Gabriel ATTAL vient de tenir une conférence de presse et de présenter ses mesures pour un « Choc des savoirs ». Pour l’UNSA Éducation, ces annonces posent problème à plusieurs titres. Elles sont un renoncement à l’ambition que doit porter l’École pour chaque élève.

En faisant du redoublement un totem et en mettant en place des groupes de niveaux, le ministre assume un recul majeur pour pour la réussite des élèves. L’UNSA Éducation dénonce une marche en arrière historique sur la volonté d’inclusion, de réduction des déterminismes et d’élévation des niveaux de formation pour les jeunes de notre pays.

D’autre part, force est de constater que l’analyse de l’enquête internationale PISA 2022 est dévoyée. Seuls les résultats qui servent l’argumentation ministérielle sont exploités.

Quid de l’écart persistant, quasi structurel, entre les élèves des milieux modestes et ceux venant de familles plus favorisées ?

Quid de la formation et de l’accompagnement des enseignants et enseignantes qui ne sont pas évoqués par ce discours.

Ou encore du nombre d’élèves par classe plus élevé que la moyenne des pays faisant partie de l’OCDE ?

D’autre pays dont les résultats sont en baisse, tels que l’Ecosse ou l’Allemagne, n’ont pas l’intention de renforcer le caractère élitiste de leur système éducatif du fait d’une baisse des résultats obtenus pour certains items. L’UNSA Éducation dénonce des attaques sans précédent contre l’autonomie professionnelle des personnels éducatifs, alors que les réformes éducatives s’enchainent depuis 10 ans, quasiment chaque année, sans jamais que leur efficacité ne soit étudiée.

L’UNSA Éducation dénonce enfin l’illusion d’une automatisation pédagogique où on enseignerait selon la même méthode et le même manuel dans toutes les classes de France, comme des robots. La logique des « données probantes », des méthodes pédagogiques « infaillibles », brandie par de nombreux gouvernements conservateurs dans le monde, ne fait pas consensus dans la recherche éducative. Au contraire, l’« effet maître » et la priorité donnée à la formation des personnels et au climat scolaire, largement occulté dans les annonces d’aujourd’hui, obtiennent de bien meilleurs résultats pour relever le niveau scolaire et surtout, réduire les inégalités sociales dans la réussite des élèves. Un objectif qui ne semble pas être celui du gouvernement.

Pour l’UNSA Éducation, l’urgence du moment, c’est de faire du commun et de ne laisser personne au bord du chemin, alors que la panne de l’ascenseur social crée du ressentiment.

C’est pourquoi nous nous opposerons avec force, avec tous nos partenaires, à cette logique libérale, délétère pour le vivre-ensemble, qui renforce et cristallise les déterminismes sociaux dans tous les domaines de la société : l’emploi, les salaires, les retraites, et aujourd’hui, l’éducation.

Ivry sur Seine, le 5 décembre 2023

Frédéric Marchand, secrétaire général de l’UNSA Éducation

 

« Choc des savoirs » : un leurre au parfum de nostalgie

Le ministre de l’Éducation nationale et de la Jeunesse vient d’adresser un courrier aux personnels dans lequel il annonce des mesures pour l’École à la suite des conclusions de la mission « Exigence des savoirs » qu’il avait diligentée il y a seulement 8 semaines. Les choix de Gabriel Attal s’appuient également sur les résultats de l’enquête PISA 2022 et des évaluations nationales, instrumentalisés une fois de plus, pour justifier une politique éducative écrite d’avance. Au-delà de la baisse généralisée à tous les pays, les résultats montrent surtout de lourdes différences selon le milieu social. Pour le SE-Unsa, avec cette erreur de diagnostic préalable, le ministre ne prend pas la bonne direction pour améliorer le niveau général des élèves.
 
Toutes les mesures sont basées sur la sanction d’un parcours (redoublement/passage dans la classe supérieure conditionné, aménagements horaires) sans que rien d’efficient ne soit proposé pour prévenir la difficulté et soutenir les élèves les plus fragiles. Considérer que les groupes de niveau ou des cours supplémentaires seront la solution, alors qu’ils vont à rebours de la recherche scientifique qui a déjà démontré leur inefficacité, c’est duper les élèves et leurs familles. C’est aussi mettre à mal le travail sur l’estime de soi des élèves, pourtant essentiel à la réussite scolaire.
 
Le ministre décide également de s’attaquer à la liberté pédagogique des enseignants avec des manuels labellisés et imposés qui ne manqueront pas d’uniformiser l’enseignement là où le choix des méthodes pédagogiques, dans la diversité, permet d’adapter les démarches à chacun des élèves pour les faire réussir.
 
Le SE-Unsa dénonce des mesures trompeuses aussi bien sur les constats qui les motivent que sur les promesses qui se veulent séduisantes. Pour réellement lutter contre l’échec scolaire et améliorer le niveau des élèves, il est urgent de cesser de nous mentir. Regretter une École révolue évite sans doute de reconnaître le vrai malaise de l’École aujourd’hui, à savoir le manque cruel de mixité sociale.
 
M. le Ministre, ce leurre est dangereux. Vos annonces pour un « choc des savoirs » renforcent davantage le tri, la sélection et la ségrégation que le niveau des élèves. Cela ne fera qu’aggraver le dualisme scolaire et les clivages dans la société tout entière. 
 
 
Paris, le 5 décembre 2023
 
Élisabeth Allain-Moreno
Secrétaire générale du SE-Unsa
 
 

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