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SE-UNSA 24


 Par SE-UNSA 24
 Le  jeudi 29 janvier 2015

Pourquoi nous ne ferons pas grève le 3 février 2015 ?

 

Grève le 3 février, dans le paysage. Une grève dont l’UNSA ne sera pas. Non pas que la situation soit idyllique avec un présent radieux et un avenir rieur, tant s’en faut.  Il n’y a aucune raison de faire baisser son pouvoir d’achat plus vite que prévu en faisant une grève nationale inutile le 3 février prochain. Explications...

- La première explication vient sans doute du respect de quelques principes. La grève a été lancée par une seule organisation syndicale, sur ses seuls mots d’ordre, sans que la date, les modalités ni la plateforme puissent être discutées par qui que ce soit. Cet appel à la grève illustre une différence de conception fondamentale qui rejoint la différence de conception sur ce qu’est le syndicalisme... et la grève utile.

- S’il est logique qu’une organisation syndicale quelle qu’elle soit (nous ne faisons pas exception) se préoccupe effectivement des «besoins et attentes des personnels», on peut tout de même considérer que la politique éducative devrait d’abord viser à une meilleure réussite et une meilleure insertion des élèves et des étudiants. Cela a, certes, des incidences en termes de conditions de travail ou même d’attractivité du métier, mais ces conditions et cette attractivité, pour importantes qu’elles soient, ne sont pas l’objectif premier.

- On notera ensuite cette revendication, en soi légitime : «L’ensemble des personnels est confronté au gel du point d’indice et à l’absence de perspectives concernant la revalorisation de leurs missions et de leurs salaires». Tout observateur ayant un peu de recul pourrait être enclin à la perplexité. Le gel du point d’indice, la revalorisation des rémunérations concernent plus directement un autre département ministériel: le ministère de la Fonction publique qu’a en charge Mme Lebranchu. La question de la refonte de l’architecture statutaire fait l’objet de discussions en cours à la Fonction publique. 

- L'organisation syndicale qui appelle à la grève une organisation à qui nul ne dénie le droit de fixer librement ses orientations et décider de ses actions.
Simplement, dans un État démocratique — y compris sur le terrain de la démocratie sociale, les autres organisations sont en droit de rappeler qu’une organisation syndicale qui prend une initiative d’action en faisant en sorte de rester seule s’expose à une analyse du pourquoi de la part d’autres organisations. 
Il y aura des actions unitaires en « contre ». C’était le cas le 15 mai 2014, contre le gel salarial. On peut avoir à manifester son opposition, sa colère, ses exigences même si le contexte laisse peu d’espoir, ne serait-ce que pour prendre l'opinion à témoin parce que (dans le contexte donné, toujours), ce peut être nécessaire, voire indispensable. Mais on rappellera toutefois que cette action avait un objet ciblé (les rémunérations dans la Fonction publique) et un objectif affiché (le dégel du point) dans un moment de tension marqué par des menaces sur le gel des avancements d’échelon et de grade (ou de classe).

- Il faut aussi considérer, dans ce contexte, la situation des collègues, notamment en matière salariale, et ne pas les inciter à perdre une journée de rémunération pour rien dans une action «patchwork». La grève est « l’arme ultime ». Elle suppose que le mouvement ne soit pas un mouvement « en soi » (la grève pour la grève), mais qu'il s'appuie sur des objectifs clairement identifiés : modifier un rapport de forces en suscitant l’intérêt de l’opinion (et des médias) par la force de la mobilisation; débloquer une situation (ça s’est vu, de manière contradictoire, en 1989 pour la revalorisation de la fonction enseignante).

Nous pensons à l'UNSA qu’il vaut mieux privilégier le syndicalisme utile et, tant que des discussions ne sont pas achevées (notamment à la Fonction publique où elles viennent enfin de commencer), qu’il vaut mieux tirer des conclusions en fin de négociation. C’est pourquoi nous pensons que cet appel à la grève est une erreur (leur décision est leur affaire, mais c’est la nôtre que d’éviter que des personnels perdent une journée de salaire pour rien). Or la grève inutile, sans lendemain, dissuade par la suite les personnels — alors qu’on en aurait besoin — de faire la grève utile.

Pour nous, il n’y a aucune raison de faire baisser son pouvoir d’achat plus vite que prévu en faisant une grève inutile le 3 février prochain.

Extrait de "Perdre de l'argent pour rien? Pas avec l'Unsa!" de Luc Bentz, secrétaire national Unsa Education (pour lire l'article cliquez ici)