Lors des Ă©valuations nationales de CP, CE1, 6Ăšme et 2nde de la rentrĂ©e 2020, des questions concernant leur vĂ©cu du confinement ont Ă©tĂ© posĂ©es Ă plus de 2 millions et demi dâĂ©lĂšves.
Quelques 8 mois plus tard paraĂźt la note de la Direction de lâĂ©valuation, de la prospective et de la performance (Depp) sur ces questions atypiques. En effet, câĂ©tait la premiĂšre fois que des questions sur le ressenti des Ă©lĂšves Ă©taient intĂ©grĂ©es aux Ă©valuations nationales juste aprĂšs des items de français et de mathĂ©matiques.
La lecture de la note montre que ce mélange des genres, entre évaluation scolaire et recueil de ressentis personnels, est loin de convaincre de son utilité.
Quelques 8 mois plus tard paraĂźt la note de la Direction de lâĂ©valuation, de la prospective et de la performance (Depp) sur ces questions atypiques. En effet, câĂ©tait la premiĂšre fois que des questions sur le ressenti des Ă©lĂšves Ă©taient intĂ©grĂ©es aux Ă©valuations nationales juste aprĂšs des items de français et de mathĂ©matiques.
La lecture de la note montre que ce mélange des genres, entre évaluation scolaire et recueil de ressentis personnels, est loin de convaincre de son utilité.
Contexte
En CP et CE1 il Ă©tait demandĂ© aux Ă©lĂšves dâentourer le matĂ©riel quâils avaient utilisĂ© pour travailler Ă la maison pendant le confinement, puis sâil Ă©tait facile pour eux de travailler Ă la maison, sâils sâĂ©taient ennuyĂ©s, sâils Ă©taient contents de rester Ă la maison, si les copains et copines leur avaient manqué⊠(voir ici). Pour ces niveaux, le caractĂšre facultatif des questions nâĂ©tait prĂ©cisĂ© ni dans les cahiers des Ă©lĂšves ni dans le guide de lâenseignant.
En 6e et en 2nde les Ă©valuations se passant directement sur ordinateur, les Ă©lĂšves Ă©taient destinataires dâun message les informant clairement quâils nâĂ©taient pas obligĂ©s de rĂ©pondre Ă cette sĂ©rie de questions. Outre les mĂȘmes questions que pour les CP et CE1, il leur a Ă©tĂ© posĂ© des questions sur les modalitĂ©s de travail pendant le confinement et sâils se sentaient prĂȘts pour rĂ©ussir leur annĂ©e scolaire (voir ici).
Ces questions ont Ă©tĂ© justifiĂ©es de la part du ministĂšre, notamment dans les informations aux parents, par lâobjectif dâen tirer des informations qui permettront dâamĂ©liorer lâaction pĂ©dagogique (informations Ă destination des parents).
Ces questions ont Ă©tĂ© justifiĂ©es de la part du ministĂšre, notamment dans les informations aux parents, par lâobjectif dâen tirer des informations qui permettront dâamĂ©liorer lâaction pĂ©dagogique (informations Ă destination des parents).
Les limites de la méthodologie
La prĂ©sence de ces questions, relevant de la sphĂšre personnelle des Ă©lĂšves, a suscitĂ© des rĂ©actions et un certain Ă©moi. De plus, mĂȘme si elles prĂ©sentent Ă©videmment un intĂ©rĂȘt, les rĂ©dacteurs de la note soulignent eux-mĂȘmes que le contexte de passation, avec ces questions figurant sur le mĂȘme support que les Ă©valuations nationales, a pu amener les Ă©lĂšves Ă les considĂ©rer comme des exercices scolaires avec des normes et des attendus, ce qui peut complĂštement fausser les rĂ©ponses apportĂ©es. (cf les donnĂ©es complĂ©mentaires Ă la note, onglet « mĂ©thodologie »).
On peut remarquer aussi dans la partie mĂ©thodologie que les rĂ©dacteurs pensent que lâaspect ânon obligatoireâ de ces questions Ă©tait clairement indiquĂ© aux Ă©lĂšves, ce qui nâa pas Ă©tĂ© le cas en CP et CE1 comme rappelĂ© plus haut.
Enfin nous nâavons trouvĂ© aucune mention des seuils de significativitĂ©, ni dans la note ni dans les donnĂ©es complĂ©mentaires, ce qui rend tout commentaire ou interprĂ©tation des rĂ©sultats plus que hasardeux.
Enfin nous nâavons trouvĂ© aucune mention des seuils de significativitĂ©, ni dans la note ni dans les donnĂ©es complĂ©mentaires, ce qui rend tout commentaire ou interprĂ©tation des rĂ©sultats plus que hasardeux.
Quels sont les résultats ?
En gardant bien en tĂȘte les limites dues Ă la mĂ©thodologie on constate dans les rĂ©ponses que :
- les filles déclarent plus que les garçons avoir peur du coronavirus (avec des écarts de plus de 10 points, figures 1, 2 et 3)
- elles ont aussi davantage eu le sentiment que le confinement Ă©tait trop long (Ă©carts de 7 Ă 12 points, figures 1, 2 et 3)
- le sentiment de manque des amis est plus exprimĂ© par les filles (de 8 Ă 11 points dâĂ©cart, figures 1, 2 et 3)
- globalement sur la perception du confinement les diffĂ©rences filles-garçons sont plus importantes que les diffĂ©rences en fonction du type dâĂ©tablissement (hors EP, REP, REP+ ou privĂ©)
- les supports traditionnels (cahier, crayon, papier) ont été privilégiés pour travailler à la maison en GS & CP (figure 4)
- le smartphone a Ă©tĂ© lâoutil le plus utilisĂ© en 3e pour travailler pendant le confinement (Ă plus de 72%, figure 5)
- 30% des Ă©lĂšves de 3e indiquent que le travail leur a Ă©tĂ© transmis pendant le confinement par des canaux autres que lâENT et le mail (figure 7)
- peu dâactivitĂ©s de production (vidĂ©os, photosâŠ) ou de recherches et exposĂ©s ont Ă©tĂ© proposĂ©es aux Ă©lĂšves de CM2 et 3e (figures 8 et 9)
- les filles de 3e déclarent avoir travaillé plus longtemps que les garçons (figure 10)
- les élÚves de REP+ de CM2 et de 3e disent avoir travaillé moins longtemps que les élÚves hors EP (figure 10)
Que disent ces résultats ?
En fait rien, et dâailleurs les rĂ©dacteurs de la note se gardent bien, Ă raison, de faire la moindre interprĂ©tation ou dâavancer des explications. Entre les conditions de recueil des rĂ©ponses et la non prĂ©cision de seuil de significativitĂ© des Ă©carts constatĂ©s⊠on ne peut rien en tirer !
Si on voulait vraiment exploiter ce type de rĂ©ponse, il faudrait coupler le traitement statistique avec des entretiens qualitatifs dâun Ă©chantillon dâĂ©lĂšves. Cela permettrait par exemple dâĂ©clairer ce que signifie pour un Ă©lĂšve en dĂ©but de CP « avoir peur du coronavirus » : peur dâĂȘtre malade ? de contaminer un proche ? des virus en gĂ©nĂ©ral ? de ce qui est Ă lâorigine du confinement qui a bouleversĂ© son quotidien ? autre chose ? Pour cela il faudrait que le ministĂšre finance le travail dâune Ă©quipe de recherche.
Lâusage massif des smartphones pour travailler indiquĂ© par les Ă©lĂšves de 3e, les types de travaux demandĂ©s et les canaux utilisĂ©s pendant la pĂ©riode de continuitĂ© pĂ©dagogique sont des Ă©lĂ©ments pertinents et utiles mais dĂ©jĂ connus depuis des mois par le biais dâautres enquĂȘtes, il nây a dans cette note aucun Ă©lĂ©ment nouveau.
En conclusion
On a le sentiment que le ministĂšre a profitĂ© de lâoccasion des Ă©valuations nationales pour improviser le recueil massif de donnĂ©es dans des conditions inadĂ©quates et sans les moyens nĂ©cessaires pour que cela soit utile. On est trĂšs loin de lâobjectif affichĂ© dâen tirer des informations permettant dâamĂ©liorer lâaction pĂ©dagogique. Il semble sâen ĂȘtre au moins rendu compte en partie puisque dans les Ă©valuations nationales de la rentrĂ©e 2021 il nây aura pas de questions sur le vĂ©cu de la crise sanitaire pour les Ă©lĂšves de CP et CE1 mais seulement pour ceux de 6e et de 2nde.
Pour le SE-Unsa, il est problĂ©matique dâassocier des questions relevant dâun ressenti personnel des Ă©lĂšves Ă des exercices dâĂ©valuation scolaire, qui plus est sans en prĂ©ciser la rĂ©elle utilitĂ© et sans notifier clairement aux Ă©lĂšves et Ă leurs familles leur caractĂšre facultatif. Il demande lâarrĂȘt du mĂ©lange des genres et le financement de recherches qualitatives par des chercheurs qui pourraient ĂȘtre associĂ©s Ă la DEPP.
Sources
Données complémentaires (figures non présentes dans la note et méthodologie)