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SE-UNSA 50


 Par SE-UNSA 50
 Le  samedi 27 novembre 2010

RYTHMES SCOLAIRES : QUEL PROJET DANS LA HOTTE DU PERE NOËL ?

 
Rencontre au Mémorial sur les rythmes scolaires. Le SE-UNSA, attentif à la question mais relativement méfiant quant à la démarche et ses modalités, était présent. 

 

Mieux vaut tard que jamais… quoique ! Mercredi soir se tenait au Mémorial de Caen une Table Ronde sur le thème des rythmes scolaires. L’affluence que l’on a constatée témoigne que cette question intéresse largement la communauté éducative, même si beaucoup de participants ne se font en réalité guère d’illusion sur ce type de débat… les pseudo consultations destinées à justifier des politiques déjà préparées ont fleuri ces dernières années, et la méfiance face au procédé se double désormais d’un certain dépit. Tout cela était perceptible hier dans les interventions de la salle. Ces dernières ont d’ailleurs eu trop peu de temps à disposition, et l’on aurait été bien inspiré de réduire la durée de certains « exposés » pour laisser davantage de place au débat, fut-il très largement biaisé. En effet, après avoir supprimé la classe le samedi matin sans aucune concertation, après avoir réformé le lycée en évacuant la question des rythmes, on s’empare maintenant d’un débat présenté comme « central » et incontournable. Si c’est si important, pourquoi avoir mis la charrue avant les bœufs avec des réformes précipitées ? Pourquoi également lancer une consultation à la « va-vite », sans prendre le temps de la réflexion…. Il y a de quoi s’interroger sur les motivations réelles, et la cohérence de la ligne directrice, qui animent les responsables de la politique éducative du pays. Dans un contexte de crise économique profonde et d’économie mondialisée (toujours aussi peu régulée), la question du financement et des moyens hante en permanence nombre de propositions avancées sur la question des rythmes scolaires.

Peut-on réformer sereinement avec des moyens qui s’effondrent ? L’intervention des enseignants du CLE a souligné, avec un certain impact, ces contradictions : l’établissement expérimental se voit menacé d’une réduction des moyens, alors qu’il met justement en œuvre une école avec des rythmes différents…. Une des propositions récurrentes de la soirée était d’ailleurs de transformer le rythme quotidien en proposant, à des moments précis de la journée, des activités éducatives variées (culturelles, sportives…). Soit ! Mais qui finance cela ? Faut-il compter sur des collectivités territoriales par ailleurs de plus en plus sollicitées ? Ne risque-t-on pas de voir se développer une école à plusieurs vitesses en fonction du dynamisme et de la richesse des différentes communes ? Le même type d’observation vaut pour le fameux retour à la semaine de 4 jours et demi (pour les écoles). Derrière la volonté, clairement exposée, d’instaurer la classe le mercredi matin, une question reste sans réponse : à l’heure où l’on parle de plus en plus de fusions d’école, qui va payer les transports appelés à se développer ? Multiplier le temps de transport n’est-ce pas également sacrifier le « rythme » de certains élèves ? Pas de réponse en tous cas sur les questions économiques ! « Malaise » perceptible quand une enseignante souligne qu’elle est motivée et volontaire pour travailler « en projet », « en équipe » et de manière « différenciée » mais que, du fait de l’effondrement des moyens, son travail de direction d’école l’en empêche concrètement ! Silence également lorsque une intervenante, prenant au mot les chrono biologistes et plaçant au centre du débat l’intérêt véritable de l’enfant, propose de supprimer les 2 mois de vacances d’été pour les remplacer par des mois de vacances d’hiver….moins porteur auprès du tourisme estival peut-être ?

L’institution a ainsi une certaine inclinaison à botter en touche dès que ces problèmes économiques sont abordés. Cette propension à évacuer « le nerf de la guerre » est troublante mais s’inscrit dans une tendance lourde : celle qui consiste de plus en plus à ignorer la dimension socio-économique dans la réussite, ou l’échec, des élèves… Le débat sur les rythmes scolaires est riche de potentialités, mais le traiter avec des œillères et ignorer qu’un des principaux moteurs de la difficulté scolaire est la pauvreté est à la mode ! Constater que les élèves de ZEP dorment mal est certes intéressant, mais il nous semble un peu « court » d’envisager de régler le problème par un simple travail d’information des parents concernés !
Au fond, nous avons le sentiment que ce type de soirée a pour principal avantage de nous éclairer sur ce qu’il y a dans les cartons du gouvernement. Au sortir de cette rencontre, on peut se risquer à faire une prédiction quant au contenu de la hotte : école le mercredi matin, suppression de 15 jours de vacances d’été (avec quelques jours en plus ici et là, en mai par exemple...là où il y a plein de ponts !) ; un découpage quotidien nouveau, un éventuel allègement des programmes....Toutes ces propositions ne sont pas à rejeter, et une enseignante a eu raison, nous semble-t-il, de souligner que les professeurs n’étaient pas opposés aux évolutions ni arc-boutés sur les vacances. Mais trop de promesses ont été faites qui n’ont pas été tenues, et le doute et la méfiance sont désormais solidement ancrés !
Intérêt des enfants ou mesure d’économie ? Organisation différente de l’année ou simple tentation électoraliste de "se faire" les vacances des profs ? Même si le pire n’est jamais sûr, les discours récents témoignent d’une réelle volonté de faire payer l’addition de la crise à l’Education Nationale et laissent peu d’espoirs quant à la prise en compte réelle de l’intérêt des élèves : le discours récent de Fillon est sans ambiguïté ("non renouvellement d’un fonctionnaire sur deux"...comprendre multiplication des mesures de "carte scolaire", des postes partagés, explosion des effectifs et recours massif aux personnels précaires et non formés pour pallie le déficit constaté des titulaires) les interventions de X. Bertrand, les propositions consternantes de J.F. Copé (examen pour l’entrée en sixième), ou les déclarations tonitruantes d’Yves Jégo dessinent une tendance claire. Claire mais inquiétante pour l’avenir des personnels et des élèves, même si l’on devait leur proposer désormais des rythmes adaptés et réfléchis.

M.D