Tel un marronnier, le nombre dâheures de cours perdues par les Ă©lĂšves chaque annĂ©e revient rĂ©guliĂšrement dans la presse. Ce thĂšme fait Ă nouveau surface avec les prĂ©cisions apportĂ©es rĂ©cemment sur le âpacteâ (revalorisation conditionnelle pour les enseignants) qui prĂ©voit dâinclure des heures de remplacement en cas dâabsence de courte durĂ©e dans le secondaire. Par un raccourci commode, ces heures de cours perdues le seraient Ă cause des enseignants, nĂ©cessairement fainĂ©ants et facilement malades. Il serait donc normal de les pousser Ă les prendre en charge. Outre le fait que câest un procĂšs dâintention, câest faux et rĂ©vĂ©lateur de problĂšmes beaucoup plus larges prĂ©sents au sein de ce ministĂšre : des affirmations fantaisistes et des mesures idĂ©ologiques dâune part ; la pĂ©nurie de personnels et la volontĂ© de lâorganiser de maniĂšre systĂ©mique de lâautre.
Des réponses fantaisistes ou idéologiques
Les absences, si elles ne sont pas compensĂ©es, pĂšsent sur le fonctionnement des Ă©tablissements scolaires et des services administratifs. Les postes non pourvus Ă cause du manque dâattractivitĂ© de nos mĂ©tiers sont Ă©galement un problĂšme majeur. Le service rendu au public sâen trouve dĂ©gradĂ© et le mĂ©contentement des usagers est lĂ©gitime. Pourtant une part importante (environ les deux tiers) des absences est pour raison de service (formation, organisation des jurys et concours, rĂ©unions, âŠ). Peu importe, pour satisfaire une partie de lâopinion publique et se dĂ©responsabiliser de ces mauvais fonctionnements, nos responsables successifs ne manquent ni dâimagination, ni de toupet. En voici quelques illustrations :
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Bienvenue dans le monde de Kafka ! Le jour de carence rĂ©tabli en 2018 provoque des arrĂȘts plus longs et une dĂ©gradation de la santĂ© au travail. Cette mesure infantilisante participe donc Ă accentuer le phĂ©nomĂšne quâelle est censĂ©e contrecarrer.
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Un·e agent·e absent·e Ă un poste administratif ? Aucune rĂ©ponse ou une rĂ©ponse lacunaire : âDĂ©brouillez-vous sans !â. Ainsi nombres dâĂ©tablissements fonctionnent sans secrĂ©taire administratif·ve pendant des semaines ou des mois, nombres de services du rectorat sont en sous-effectif chronique. Plus gĂ©nĂ©ralement, alors que le ministĂšre de lâĂducation nationale est dĂ©jĂ sous-administrĂ© par rapport aux autres, les personnels des bibliothĂšques, ingĂ©nieurs, administratifs, techniques, sociaux et de santĂ© (BIATSS) ne sont quasiment jamais remplacĂ©s lors de leurs absences.
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âTravailler plus pour gagner plus !â Dans le secondaire, en assurant les remplacements de courte durĂ©e entre collĂšgues, avec les professeur·e·s des Ă©coles qui iraient faire du soutien en collĂšge. Cette mĂ©connaissance de nos mĂ©tiers et de la charge de travail dĂ©jĂ importante prĂ©figure un Ă©chec programmĂ© de ces mesures. Celles-ci provoqueront de nouvelles heures de cours non assurĂ©es, amplifiant lĂ aussi ce quâelles Ă©taient censĂ©es corriger.
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âFormez-vous pendant les vacances scolaires.â Cela ne contribuera certainement pas au âchoc dâattractivitĂ©â, vĂ©ritable arlĂ©sienne pour la profession dâenseignant·e. Par ailleurs, quel autre employeur se permettrait de demander Ă ses employĂ©âes de se rendre en formation professionnelle pendant leurs congĂ©s ?