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Le week-end dernier, l'UNSA a pris acte du recul du gouvernement sur la question de l'Âge pivot. A l'évidence, cela a suscité un certain trouble. Profitons de l'occasion pour faire un rapide état des lieux de la situation, inquiétante à plus d'un titre.
Nous n’avons jamais été demandeurs d’une réforme des retraites (à point ou pas). Le projet qui est sur la table n'a pas été transformé d'un coup de baguette magique, il n’est pas bon, loin de là . Même si l’honnêteté pousse à préciser qu’il ne fait pas que des perdants, comme semblent le confirmer les échanges avec plusieurs responsables syndicaux de branches du secteur privé.
Pour les militants SE-UNSA de l’académie de Caen, les points négatifs restent très nombreux. La question se pose alors de savoir quelle est la position à adopter.
La lutte jusqu’au retrait et le refus catégorique de toute discussion ? C’est intellectuellement très confortable (et facile à défendre auprès des adhérents). Mais cela pose plusieurs problèmes.
Cet objectif peut-il être atteint ? En ce qui nous concerne, nous n’y croyons pas une seconde : Macron est focalisé sur l’objectif de la présidentielle, et son socle électoral est désormais clairement positionné sur le centre et la droite. Renoncer à sa réforme revient à perdre l’accès au second tour de l’élection de 2022. Il fera donc passer une réforme des retraites, malgré la contestation (qui ne « prend pas » dans le privé). C’est triste mais il nous faut être lucide : il n’y pas d’alternative à gauche pour porter un autre projet plus juste socialement. Notre démocratie est bien malade et bien immature.
Dès lors se draper dans la posture ferme du retrait pur et simple nous semble irresponsable en termes de mission syndicale : notre objectif est de défendre les travailleurs, et nous ne voyons pas en quoi laisser le gouvernement faire seul la réforme qui lui plaît sert la cause des collègues. Notre position est de lutter pied à pied pour obtenir le maximum. Le retrait de l’âge pivot (sur la période pré 2027) est en ce sens un premier pas : il constituait la mesure paramétrique du projet, une véritable punition pour les collègues proches de la retraite. D’où le message de satisfaction exprimé par l’UNSA ce week-end. Mais le combat ne s’arrête pas là , il reste de nombreuses étapes avant l’adoption finale du projet, et notre but reste de conquérir un maximum de garanties et de protection pour les personnels.
Un combat de longue haleine.
Nous mènerons cette lutte dans la discussion du projet de loi (que de choses à faire modifier !) et nous la menons déjà dans toutes les négociations qui s’ouvrent actuellement. Par exemple sur celle de la revalorisation des personnels de l’Éducation. Disons-le clairement : pour la première fois depuis des décennies, il y a pas mal d’argent sur la table, et c’est un combat crucial. Le dialogue ne s’ouvre pas dans un climat de confiance, c’est le moins que l’on puisse dire. Nous rendrons compte en toute transparence de son avancée (ou des reculs) aux collègues et nous n’excluons pas, si les circonstances l’imposent, d’appeler à nouveau les personnels à la grève, comme nous l’avons fait le 5 et le 17 décembre. Mais nous refusons les appels systématiques à un mouvement reconductible : les enseignants n’adhèrent pas à cette logique (ce n’est pas dans notre tradition et les chiffres de grévistes de jeudi dernier sont à ce titre éloquents), laquelle ne fait qu’affaiblir les collègues et griller des cartouches nécessaires dans la suite du combat.
Notre démocratie impactée ?
Cette situation n’est guère réjouissante, car au final on peut craindre que le syndicalisme (dans sa globalité) sorte fragilisé du conflit actuel. La posture du rejet est confortable mais, dans la configuration actuelle, elle n’obtient rien et n’obtiendra rien (mais ses partisans ne manqueront pas de faire valoir que les "évolutions n'ont été possibles que grâce à la mobilisation"). En realité, cela produira de l’amertume et de la colère chez les collègues qui, avec sincérité, suivent cette voie. Cela affaiblira la confiance dans l’utilité des syndicats et fera (comme en 2003) reculer la syndicalisation globale dans le pays. En ce qui concerne les partisans du dialogue et de la négociation, leur choix sera fustigé et dénoncé comme une « compromission », et le résultat risque de ne pas être différent.
L’affaiblissement du syndicalisme est un travail que le gouvernement poursuit avec application depuis 2017. Le dossier des retraites est une étape parmi d’autres. Ce faisant, il sacrifie un pan essentiel de notre système démocratique (déjà bien malmené par ailleurs) pour un hypothétique intérêt électoral de très court terme.