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Quels enseignements tirer des Ă©valuations nationales ?
Article publié le jeudi 19 novembre 2020.
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Le ministère vient de communiquer les rĂ©sultats des Ă©valuations nationales CP/CE1/6e. Il en fait l’instrument de la mesure de l’impact de la crise sanitaire et du confinement sur les acquis des Ă©lèves. Un point est indiscutable et tristement sans surprise : la crise n’a pas affectĂ© les Ă©lèves de manière Ă©gale et ce sont les plus fragiles socialement et scolairement qui ont le plus souffert. 
 
 
Des Ă©valuations toujours contestables
 
ProposĂ©es pour la troisième annĂ©e consĂ©cutive, ces Ă©valuations restent bien peu utiles aux enseignants et leurs rĂ©sultats sont toujours Ă  manipuler avec prudence. Le protocole et la façon dont elles sont construites ne permettent pas de confirmer ou invalider un pilotage qu’il soit national ou local. De plus, elles ne permettent pas aux enseignants de mieux mettre en Ĺ“uvre une aide adaptĂ©e aux Ă©lèves qui en auraient besoin, les rĂ©sultats arrivant dĂ©but octobre. On reste donc sur un protocole lourd et coĂ»teux avec une plus-value inexistante. Le seul intĂ©rĂŞt, mais il ne rĂ©pond qu’aux attentes des politiques, est de permettre de comparer les rĂ©sultats d’une annĂ©e Ă  l’autre et d’identifier d’éventuelles Ă©volutions. Reste nĂ©anmoins Ă  en identifier les causes. Et lĂ , chacun avance ses pistes d’interprĂ©tation en fonction de ses intĂ©rĂŞts ou de ses convictions. 
 
 
Un protocole qui s’améliore très lentement
 
Le ministère croit en ces Ă©valuations, il y passe du temps, communique sur ce qu’elles apportent ou prouvent (la plupart du temps, rien que l’on ne sache dĂ©jĂ ). Il prend nĂ©anmoins en compte les retours du terrain. Les Ă©valuations s’amĂ©liorent, mais très lentement. Le protocole est moins lourd, les outils de connexion plus performants, mais le satisfecit du terrain n’est pas dithyrambique : seulement 36 % des enseignants (26 % en 2018) dĂ©clarent par exemple que l’infographie proposĂ©e leur a Ă©tĂ© utile pour la communication avec les parents. 
 
 
Des résultats en cycle 2 qui ne nous apprennent pas grand-chose
 
Globalement, les rĂ©sultats sont un peu moins bons Ă  la rentrĂ©e 2020 par rapport Ă  l’annĂ©e passĂ©e, le confinement a Ă©videmment empĂŞchĂ© les Ă©lèves de CP et de CE1 de profiter pleinement d’un tiers de l’annĂ©e scolaire. Pour des Ă©lèves qui n’ont que 3 ou 4 ans d’école derrière eux, il n’y a pas de surprise. La dynamique que la Depp avait remarquĂ© l’an passĂ© lors de l’évaluation de mi-parcours en CP a Ă©tĂ© annihilĂ©e par le confinement. Pour les mathĂ©matiques, la rĂ©solution de problèmes et l’exercice de positionnement des nombres sont ceux qui sont les plus chutĂ©s, que ce soit au CP ou au CE1.
 
 
L’adhésion des enseignants reste à gagner
 
En dĂ©but de CP, pour l’ensemble des exercices, le taux d’accord des enseignants avec la pertinence des exercices proposĂ©s varie de 55 % Ă  79 %. Seul l’exercice de placement des nombres sur une droite numĂ©rique recueille un taux nettement infĂ©rieur (24 %), bien qu’en hausse par rapport Ă  2018 oĂą il Ă©tait Ă  15 %, on peut se demander pourquoi le ministère le maintient. Le fait que beaucoup d’exercices soient jugĂ©s moins pertinents en 2020 qu’en 2018 interroge quand mĂŞme sur la façon dont le ministère travaille, que ce soit pour les CP (5 exercices jugĂ©s moins pertinents sur 12) ou les CE1 (9 exercices jugĂ©s moins pertinents sur 14).
 
Le satisfecit du terrain est plus quantitatif que qualitatif : la durĂ©e de passation est mieux approuvĂ©e par les enseignants entre 2018 et 2020 et l’outil de saisie des rĂ©sultats s’est Ă©galement amĂ©liorĂ©.
Les enseignants s’interrogent, à juste titre, sur le fait de mettre en difficulté les élèves les plus fragiles dès le début de l’année avec des évaluations nationales dénuées de bienveillance alors qu’ils sont plus à même de mettre en œuvre des protocoles plus souples et à visée formative.
 
 
Les élèves de l’Éducation prioritaire, grandes victimes du confinement
 
Les grandes diffĂ©rences de rĂ©sultats entre Ă©ducation prioritaire (EP) et hors Ă©ducation prioritaire apparaissent surtout en comprĂ©hension. Ce n’est pas une surprise, la maĂ®trise de la langue orale Ă©tant meilleure dans les populations les plus favorisĂ©es. Et pourtant, c’est sur la phonologie, et pas la comprĂ©hension, que le ministère demande que les enseignants mettent l’accent avant l’entrĂ©e en Ă©lĂ©mentaire. En mathĂ©matiques, c’est en rĂ©solution de problèmes que les Ă©carts se creusent le plus, Ă  nouveau les compĂ©tences nĂ©cessitant une dĂ©marche de raisonnement devraient ĂŞtre mises en avant, ce qui n’est malheureusement pas le cas lorsque tout tourne autour des fondamentaux. Les rĂ©sultats en CE1 vont dans le mĂŞme sens.
 
Les Ă©carts se sont fortement creusĂ©s entre EP et hors EP depuis les Ă©valuations de mi-parcours de fĂ©vrier 2020 en CP, atteignant en moyenne 5 Ă  6 points. Les populations les plus Ă©loignĂ©es de l’École sont bien celles qui en ont le plus besoin. Le travail Ă  distance Ă©tait complexe et souvent ce sont ces familles qui ont hĂ©sitĂ© le plus longtemps Ă  envoyer leurs enfants de nouveau Ă  l’école Ă  la fin du confinement. 
 
 
Un grand besoin de mixité
 
Le rapport sur les Ă©valuations de sixième montre clairement les dĂ©gâts de la non-mixitĂ© sociale et de l’absence d’une politique soutenue contre les sĂ©grĂ©gations scolaires. Dans les collèges les plus favorisĂ©s socialement, les taux de maĂ®trise s’élèvent Ă  95,9 % en français et 86,5 % en mathĂ©matiques alors que dans les Ă©tablissements les moins favorisĂ©s, les taux de maĂ®trise sont respectivement de 75,3 % et de 50,3 %, pour le français et les mathĂ©matiques(*). La concentration d’élèves en difficultĂ©s sociales et scolaires ne peut que compliquer leurs apprentissages. Les enseignants se retrouvent Ă  devoir gĂ©rer des difficultĂ©s multifactorielles qui pourraient ĂŞtre moins aiguĂ«s si une rĂ©elle politique de mixitĂ© Ă©tait mise en Ĺ“uvre. 
 
 
Évaluations sixième : des explications Ă  prendre avec des pincettes
 
Les rĂ©sultats aux Ă©valuations 6e sont meilleurs cette annĂ©e qu’en 2019, aussi bien en mathĂ©matiques qu’en français. Cependant lorsque l’on regarde de plus près les mathĂ©matiques qui sont largement moins rĂ©ussies que le français, on remarque que de nombreux exercices de mathĂ©matiques demandent un niveau de lecture assez performant. Ainsi, si les Ă©lèves ont des problèmes de comprĂ©hension, ils ne peuvent que chuter en mathĂ©matiques sans que l’on puisse savoir oĂą en est rĂ©ellement leur maĂ®trise de cette matière. Les nombreux pièges, que la Depp appelle des distracteurs, ne font que compliquer la rĂ©elle Ă©valuation du niveau des Ă©lèves. On peut donc craindre un Ă©nième plan mathĂ©matiques alors que la comprĂ©hension de ce qui est demandĂ© peut ĂŞtre le nĹ“ud du problème.
Le nouvel exercice sur la fluence introduit cette annĂ©e n’a pas bien Ă©tĂ© rĂ©ussi mais devoir oraliser rapidement un texte inconnu lors d’une telle Ă©valuation ne peut qu’entraĂ®ner du stress chez beaucoup d’élèves et fausser leurs rĂ©elles capacitĂ©s. Ă€ nouveau, on peut craindre un plan fluence qui serait Ă©loignĂ© de ce qu’est vraiment la lecture : comprendre.
 
 
Des Ă©lèves en progrès, mais pourquoi ?
 
Enfin, il est assez regrettable d’entendre le DGesco se fĂ©liciter des dispositifs mis en place au printemps dernier pour les futurs sixièmes ou les vacances apprenantes, pour justifier l’amĂ©lioration des rĂ©sultats d’une annĂ©e sur l’autre en dĂ©but de sixième malgrĂ© la situation sanitaire. Ces dispositifs ont concernĂ© très peu d’élèves. Il est sans doute plus probable que le confinement ait permis aux futurs sixièmes d’amĂ©liorer leur utilisation du clavier de l’ordinateur. Ă€ souligner aussi que la mise en Ĺ“uvre des sĂ©quences Ă©tait un peu plus simple et que les Ă©quipes ont Ă©tĂ© sans doute plus vigilantes, averties des Ă©cueils de la passation de l’an dernier qui avaient rendu les rĂ©sultats largement inutilisables. 
 
Si les effets du confinement sont au final très mesurĂ©s pour l’immense majoritĂ© des Ă©lèves, les enseignants, eux, savent bien pourquoi : garder le lien avec leurs Ă©lèves, leur faire aimer l’école, les intĂ©resser, les faire rĂ©flĂ©chir, leur donner des habitudes de travail. Cela prend du temps, demande de l’énergie et une confiance rĂ©ciproque. Si cette confiance existe rĂ©ellement entre les enseignants et leurs Ă©lèves, c’est loin d’être le cas entre les enseignants et le ministère, ce qui est problĂ©matique Ă  l’ère de l’école de la confiance.
 

(*) Extrait de la note de la Depp sur les Ă©valuations 6- p. 31

 
 
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