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SE-UNSA 33


 Par SE-UNSA 33
 Le  lundi 14 octobre 2013

3ème plan autisme : l’École au centre des conflits d’intérêts

 
La DGESCO1 et la DGCS2 terminent la rédaction du cahier des charges des modalités de fonctionnement des unités d’enseignement (UE) qui seront implantées au sein d’écoles maternelles.
 
La création de 30 postes d’enseignants est prévue à la rentrée 2014 soit une unité d’enseignement par académie, puis, à compter de 2015, se mettrait en place « un déploiement sur le territoire et selon les besoins, avec un essaimage progressif tendant vers une UE par département3 ».
 
Ces UE devraient recevoir 7 enfants autistes sévères en scolarisation complète et 7 adultes accompagnateurs, au sein d’une classe gérée par un enseignant spécialisé. Un plateau technique (psychomotriciens, orthophonistes…) viendra en appui. Selon les recommandations de la HAS4, les personnels formés à la méthode ABA et au programme TEACH seront privilégiés. Les méthodes comportementales cognitives préconisées, pour être efficaces, doivent être pratiquées de manière quotidienne et intensive, à raison de trente à quarante heures par semaine, par une équipe éducative formée et coordonnée, intégrant les parents.
 
L’État dicte les contenus d’action
 
Les recommandations officielles ont raison d'insister sur la nécessité de cohérence entre les prises en charge du patient, qu’elles soient sanitaires ou médico-sociales. Elles soulignent également l’intérêt de professionnels de compétences diverses autour du patient et de sa famille. Mais à l’heure où un dialogue entre neurosciences et psychopathologie devient enfin possible, l’État dicte aux professionnels des contenus d’action. Les parents perdent leur liberté de choisir les méthodes dont ils veulent faire bénéficier leur enfant. Les pratiques recommandées, uniquement éducatives, répondant au lobby de certaines associations de parents, se détournent des prises en charge multidimensionnelles et intégratives (pédagogique, éducative, rééducative et psychothérapeutique). Pourtant la psychiatrie de secteur a toujours pratiqué l’intégration scolaire lorsqu’elle est possible, en soutenant les enseignants et les parents pour la réussir. L’enfant autiste devient objet d’éducation et de rééducation, là où les pédopsychiatres travaillent avec complexité sur un sujet en devenir.
 
La pédopsychiatrie ignorée
 
L’autisme est un sujet très douloureux et explosif qui se trouve depuis plusieurs mois au cœur de violentes polémiques. Dans ce 3ème plan autisme, rien n’est dit de la causalité multifactorielle de l’autisme infantile, sur la caractéristique clinique qui réalise des tableaux très hétérogènes, alors que la validité scientifique du DSM est contestée par les plus hautes autorités américaines. De même « la pédopsychiatrie de service public en charge des problèmes sanitaires des enfants autistes n’existe tout simplement plus dans le rapport, et la psychiatrie de secteur, invention dont la France peut s’enorgueillir à juste titre n’est citée qu’une seule fois, et encore, en tant qu’équipe hospitalière de pédopsychiatrie5 ». Par contre, certains établissements inadaptés à la prise en charge d’enfants autistes (IME, ITEP) sont mis en avant pour pallier l’insuffisance du service public ou l’absence d’hôpitaux de jour dignes de ce nom qui se voient obligés de refuser par manque de moyens, les enfants les plus en difficulté, car ils sont dans l’incapacité de leur offrir un accueil adéquat.
 
Surseoir au projet des UE
 
L’Ecole publique et tous ses professionnels œuvrent quotidiennement à la réussite de la scolarité de tous les élèves, y compris celle des élèves handicapés. Ils ne peuvent pas être placés au centre de tels conflits d’intérêts. Quelle place pour la parole de l’École, de l’enseignant, du psychologue de l’école, dans cette classe rattachée fonctionnellement à une structure médico-sociale ou sanitaire répondant strictement aux recommandations de la HAS ? « L’intégration scolaire en école ordinaire des enfants autistes est un formidable tremplin pour certains, une simple aide pour d’autres, une corvée douloureuse pour d’autres encore, et une souffrance intolérable pour d’autres enfin6 ».  Bernard Golse, psychiatre et psychanalyste, chef du service de pédopsychiatrie de l'Hôpital Necker-enfants malades à Paris, appelle à signer une pétition pour demander la renégociation de ce plan qui constitue une menace à l’égard de la pédopsychiatrie. Le SE-UNSA demande au ministère d’attendre l’apaisement et de surseoir au projet des UE.
 
1 Direction Générale des Enseignements Scolaires
 
2 Direction Générale de la Cohésion Sociale
 
3 3ième plan autisme
 
4 Haute Autorité de Santé
 
5 Pierre Delion, Quelques réflexions à partir du troisième plan autisme
 
6 Collectif des 39