Retour à l'article normal

SE-UNSA 29


 Par SE-Unsa 29
 Le  jeudi 27 mars 2014

ABCD de l’égalité : comment ça se pratique ?

 

Loin des polémiques et des récupérations politiques, Françoise Morel enseignante dans l’Hérault, témoigne de son travail ordinaire dans sa classe de maternelle pour promouvoir le respect de l’autre. Elle nous rappelle que transmettre les valeurs de liberté, égalité, fraternité, laïcité, c’est bien ce qui fonde notre enseignement.

Lutter contre les stéréotypes de genre, ce n’est pas nouveau à l’école, ça fait longtemps qu’on en parle. La recherche aussi nous montre depuis longtemps déjà que les filles sont meilleures que les garçons à l’École, mais qu’elles font moins de longues études ou qu’elles se dirigent moins que les garçons vers les filières scientifiques. À l’inverse, il faut faire attention aux jeunes garçons qui réussissent moins bien que les filles, surtout les petits garçons de fin d’année, en CP,  dans l’apprentissage de la lecture…

Alors, qu’est-ce qui a changé cette année ? Pourquoi tant de crispations ?

On en parle ! Pourquoi ? Simplement parce que le ministère de l’Éducation nationale a décidé de nous donner des outils. Des outils pour lutter contre les discriminations, pour promouvoir le respect de l’autre et de sa différence. Non pas pour gommer les différences, pour faire que les filles et les garçons soient pareils, mais pour que chacun puisse s’épanouir dans la société, affirmer son identité et s’affirmer dans ses propres choix. Pour qu’une fille sache que, si elle a envie d’être pompier ou chercheuse en neurosciences, elle peut le faire et que si un petit garçon dit qu’il veut être maître à la maternelle ou sage-femme, on ne le regarde plus d’un air suspicieux.

Des outils pour que les enseignants comprennent pourquoi leurs attitudes, les mots qu’ils emploient, peuvent être parfois discriminants. On le fait tous ! Sans s’en rendre compte ! Combien de fois entend-on encore dans les classes de maternelle «Les filles, allez ranger le coin poupée, les garçons, rangez le garage».

Dans mon école, les parents connaissent mon travail : aucun pro­blème, aucune absence particulière concernant la journée de retrait. Oui, des parents, inconnus à l’école, sont venus distribuer des tracts à la sortie ! On en a parlé et pour le moment, pas de suite.

 

Concrètement, qu’est-ce qui se passe dans la classe ?

Jeudi dernier, veille de vacances scolaires, nous sommes allés au cinéma avec ma classe multiniveaux de maternelle. De retour à l’école, une discussion s’est engagée entre les enfants sur les oignons, objet du premier court-métrage :

- Capucine : Moi, je sais que les oignons ça fait pleurer, ma maman quand elle en épluche, elle pleure.

- Mathilde : Moi, mon papa, quand il épluche des oignons, il met de l’eau dans sa bouche et comme ça, il pleure pas.

- Capucine : Moi, mon papa, il épluche jamais les légumes, c’est toujours ma maman.

- Damien : Moi, mon papa, il épluche les oignons, mais comme c’est un homme, il pleure pas !

J’ai écouté, je n’ai rien dit.

Qu’est-ce que ça change me direz-vous ? J’ai écouté et j’ai entendu…

Je prépare ma classe pour la rentrée…

Mon prochain atelier philo, il est prêt. Pourquoi on pleure ? Qui pleure ? Quand ? Pourquoi ?

Et puis on lira Thierry Lenain ; «Menu fille ou menu garçon», «Il faudra» ou «C’est ta vie !»

Juste pour que ça chemine… Et je sais que rien n’est jamais acquis. Il faudra encore du temps, beaucoup de temps…

En tant qu’enseignante, je continuerai à lutter contre toute forme de discrimination.

En tant que responsable d’un festival de littérature de jeunesse, je me bats pour promouvoir une littérature de qualité, ouverte et plurielle ; des auteurs, des illustrateurs et des éditeurs qui défendent dans leurs écrits l’ouverture d’esprit et la tolérance.

En tant que militante engagée, je soutiens le dispositif  des ABCD de l’égalité.