SECTION SE-Unsa de l'INDRE ET LOIRE - MAISON DES SYNDICATS - 18 RUE DE L'OISELET - 37550 SAINT AVERTIN
Tél. 02 47 38 65 10 - Por. 06 01 07 05 84 - 37@se-unsa.org - Facebook - Twitter

 
Que sait-on du projet TED-i et ses robots de tĂ©lĂ©prĂ©sence ?
Article publié le vendredi 14 janvier 2022.
  • Lnk_facebook
  • Lnk_google
  • Lnk_twitter

TED-i, pour « Travailler Ensemble Ă  Distance et en interaction Â» est un dispositif pour les Ă©lĂšves empĂȘchĂ©s par des maladies somatiques, graves et de longue durĂ©e qui leur permet d’ĂȘtre prĂ©sents dans leur Ă©tablissement scolaire via un robot de tĂ©lĂ©prĂ©sence. Le 3 dĂ©cembre dernier, le ministre a annoncĂ© avec Brigitte Macron le dĂ©ploiement de 4000 de ces robots sur tout le territoire qui devrait ĂȘtre effectif fin 2022.

L’Unsa-Éducation a voulu en savoir plus sur ce projet dont l’annonce a paru soudaine aux acteurs de terrain. En effet, la gĂ©nĂ©ralisation des robots de tĂ©lĂ©prĂ©sence n’a absolument pas Ă©tĂ© Ă©voquĂ©e dans le cadre des États gĂ©nĂ©raux du numĂ©rique pour l’éducation.

Origines du projet 

Contrairement Ă  ce qui est indiquĂ© sur le site du ministĂšre, il ne s’agit pas d’une “premiĂšre mondiale”, les robots de tĂ©lĂ©prĂ©sence ont commencĂ© Ă  ĂȘtre utilisĂ©s de façon expĂ©rimentale en CorĂ©e et aux États-Unis dĂšs 1998 dans le champ Ă©ducatif. Ils arrivent France en 2013 en Auvergne-RhĂŽne-Alpes oĂč est nĂ©e la premiĂšre start-up française sur ce crĂ©neau, Awabot, qui a importĂ© un robot amĂ©ricain pour dĂ©velopper cette activitĂ©. Nous avions dĂšs 2014 Ă©voquĂ© la premiĂšre expĂ©rimentation dans des lycĂ©es de l’acadĂ©mie de Lyon, suivie par l’IFĂ©, sur notre site “École de demain”. En 2014, l’universitĂ© de Pau et le SAPAD (Service d’assistance pĂ©dagogique Ă  domicile) des Landes ont commencĂ© Ă  dĂ©velopper et Ă©tudier des usages pour les Ă©lĂšves empĂȘchĂ©s.      

Le principe

Le robot de tĂ©lĂ©prĂ©sence ne sert pas seulement Ă  assister aux cours, comme le permettrait n’importe quel moyen classique de visio-confĂ©rence. En effet, la capacitĂ© de se mouvoir (se dĂ©placer dans l’espace, tourner la tĂȘte) augmente trĂšs significativement les possibilitĂ©s d’interaction et de participation, non seulement dans le cadre des apprentissages, mais aussi dans le lien avec les pairs. Le robot de tĂ©lĂ©prĂ©sence peut aller en rĂ©crĂ©ation, bavarder pendant les dĂ©placements, ĂȘtre prĂ©sent Ă  la cantine
 Il permet Ă  l’élĂšve d’ĂȘtre prĂ©sent dans son Ă©tablissement en restant membre de son groupe de pairs. 

Il apparaĂźt Ă©vident que proposer cette possibilitĂ© aux Ă©lĂšves Ă©loignĂ©s physiquement de l’école pour des raisons de longue maladie ou de handicap est quelque chose de fort intĂ©ressant et que vouloir le gĂ©nĂ©raliser est une trĂšs bonne idĂ©e. 

La réalité

Nous avons depuis 2013 du recul suite Ă  des expĂ©rimentations accompagnĂ©es par des chercheurs, nous connaissons les conditions nĂ©cessaires, les Ă©cueils Ă  Ă©viter et les points d’attention sont identifiĂ©s : l’extension et la gĂ©nĂ©ralisation du dispositif est donc envisageable dans de bonnes conditions sauf que
 

L’objectif central affichĂ© est erronĂ©

La confusion entre maintien du lien social et dispositif pĂ©dagogique est entretenue jusque dans le nom du projet. Or c’est bien le maintien du lien social avec les pairs qui est central et premier (sinon de la visio suffirait pour un coĂ»t bien moindre), ne pas ĂȘtre clair sur ce point donne une impression de gĂąchis d’argent public et/ou d’une simple opĂ©ration gadget !      

L’éparpillement sur 3 types de robots 

TED-i prĂ©voit l’utilisation de 3 robots diffĂ©rents : Beam, Buddy et Edmo.

Concernant le robot Beam d’Awabot, on a du recul et il existe des Ă©tudes, peut-ĂȘtre aurait-il fallu le dĂ©ployer en prioritĂ© et tester les autres Ă  petite Ă©chelle d’abord.

Le robot Buddy, conçu initialement pour des personnes ĂągĂ©es isolĂ©es, est petit, il doit ĂȘtre posĂ© sur une table en classe ce qui retire une partie de l’intĂ©rĂȘt de la mobilitĂ©. De plus, son aspect “mignon” risque de gĂȘner l’effacement du robot au profit de l’élĂšve et augmente le risque que le robot devienne une “mascotte”. Dans les documents du ministĂšre il est prĂ©cisĂ© que “de par son apparence, il est principalement destinĂ© aux Ă©lĂšves du 1er degrĂ©, de 5 Ă  11 ans” ce qui tĂ©moigne d’un point aveugle sur ce sujet, au moins dans la communication officielle. 

Quant au robot Edmo, il est bon marchĂ© mais son Ă©quipement est low cost, sa camĂ©ra notamment donne une image de piĂštre qualitĂ© qui risque de rendre vaine toute tentative de lire ce qui est Ă©crit sur un tableau. De plus, il ne peut pas se dĂ©placer, juste orienter sa camĂ©ra, il est donc peu adaptĂ© pour les Ă©changes informels entre pairs. 

Le manque d’anticipation opĂ©rationnelle 

Les conditions techniques nĂ©cessaires au dĂ©ploiement massif de ces robots sont loin d’ĂȘtre partout rĂ©unies : il faut une connexion adaptĂ©e, un port wifi dĂ©diĂ© ouvert
 ce n’est pas toujours possible, notamment dans le 1er degrĂ© ! 

Il semblerait que seul le financement des robots ait Ă©tĂ© prĂ©vu, les volets formation et accompagnement, indispensables Ă  la rĂ©ussite du projet, ont Ă©tĂ© confiĂ©s Ă  des personnels existants sans crĂ©ation de postes supplĂ©mentaires ou allĂšgement d’autres missions. MĂȘme quand ils sont intĂ©ressĂ©s et volontaires, les collĂšgues concernĂ©s nous ont confiĂ© avoir du mal Ă  envisager sereinement cette surcharge de travail. 

La prise en main technique des robots est loin de suffire ; la connaissance des freins et les accompagnements nĂ©cessaires des Ă©lĂšves, des familles, des Ă©quipes et des enseignants concernĂ©s est essentielle. 
Il faut organiser la prĂ©sence et la gestion du robot dans l’établissement : comment est-il connectĂ© ? rechargĂ© ? stockĂ© ? transportĂ© d’un endroit Ă  un autre ? relancĂ© s’il buggue ?
 Il faut rassurer les enseignants qui, Ă  juste titre, s’inquiĂštent de la prĂ©sence d’une camĂ©ra dans leurs cours qui devient potentiellement visible par d’autres que l’enfant empĂȘchĂ© (ses parents, des soignants
).
Le cours doit ĂȘtre adaptĂ© en termes de volume sonore, de traces Ă©crites (certaines couleurs sur tableau blanc ne seront pas visibles
) et la tĂ©lĂ©prĂ©sence de l’élĂšve ne dispense pas de la mise Ă  disposition du travail par les moyens habituels (ENT
).
Il faut aussi prĂ©voir des rĂŽles remplis par des Ă©lĂšves volontaires pour gĂ©rer le robot (son transport, son positionnement
) en veillant Ă  ce que ce ne soit pas pesant et qu’il n’y ait pas de phĂ©nomĂšne de moqueries dommageable pour l’élĂšve empĂȘchĂ©.
Enfin la famille et l’élĂšve doivent ĂȘtre accompagnĂ©s par le SAPAD dans la prise en main technique, l’organisation (temps de tĂ©lĂ©prĂ©sence possibles en fonction des soins, de la fatigabilité ) et le vĂ©cu de cette situation trĂšs particuliĂšre qui n’est pas Ă©vidente. 
Il y a par exemple la question dĂ©licate du choix de l’enfant de montrer ou non son visage, il peut y avoir des Ă©tapes en fonction de son Ă©tat physique et de son ressenti (avatar, photo, vidĂ©o en direct). Il nous a Ă©tĂ© rapportĂ© que dans le cadre de TED-i il y aurait eu la consigne d’une interdiction absolue que le visage de l’enfant soit visible ce qui dĂ©sincarnerait fortement le dispositif lui enlevant une grande partie de son intĂ©rĂȘt et de la possibilitĂ© pour l’enfant concernĂ© de travailler lui-mĂȘme sur cet aspect.

Si vous souhaitez en savoir plus, cette confĂ©rence organisĂ©e en 2019 par l’universitĂ© de Pau est trĂšs complĂšte.

En conclusion

Il ne faudrait pas que l’on aille vers un abandon rapide d’un projet aussi utile pour les Ă©lĂšves auxquels il est destinĂ©, faute de rĂ©els moyens et d’une stratĂ©gie vraiment opĂ©rationnelle, progressive et prenant en compte tous les acteurs.
Nous espérons vivement, que TED-i permettra à terme, une réelle amélioration du vécu des élÚves en longue maladie.

Pour aller plus loin :

 
 
PĂ©tition
 
Nos campagnes
 
Santé
 
Aides spécifiques
 
Mouvement
 
Concours
 
Baromùtre Unsa Éducation
 
ALC
Je m‘inscris
Formation