficultĂ©s organisationnelles et matĂ©rielles qui alourdissent la charge de celles et ceux qui mènent ces Ă©valuations. Le dĂ©fraiement mĂŞme de ces missions est parfois difficile Ă obtenir.
Pour allĂ©ger la charge de travail que gĂ©nère les Ă©valuations, les Ă©quipes doivent ĂŞtre rĂ©duites Ă trois personnes (dont un·e issu·e des corps d’inspection et un personnel de direction). De plus, toutes les demandes Ă©ventuelles de « rattrapage » de retards d’évaluation doivent cesser et cĂ©der la place Ă une planification lissĂ©e qui respecte la disponibilitĂ© de tous les personnels concernĂ©s, pour intervenir dans le pĂ©rimètre de leur acadĂ©mie et leur permettre d’assurer les autres missions dont ils ont la charge.
Pour l’UNSA Éducation, l’évaluation des écoles, des établissements et des services s’inscrit dans une démarche qualité. Elle doit permettre aux acteurs de terrain de réfléchir à leur action, d’établir un diagnostic et de se fixer des objectifs en lien avec le projet d’école et d’établissement. Cette évaluation n’a pas vocation à mettre en concurrence les structures éducatives mais à améliorer leur efficacité. Elle doit être suivie des moyens indispensables identifiés pour progresser : formations, ressources humaines, crédits pédagogiques. Elle ne doit pas s’ajouter à toutes les autres formes de débats annoncés par l’exécutif dans le cadre du Conseil national de la Refondation.
En conséquence, l’UNSA Éducation
demande sa suspension a minima durant le
premier trimestre de cette année scolaire
2022-23, pour les écoles, ainsi qu’une remise
à plat des objectifs et procédures afin que :
* les objectifs soient clarifiés
* l’articulation de l’évaluation de l’école ou d’établissement avec le projet d’école ou d’établissement soit explicitée
* la réponse de l’institution aux besoins identifiés soit garantie
* les procédures soient adaptées aux structures scolaires
* les moyens soient donnés aux équipes comme aux évaluateurs et aux évaluatrices afin que les procédures soient soutenables.
* les équipes d’évaluateurs et évaluatrices soient accompagnées et formées afin d’être légitimées et reconnues dans leurs missions.
Ivry sur Seine, le 8 septembre 2022,
Frédéric MARCHAND, secrétaire général de l’UNSA Éducation
Bruno BOBKIEWICZ, secrétaire général du SNPDEN-UNSA
Jean-Marc BOEUF, secrétaire général A&I UNSA
Christian CHAMPENDAL, secrétaire général du SNIA-IPR UNSA
Stéphane CROCHET, secrétaire général du SE-UNSA
Dominique POUCHAIN, secrétaire général du SN2D-UNSA
Patrick ROUMAGNAC, secrétaire général du SIEN-UNSA
Contact :
Nicolas ANOTO, chargé de mission Presse de l’UNSA éducation, 06 21 80 65 75