Au
mois de juillet, Sarah El Haïry, Secrétaire d’État en charge de la
jeunesse et de l’engagement, a déclaré ne pas fermer la porte à un
rétablissement de l’uniforme à l’École, dès lors que l’établissement et
les parents y étaient favorables. Récemment, François Jolivet (député
LREM de l’Indre) a publié une tribune soulignant que le port de
l’uniforme à l’École aurait des effets immédiats sur la laïcité, le
harcèlement scolaire, l’émancipation et l’égalité.
On
se demande bien pourquoi il s’est arrêté en si bon chemin en n’évoquant
pas les apports de l’uniforme pour lutter contre le chômage, le
réchauffement climatique, ou le variant Delta !
Il
faut dire que le « retour Ă l’uniforme » est en rĂ©alitĂ© un mythe,
puisqu’à aucun moment, un uniforme n’a été obligatoire dans les écoles
et établissements scolaires. Bien sûr, l’usage de blouses a été favorisé
(sans recherche d’uniformité), notamment à cause de l’usage de
porte-plumes à encre ; l’arrivée du stylo bille a balayé tout cela.
Ainsi,
les promoteurs de l’uniforme tentent d’avancer qu’il s’agit de lutter
pour l’égalité entre les élèves, en voulant freiner la visibilité de
vĂŞtements de marque, qui sont autant de marqueurs sociaux. Cela illustre
une profonde confusion entre l’égalité et son faux-semblant :
l’uniformité. En effet, il est dérisoire d’imaginer que promouvoir la
ressemblance va fabriquer l’égalité.
Pour le SE-Unsa,
la véritable égalité républicaine est celle qui garantit les droits
fondamentaux. Il s’agit pour l’École de donner à toutes et tous, non pas
l’égalité des chances, mais l’égal accès à une éducation de qualité.
Cela demande la mise en œuvre d’une offre scolaire (et périscolaire)
complète et de proximité, de veiller à ce que chaque élève soit soigné,
habillé et nourri. C’est un perpétuel défi dans notre pays qui compte
désormais un élève sur dix en situation de pauvreté et un élève sur cinq
en situation de grande pauvreté. Pour contrer cela, les bourses
existent mais uniquement dans le secondaire et leur montant maximal est
notoirement insuffisant (460€ /an). Pire, les propos hasardeux exprimés
par le ministre de l’Éducation nationale, et appuyés par le président de
la République, sur l’utilisation de l’allocation de rentrée scolaire
participent de la stigmatisation des foyers précaires.
Heureusement,
des collectivités instaurent la gratuité des fournitures scolaires ou
des tarifs sociaux de cantine, allant jusqu’à la gratuité pour les
enfants issus de familles pauvres. À l’inverse, quand des municipalités
ont voulu mettre en place des uniformes à l’École, ce fut un flop, comme
Ă BĂ©ziers ou Provins.
Ainsi,
que vaut l’engagement pour l’égalitĂ© des « uniformisateurs », qui
voudraient voiler pour ne rien en dire, les inégalités sociales et
scolaires qui minent notre système éducatif, avec leur cortège de
ségrégations et de ghettoïsations que le ministère laisse perdurer par
son inaction ?
Ă€ quel moment, les
« uniformisateurs » agiront contre l’entre-soi scolaire des plus
favorisés, ce séparatisme dont l’enseignement privé est le premier
opérateur en France ?
Pour
le SE-Unsa, le courage politique doit conduire Ă mettre en Ĺ“uvre une
nouvelle étape de démocratisation scolaire visant l’élargissement de
l’assiette de la réussite à l’École.
Ce
sujet vaut mieux que les coups, soit-disant politiques,
d’affabulatrices et d’affabulateurs pour qui l’idée même de République
sociale est très lointaine.