Dans
un dossier de presse publié le 6 février 2023, le ministre de
l’Education nationale et de la Jeunesse et la ministre des Sports et des
Jeux olympiques et paralympiques promeuvent avec insistance les 30
minutes d’activité physique quotidienne (APQ) à l’école. Quelques
semaines auparavant, Pap N’Diaye avait également acté la généralisation
des 2h supplémentaires de sport au collège.
Si
la priorité donnée au sport santé n’est pas contestable, le rôle donné
aux professeurs des écoles et aux enseignants d’EPS l’est davantage.
Les 30 minutes d’activité physique à l’école : les enseignants au second plan
En France, 17% des enfants sont en surpoids, et l’OMS classe la France 119e
sur 146 pays testés sur les niveaux physiques de leur jeunesse. C’est
sur ce constat alarmant que le ministre s’appuie pour juger indispensables les 30 minutes d’APQ, généralisées dans toutes les écoles primaires du territoire depuis septembre 2022.
Pour
les mettre en œuvre, 10 000 kits sportifs ont été distribués aux écoles
volontaires de novembre 2021 à septembre 2022, par l’Agence nationale
du sport (ANS) et Paris 2024. Le dossier de presse ne dit pas si
l’ensemble des écoles seront abondées en kits sportifs, maintenant que
le dispositif les concerne toutes. Les 30 minutes ne se substituent pas
aux 2h30 d’EPS hebdomadaires dispensées par les professeurs des écoles,
mais les complètent.
Pour autant,
on s’étonne du peu de place accordée aux PE dans le dossier de presse,
qui fait la part belle à l’équipe de 150 sportifs de haut niveau
constituée par le ministère, qui vont se déplacer dans les écoles et
animer ponctuellement ces 30 minutes.
Ce
sont pourtant les enseignants qui devront organiser les visites d’1h30
envisagĂ©es par le ministère, avec travaux d’élèves et temps d’échanges Ă
préparer. Des tâches supplémentaires qui dépasseront largement le cadre
initial des 30 minutes.
2h supplémentaires de sport au collège : à qui profite l’effort ?
Le
SE-Unsa a déjà exprimé ses doutes envers ce dispositif, expérimenté
dans une poignĂ©e de collèges de chaque acadĂ©mie, et qui sera gĂ©nĂ©ralisĂ© Ă
l’ensemble du territoire à la rentrée prochaine, comme l’a annoncé le
ministre en janvier dernier.
Une
externalisation des compétences des PEPS qui ne dit pas son nom, puisque
le principe consiste à libérer deux heures en fin de journée dans
l’emploi du temps des élèves, afin qu’ils puissent se rendre dans un
club sportif. L’offre proposée par la première fédération du sport
scolaire, l’UNSS, répond déjà à ce besoin de pratique physique
supplémentaire pour le prix d’une licence, mais le ministère ne semble
pas de cet avis.
Plus inquiétant,
les enseignants volontaires pour animer ces deux heures peuvent le
faire en club, sur le régime du cumul d’emploi…
La
confusion entre sport et EPS de la part du ministère n’est plus Ă
démontrer. La fonction même d’enseignant d’EPS semble ici complètement
dévoyée.
De plus, la
généralisation annoncée du dispositif ne pourra pas effacer les
inégalités territoriales : c’est dans les infrastructures et les
transports qu’il est urgent d’investir, afin que les enseignants d’EPS
puissent exercer dans de bonnes conditions.
Enfin,
aucun bilan local, chiffré et concerté, n’a été dressé de ce dispositif
avant sa généralisation hâtive. C’est une fois encore un signe de
mépris envoyé à la profession.
L’avis du SE-Unsa
Ă€
l’approche des Jeux olympiques et paralympiques 2024 en France, ces
mesures s’apparentent à des opérations de communication présidentielle
que l’on pourrait taxer d’opportunistes, si la santé de nos élèves n’en
était pas le point de départ officiel. La nation sportive voulue par le Président ne peut pas être construite uniquement par des acteurs issus du monde du sport.
Le
SE-Unsa rappelle que l’EPS n’est pas du sport et continue de
revendiquer une reconnaissance des professeurs des Ă©coles et des
enseignants d’EPS à la hauteur de leur engagement et de leur
investissement dans la pratique physique de leurs élèves, déjà très
conséquent, et dans un cadre éducatif.
Le
ministère devrait plutôt promouvoir les fédérations des premier et
second degrés que sont l’Usep et l’UNSS, en se donnant les moyens de ses
ambitions : améliorer les infrastructures dégradées et permettre leur
accès à tous les élèves.